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Jeux Olympiques 2024 : médaille d’or du bilan carbone ?

Paris accueille le monde à l’occasion des Jeux olympiques et paralympiques 2024. Un petit mois de compétitions sportives qui s'étalent sur six semaines après des années de préparation. La problématique principale : réduire le plus possible l’impact environnemental. Qu’en est-il réellement ?

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Écrit par Teddy Perez
Publié le 22 juillet 2024, mis à jour le 25 juillet 2024

 

L’ambition de Paris 2024 est de faire de ses Jeux olympiques les plus sobres de l’histoire récente. La grande majorité des épreuves prend ainsi place dans des infrastructures temporaires ou déjà existantes et seuls quelques nouveaux bâtiments ont été construits pour accueillir des compétitions. C’est l’un des atouts de la candidature parisienne qui, contrairement aux villes hôtes précédentes, ne veut pas voir ses constructions érigées à l’occasion des JO faire l’objet d’une sous-exploitation. Vingt ans après l'organisation de ses JO, Athènes en souffre encore alors que le montant de la facture finale reste un mystère. Nombreux sont ces “éléphants blancs” - des installations gigantesques laissées à l'abandon - qui trahissent une gestion chaotique de l'« après ».

Dans Paris intra-muros, l’Arena Porte de la Chapelle représente l’unique chantier d’ampleur sorti de terre pour les Jeux mais qui a été utilisée dès son ouverture en février 2024 par l’équipe de basketball de Paris. En dehors de la ville, c’est à Saint-Denis que les plus grands changements ont été opérés avec, à chaque prouesse architecturale, un objectif : penser à l’héritage de la construction et non simplement à son utilisation pendant l’événement sportif. Si bien que le Centre Aquatique situé à quelques pas du Stade de France sera partagé dès juin 2025 entre les habitants, les scolaires, les clubs et la fédération française de natation, qui y installera son centre national du plongeon. Au total, Paris 2024 devrait réutiliser 95 % des sites existants pour la quasi-totalité des épreuves. Un record !

 

centre aquatique paris 2024
Le nouveau Centre aquatique situé à deux pas du Stade de France accueillera les compétitions de plongeon, de water-polo et de natation synchronisée lors des JO.

 

Essor des énergies renouvelables, économie circulaire et responsable : des efforts olympiques

 

La comité d’organisation des JO de Paris avait initialement prévu de limiter les émissions de son événement à 1,58 tCO2e (tonne équivalent CO2), ce qui reviendrait peu ou prou à diviser de moitié les empreintes carbone des JO de Londres en 2012 (3,3 millions de tCO2e) et de Rio en 2016 (3,6 millions de tCO2e). Bien que l'impact réel ne puisse être véritablement évalué qu'à la fin des jeux, une étude réalisée par Greenly s’est concentrée sur les émissions évitées par les prises de décision en amont.

Selon l’organisme calculateur de bilan carbone, la stratégie bas-carbone déployée dans la réalisation des gros œuvres, avec l’utilisation de matériaux durables (bois d'œuvre, béton bas-carbone) a permis une réduction de 30% des émissions par rapport à des “constructions classiques équivalentes”. Et comme chantier d’exception de ces JO, le Village olympique semble être le porte-flambeau. Réparti sur trois communes (Saint-Denis, Saint-Ouen-Sur-Seine et l’Île-Saint-Denis), il accueillera 14.500 athlètes et leur staff pendant les Jeux Olympiques, et 9.000 athlètes et leur staff pendant les Jeux Paralympiques. Après la compétition, le Village olympique deviendra un quartier accueillant des logements, 3.200 mètres carrés de commerces de proximité, deux nouveaux groupes scolaires, des espaces verts et des bureaux & services qui répondront aux besoins à long terme de 6.000 habitants, prolongeant ainsi la durée de vie des lieux.

Ces différents sites clés des Jeux, tels que le Village Olympique et le Centre Aquatique, ont été conçus pour répondre à une partie de leurs besoins énergétiques grâce aux énergies renouvelables. Des panneaux solaires et un auvent en tissu photovoltaïque contribueront à la production d’électricité locale. “Il est également prévu d’installer une centrale solaire flottante sur la Seine, équipée de 720 m² de panneaux photovoltaïques” relève Greenly dans son étude, pour compléter l’approvisionnement en énergie renouvelable.

 

“Sur les 13 millions de repas servis pendant les Jeux, 50% de repas végétariens parmi l’offre totale.”

 

Si la restauration représente seulement 1 % des émissions totales des jeux, les organisateurs ont souhaité souligner l’importance de meilleures pratiques. Ainsi, sur les 13 millions de repas servis pendant les jeux, l’offre de plats végétariens sera renforcée, atteignant 50 % de l’offre proposée au total. De plus, 80 % des déchets alimentaires seront compostés.

