Cette tribune, communiquée par la députée Samantha Cazebonne est signée par plusieurs députés représentant les Français de l’étranger pour un soutien du plan de sauvegarde juste et équitable de l’Enseignement français à l'étranger. Elle est accompagnée de recommandations rédigées par le groupe de travail et transmises au ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian en prévision de son audition devant la Commission mercredi prochain en prévision du prochain CA de l’AEFE.
Alors que le gouvernement, à travers le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian et du Secrétaire d’Etat Jean-Baptiste Lemoyne, vient d’envoyer un signal fort à notre réseau scolaire français à l’étranger en lui accordant un soutien public de 150 millions d’euros, nous tenons à rappeler que, derrière cet élan de solidarité, les attentes de notre communauté scolaire sont fortes et expriment une impatience légitime de mise en œuvre au niveau international.
Parce que l’ampleur de la crise sanitaire dans le monde est inédite, la mobilisation au sein du réseau prend elle aussi une tournure sans précédent.
Parce que de nombreuses associations de parents d’élèves dans le monde appellent à la justice dans le traitement des familles de leurs établissements, toutes nationalités confondues. Ils lancent tous ce même appel car ils savent que c’est ensemble, unis, que ce réseau survivra. Les ministres ont clairement signifié cet esprit dans leur allocution, nous le soutenons et nous souhaitons avec eux le faire vivre concrètement car les parents d’élèves appellent à la transparence, l’équité, en soulignant l’urgence face à la détresse d’un grand nombre de situations.
Parce que nous craignons que d’ici fin juin un grand nombre d’enfants soient malheureusement obligés de quitter leur école, provoquant un déchirement pour eux comme pour leurs parents, et entraînant des situations tout aussi malheureuses de départ du côté des personnels enseignants recrutés localement, nous demandons une mise en œuvre rapide d’aide à la trésorerie des écoles pour éviter tant que faire ce peu ces conséquences.
Parce que nous croyons en la force de notre réseau d’influence, en son potentiel et en sa capacité à faire face à la crise de confiance qu’il rencontre, nous soutiendrons et défendrons les mesures nécessaires à sa pérennité.
Et si la nécessaire adaptation au contexte de crise et post-crise, si l’indispensable recherche d’efficience et d’efficacité de notre modèle d’éducation à l’étranger nous amènent, pour la survie du réseau, à devoir soutenir l’évolution de l’organisation des structures, alors nous devrons ensemble, avec la communauté scolaire, assumer cette évolution. Dans chaque gestion de crise il y a des changements, des impulsions nouvelles, des adaptations indispensables : l’enseignement français à l’étranger, comme tout modèle en difficulté, n’échappera pas à la règle, mais il est des changements qui peuvent devenir de réelles opportunités pour l’avenir de tous, c’est à cela que nous aspirons.
Répondre aux enjeux, aux nouveaux défis qui s’annoncent lourds à relever, demande l’engagement et la force de conviction de chacun et ceux qui ne verront en la gestion de cette situation de crise qu’une énième difficulté qui trouverait sa résolution par l’enlisement à force de saupoudrage donneraient des perspectives funestes à une dynamique que la France doit retrouver rapidement et qu’elle n’aurait jamais dû voir s’arrêter sans l’arrivée de la pandémie.
Nous adapter, nous réinventer, pour créer les conditions indispensables de la survie de notre modèle, de notre réseau scolaire français à l’étranger, voilà ce que nous soutenons et c’est pour cela que nous soutiendrons, nous parlementaires cosignataires, le plan de sauvegarde et le cahier des charges votés par le bureau de la commission des Affaires étrangères, regroupant l’ensemble des forces politiques de l’Assemblée Nationale.
Ce plan que nous soutenons répond aux exigences de transparence, d’équité, de justice, d’un esprit conforme aux valeurs de la République, dont ont profondément besoin notre réseau et ses acteurs respectueux des règles, pour que soit retrouvée une confiance en notre magnifique modèle d'éducation, vecteur d’influence française dont nous sommes nombreux à nous honorer.
Cette tribune est signée par : Samantha CAZEBONNE Députée des Français établis hors de France (5e circonscription), M’jid EL GUERRAB, Député des Français établis hors de France (9e circonscription), Anne GENETET, Députée des Français établis hors de France (11e circonscription), Meyer HABIB, Député des Français établis hors de France (8e circonscription), Amélia LAKRAFI, Députée des Français établis hors de France (10e circonscription), Frédéric PETIT, Député des Français établis hors de France (7e circonscription).
Voici les Recommandations de la Commission des affaires étrangères pour la sauvegarde des réseaux d’influence
Les réseaux de la diplomatie d’influence ont été mis à l’épreuve par la crise sanitaire, économique et sociale entraînée par la pandémie de covid-19. La réponse à apporter pour la sauvegarde des réseaux doit se faire en plusieurs temps. Une réponse d’urgence, pour répondre aux besoins budgétaires et opérationnels immédiats et limiter le risque d’hémorragie, et, sans attendre, une préparation de la sortie de crise, avec un impératif commun : la sauvegarde de réseaux qui jouent un rôle crucial dans notre diplomatie d’influence.
C’est tout le sens du cahier des charges présenté par la Commission. La mise en œuvre de ces recommandations, si elles étaient retenues, pourrait faire l’objet d’un suivi régulier de la part de la Commission dans le cadre d’un dialogue constructif avec l’interlocuteur qui serait désigné au sein du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.
