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Quoi de neuf dans la protection sociale en Europe ?

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Écrit par Justine Hugues
Publié le 26 février 2019, mis à jour le 3 décembre 2020

Détachement, création de l’Autorité Européenne du Travail, droits sociaux en cas de Brexit sans accord…Le Centre des Liaisons Européennes et Internationales de Sécurité Sociale revient sur l’actualité européenne en matière de protection sociale. 

Le rapport statistique du CLEISS recense les données financières relatives aux prestations sociales versées par les institutions françaises aux assurés en situation de mobilité internationale. Près de 7,37 milliards d’euros ont été payés par la France en 2017 en application des accords internationaux de sécurité sociale dont elle est partie ou de sa propre législation nationale. Ce chiffre est en légère hausse (+ 0,69 %) par rapport aux prestations sociales payées par la France vers l’étranger en 2016. Cette évolution s’explique essentiellement par l’augmentation sur le poste des soins de santé (+126 millions d’euros), et dans une moindre mesure les prestations familiales et pensions d’invalidité (+3 millions). 

Bien qu’en diminution de 65,34 millions d’euros en 2017, le poste « retraite », qui regroupe les pensions de vieillesse et les allocations de retraite complémentaire, capitalise près de 87 % des flux financiers vers l’étranger. Le poste de retraite reste d'ailleurs la première dépense française sur l’ensemble de la décennie.

 

Tendance à étendre la durée des détachements

Il y a une tendance à étendre le recours aux détachements ainsi que leur durée. La France est le deuxième d’accueil des détachés (environ 248.000 en 2017) derrière l’Allemagne, et le 6ème pays d’envoi de détachés (109.000). L’écart entre entrants et sortant se creuse, quand il était près de l’équilibre en 2010.  Les travailleurs détachés français ont, pour la plupart des emplois qualifiés dans le secteur industriel, à l’inverse des détachés étrangers en France, qui occupent pour l’essentiel des emplois peu qualifiés dans le bâtiment, le transport ou encore l’agriculture. La pluriactivité (exercice simultané ou en alternance d’activités salariées ou non salariées sur le territoire de deux ou plusieurs Etats membres de l’Espace Economique Européen), est un phénomène qui se développe fortement. En 2017, 37% des formulaires de détachements sont émis au titre de la pluriactivité, contre 16% en 2010. 

Parlement, commission et conseil européens sont actuellement dans un trilogue au sujet des difficultés d’application des règlements européens et des fraudes en lien avec la protection sociale lors des détachements. « La jurisprudence communautaire est abondante, les contrôles n’aboutissent pas systématiquement, faute de respect d’un certain nombre de règles. Différentes modifications sont prévues pour s’assurer de la bonne application des textes et que chaque Etat prenne toutes les garanties pour que les formulaires soient délivrés à bon escient, dans des délais. Le système ne doit pas bloquer la libre circulation, pour autant, les organismes doivent coopérer » indique Philippe Sanson, directeur du CLEISS. 

 

Les discussions avancent sur la création de l’Autorité Européenne du Travail (AET)

Les modalités de création de l’AET, instance qui vise à faciliter la libre circulation et le détachement de travailleurs en Europe devraient être définies d’ici la fin de la mandature. 

Le 14 février dernier, la présidence roumaine du conseil et le Parlement européen ont conclu un accord provisoire sur le règlement instituant l’AET.  Si l’implantation de son siège sera déterminée après l’adoption de l’acte législatif (la Slovaquie, Chypre et la Lettonie ayant déjà présenté officiellement leur candidature), l’autorité devrait être opérationnelle dans les prochains mois. « L’AET, où siègeront les partenaires sociaux à titre consultatif, pourra proposer et s’impliquer dans des inspections coordonnées ou conjointes, saisir la Commission Européenne et les Etats concernés des conclusions en cas de fraude ou de dérive. Elle sera aussi un lieu de concertations en cas de perturbations du marché du travail », précise M. Sanson.  

 

Quel droit de la sécurité sociale applicable à défaut d’accord du Brexit ? 

La décision britannique de quitter l’Union Européenne suscite bien des incertitudes, notamment sur le futur de la coordination des systèmes de sécurité sociale, en vue d’assurer la continuité des droits des personnes en mobilité internationale. 

« Le 30 mars, tout ce qui était devenu une évidence, sur l’assurance santé, les droits à la retraite, ne l’est plus pour les expatriés au Royaume-Uni et les Britanniques en France », alerte Philippe Sanson. Bien sûr il y  a la période transitoire, mais les formalités, même allégées, restent substantielles. Tant dans la prise en charge des dépenses que l’accès aux soins, le système britannique s’est nourri de l’arrivée de ressortissants européens. Alors qu’il n’y aura plus de reconnaissance des diplômes et facilités de recrutement, le premier objectif du Royaume-Uni va être de continuer à faire marcher son système de santé ».  

Quasiment sept fois plus de pensionnés des régimes britanniques vivent en France par rapport au nombre de pensionnés des régimes français résidant au Royaume-Uni. 

Le gouvernement français a pris des mesures législatives nécessaires pour régler la situation des citoyens en cas de retrait sans accord du Royaume-Uni, en particulier l’ordonnance n°2019-76 du 6 février. Celle-ci fixe des règles pour l’obtention de titres de séjour des britanniques (ceux qui résident légalement sur le territoire à la date du retrait en sont dispensés pendant un an) et l’accès aux allocations chômage.  L’ordonnance prévoit également la continuité des droits aux soins de santé pour les assurés du régime britannique résidant en France, pendant deux ans après son entrée en vigueur. « Une différence de traitement sera néanmoins assurée en faveur des Britanniques résidant en France depuis plus de cinq ans », complète Aurélie Briere, directrice des affaires juridiques au CLEISS. 

La Commission Européenne  a également adopté des mesures d’urgence afin d’assurer un maintien minimum des droits dont bénéficiaient les citoyens de l’Union. L’ensemble de ces mesures sont détaillées sur le site du CLEISS. 

Justine Hugues
Publié le 26 février 2019, mis à jour le 3 décembre 2020