 

 

Eco-mobilité et vols internationaux : Paris 2024 a du plomb dans l'aile

 

L’empreinte carbone la plus importante proviendra du transport des spectateurs. Il est estimé que plus de 15.000 athlètes, 9.000 journalistes et 16 millions de spectateurs, dont 1.5 million venant de l'étranger, se rendront aux jeux. Bien que les chiffres de fréquentation des JO de Paris ne soient pas encore connus, Greenly s’est basé sur les enseignements de ceux de Londres et de Rio : 471.000 voyages avaient été effectués au Royaume-Uni, à Rio ils étaient au nombre de 410.000.

Pour calculer les émissions liées au déplacement des spectateurs, Greenly a proposé plusieurs hypothèses quant aux modes de transport utilisés par les visiteurs des différents pays, en fonction de leur distance depuis Paris. Dans ces hypothèses, les spectateurs des pays voisins privilégieraient davantage le train tandis que les spectateurs en provenance des Etats-Unis, du Canada ou du Japon, se trouveraient dans l’obligation de prendre l’avion. Ainsi, selon les estimations de Greenly, les émissions liées au transport représenteraient 813 000 tCO2e, soit à peu près l’équivalent de l'empreinte carbone annuelle moyenne de 90.333 Français.

 

 

 

La Seine en émoi

 

Elle est si douce !”. Mais de quoi parle-t-on ? De la Seine pardi ! Et de la réaction de la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra une fois sa trempette dans le fleuve faite le 13 juillet dernier. Une baignade réalisée en combinaison de la tête aux pieds - au cas où la Seine ne serait pas tout à fait propre - pour montrer qu’elle était prête à accueillir les athlètes. Parler du bilan carbone des JO sans évoquer le nettoyage de la Seine serait comme faire une cérémonie d’ouverture hors d’un stade olympique : un non-sens.

Cette initiative à 1,4 milliard d’euros vise à avoir un impact positif sur la faune et la flore, et permettre la réouverture du fleuve à la baignade, interdite depuis 1923. Chaque année, plus de 360 tonnes de déchets seraient extirpées de la Seine. Pour encore mieux  gérer les eaux du fleuve, un nouveau réservoir, d’une capacité de 45.000m3, a été construit du côté de la gare d'Austerlitz. Mais malgré cette solution prometteuse, des problèmes persistent pour décontaminer la Seine selon le rapport de Greenly : 

 

“Des recherches récentes ont établi que le processus de dégradation des plastiques - notamment lorsqu'ils sont exposés à la lumière UV - pourrait se trouver à l’origine de l’émission de gaz à effet de serre puissants tels que le méthane, lesquels contribuent à l’aggravation du changement climatique. De plus, les microplastiques déversés dans les océans perturbent les capacités d'absorption du carbone par le phytoplancton, tout en affectant son métabolisme et sa reproduction. Le phytoplancton étant responsable d'environ 45 % de la production d'oxygène de la Terre, ces perturbations compromettent une régulation vitale des niveaux de dioxyde de carbone et de la production d'oxygène.”

 

la flamme olympique s'éteindra-t-elle un jour ?
La flamme olympique s'éteindra-t-elle un jour ?

 

Organiser des Jeux Olympiques : la question de la pérennité ?

 

En 2015, un traité international juridiquement contraignant sur les changements climatiques, avait été adopté par 196 Parties lors de la COP 21. Presque 10 dix années plus tard, dans la ville où il est signé, ces prochains Jeux olympiques entendent être les premiers à être compatibles avec les objectifs de l’Accord de Paris.

En dépit des volontés pour réduire l’empreinte carbone de Paris 2024, certaines émissions restent inévitables. Les organisateurs se sont d’ailleurs engagés à entièrement les compenser en soutenant des projets de compensation carbone. Malgré tout, seul l’avenir indiquera si les Jeux olympiques de Paris auront tenu leurs engagements, et si de tels événements se maintiendront au format actuel. Un format contraignant pour les nations souhaitant accueillir les JO. D’autant plus si elles n’appartiennent pas aux principales puissances mondiales : seulement trois villes des pays de l’hémisphère sud ont organisé l’événement sur leurs terres, dont deux d’Australie.

Ces freins économiques et en matière de neutralité carbone - bien qu’ils ne soient pas seuls - expliquent pourquoi de moins en moins de villes se portent candidates à l'obtention des Jeux. Seuls Paris et Los Angeles avaient maintenu leur candidature pour organiser les JO de 2024 et 2028. Alors qu’en 2004, onze candidatures avaient été étudiées et dix villes étaient en lice pour être ville hôte de l’olympiade en 2008.

Paris 2024 semble être un tournant dans l’histoire des Jeux, bousculée lors de l’édition de Tokyo par la crise sanitaire. Sans même évoquer les tensions géopolitiques, qui ont causé du tort à l’événement, les JO de l’ère moderne ne se retrouvent plus en accord avec les problématiques environnementales actuelles. Comme les plus grandes figures du monde sportif, les Olympiades devront-elles enfin faire preuve de modestie ?

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