1. L’aide financière apportée au réseau d’enseignement français à l’étranger doit être diffusée le plus largement possible.
Afin de tenir compte des difficultés juridiques de l’opérateur pour acheminer une aide vers les établissements partenaires et conventionnés, par opposition aux établissements en gestion directe, il conviendrait de mobiliser tous les canaux possibles de diffusion de l’aide de trésorerie qui prend la forme d’une avance de l’Agence France Trésor, à hauteur de 100 millions d’euros.
Si la piste de conventionnements ponctuels de l’AEFE pour apporter une aide à des établissements conventionnés et partenaires mérite d’être creusée, d’autres canaux doivent pouvoir, le cas échéant, être mobilisés, tels que les subventions distribuées par les postes diplomatiques, dans la mesure où le droit local le permet.
2. Les services compétents des postes diplomatiques doivent pouvoir être sollicités pour fournir une assistance juridique aux associations de droit local et aux familles non françaises, afin qu’elles puissent se saisir des possibilités offertes au plan local.
En complément du renforcement à hauteur de 50 millions de l’enveloppe destinée aux bourses scolaires attribuées aux familles d’élèves scolarisés dans le réseau d’enseignement français à l’étranger, une aide juridique locale pourrait être apportée, aux familles comme aux établissements de droit local, pour les aider à se saisir des aides déployées dans leur Etat de résidence.
3. Les redéploiements de crédits rendus possibles sur le programme budgétaire 185 Diplomatie culturelle et d’influence doivent être mobilisés pour apporter une aide d’urgence.
Dans l’immédiat, la fongibilité budgétaire sur le programme 185 doit être mise en œuvre pour redéployer des crédits non utilisés, afin d’apporter une aide d’urgence aux structures qui font face à des charges fixes malgré des pertes de ressources, telles que les Alliances Françaises dont certaines sont menacées de fermeture.
4. Pour répondre aux besoins créés par la crise, une ligne budgétaire nouvelle unique pourrait être créée dans le programme 185, au titre de l’action Sauvegarde des réseaux d’influence.
Afin d’apporter une visibilité suffisante sur le moyen terme aux acteurs de la diplomatie culturelle et d’influence une ligne budgétaire d’urgence pourrait être créée. Cette ligne serait abondée par le montant global négocié dans le cadre d’un prochain projet de loi de finances rectificative pour l’ensemble des réseaux. Les autres lignes du programme 185 resteraient inchangées.
5. Chaque poste diplomatique pourrait élaborer un plan de crise portant sur les différentes dimensions de la diplomatie d’influence.
Chaque poste diplomatique pourrait réaliser un « Plan de crise École-Culture-Francophonie », qui établit sur le terrain, pour chaque établissement homologué, pour chaque institut français, et pour chaque alliance française, le diagnostic de la situation financière (accompagné de la situation comptable 2019 et du chiffre d’affaires), matérielle (conditions et besoins pour accueillir et assurer l’enseignement à distance si incapacité d’accueillir en mai, juin ou septembre) et sanitaire (besoins matériels sanitaires, conditions d’hygiène, frais de sécurisation).
Une cellule du MEAE serait chargée en amont de la validation des plans de crise de chaque poste, du suivi des affectations, et, en aval, du contrôle et des retours d’expériences de chaque opération. Ses conclusions seraient transmises aux parlementaires intéressés.
6. Dans un second temps, chaque poste pourrait établir, sur cinq ans, des « plans post-covid-19 » dans les différents domaines de la diplomatie d’influence (éducation, francophonie, coopération scientifique et universitaire, etc.).
Les « plans post-covid-19 » pourraient être réalisés par pays ou par région, d’ici le 31 juillet 2020. Dans la mesure où de tels plans devraient tenir compte des différences d’impacts de la crise, des enjeux locaux, ils pourraient être très différents entre eux.
Ces plans, ou leur équivalent, seraient réalisés par les postes diplomatiques, en consultation avec les représentants des acteurs de terrain concernés : élus locaux, associations de parents d’élèves, conseil d’administration des structures de droit local, Alliances Françaises, représentants des différents statuts de personnel, organismes publics du pays d’accueil éventuellement concernés. Ils pourraient également être transmis aux parlementaires intéressés.
7. À moyen terme, il faudra engager une réflexion sur l’avenir des réseaux et des opérateurs de la diplomatie d’influence.
Cette crise a créé des fragilités, mais elle en a également révélées. Il sera essentiel de la transformer en opportunité pour accompagner nos réseaux sur le long terme.
Afin de préparer au mieux la sortie de crise et d’assurer la sauvegarde des outils de notre diplomatie d’influence, une réflexion pourrait être engagée, à échéance du vote de la loi de finances pour 2021, de façon concertée et en associant les parlementaires, sur la réforme des opérateurs concernés. Cette réflexion pourrait aboutir à l’élaboration d’un « contrat d’objectifs et de moyens post-covid-19 » pour chaque opérateur concerné, dont l’AEFE et l’Institut Français de Paris. Ils porteraient sur la période 2021-2023, quelle que soit l’échéance du contrat d’objectifs et de moyens interrompu par la crise, et intègreraient des indicateurs par région ou par pays, liés à la sortie de crise, tels que, pour l’AEFE, le nombre d’élèves scolarisés dans le réseau, ou les résultats aux examens nationaux.