Les élections européennes se profilent à l’horizon, et avec elles, une inquiétude persistante quant au taux d’abstention. Alors que les Français restent mauvais élèves en matière de participation électorale et d'optimisme à l’égard de l’Europe - d’après une étude du Parlement Européen - les enjeux du scrutin de 9 juin sont pourtant de taille. Entre la crise climatique, les conflits internationaux, l’agriculture et l’immigration, quels sont les défis prioritaires auxquels sont confrontés les citoyens français ?
L’abstention de retour pour les élections européennes
L’élection présidentielle de 2022 a enregistré une abstention presque record en France, avec une nette progression de 28,01 % - le record étant de 31,9 % en 1969, selon les chiffres du gouvernement. Les élections européennes ne sont malheureusement pas épargnées : en 2019, les voix de 4,48 millions d’électeurs, représentant 19,7 % des suffrages exprimés, n’ont pas été considérées, même si théoriquement elles auraient pu correspondre à 15 sièges de députés. Pour cette année, le dernier Eurobaromètre indique que 67 % des électeurs français interrogés estiment « probable » de participer au vote, tandis que ce chiffre est de 71 % pour l’ensemble de l’Union Européenne.
L’abstention, grand ennemi de la politique, se démontre comme un enjeu majeur cette année, dont le RN s’est notamment emparé : « Ne vous dispersez pas sur des listes patriotes qui ne peuvent pas gagner. Ne vous abstenez pas. S’abstenir, c’est voter Emmanuel Macron. Ne lui offrez pas ce cadeau », a mis en garde Jordan Bardella, lors de son meeting à Perpignan le 1er mai 2024.
Le gouvernement a, quant à lui, lancé une campagne d’incitation au vote pour le 9 juin prochain. Le 24 avril 2024, Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de l’Europe, dévoile son programme de communication et d’information, à la fois contre la « mal-inscription », ainsi que l’abstention. Le plan comprend ainsi un slogan simple « Allons voter », un hashtag #Europeennes2024, des chroniques radio et une large diffusion sur toutes les plateformes médiatiques de clip. Les plateformes telles que TikTok, X ou Instagram sont principalement visées, afin de toucher une large partie de la population, et notamment les plus jeunes.
Les Français les plus pessimistes quant à l’avenir de l’Europe
Fervents de l'abstentionnisme, mais aussi champions du pessimisme. Selon l’Eurobaromètre, dans 26 pays de l’UE, la majorité des personnes interrogées se montrent optimistes quant à l’avenir de l’Union européennes, avec le Danemark, l’Irlande et la Lituanie en tête des champions de la confiance. En revanche, en France, les optimistes ne représentent que 42 %, alors que les pessimistes sont majoritaires à 52 %.
Cette image négative ne se limite pas qu’à l’Europe. Alors que 65 % des répondants français estiment que « les choses vont dans la mauvaise direction dans l’UE » (contre 49% en moyenne pour les Européens), ils sont encore plus nombreux (76%) à penser que c’est le cas en France.
Une cohésion européenne de plus en plus en déclin, qu’Emmanuel Macron a d’ailleurs souligné lors de son discours à la Sorbonne, tenu le 25 avril 2024 : « Notre Europe est mortelle, elle peut mourir. », a-t-il martelé, face à une « démocratie libérale européenne de plus en plus critiquée » et « contestée ».
Réaffirmer l’importance de la démocratie
Si moins de 8 % de la population vit dans une démocratie totale, l’Europe conserve tout de même la première place, étant le continent avec le plus de démocraties. Les fondements de ce gouvernement tendent cependant à s’affaiblir dans le monde entier - mais aussi en Europe. En 2022, le rapport de l’International IDEA indiquait une détérioration en Autriche notamment, au Luxembourg, aux Pays-Bas, au Portugal ainsi qu’au Royaume-Uni.
En 2024, la moitié de la population mondiale se rendra aux urnes
La préservation de la démocratie semble être au cœur des priorités des politiques, notamment dans celles d’Emmanuel Macron : « La démocratie libérale n’est pas un acquis », a-t-il ajouté. « Il nous faut continuer de défendre ce qui est constitutif de l’État de droit, la séparation des pouvoirs, le droit des oppositions et des minorités, la justice indépendante, la presse libre, les universités autonomes et la liberté académique. ».
Un mot d’ordre pour le président de la République, mais aussi pour 29 % des citoyens français, qui estiment que l’UE devrait défendre en priorité la démocratie, d’après l'étude du Parlement Européen.
La sociologie, l’écologie et l’agriculture au coeur des préoccupations françaises
D’autres enjeux se présentent devant la scène politique française et européenne. L’Eurobaromètre a relevé les thématiques prioritaires pour les Français, qui placent la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale en première position - 42 % en France, contre 33 % en Europe.
L’immigration notamment, reste une préoccupation brûlante - sujet principal de la campagne du Rassemblement National. En 2022, la France est le troisième pays d’accueil de l’Union Européenne, après l’Espagne et l’Allemagne. La crise sanitaire et les conflits mondiaux n’ont fait qu’augmenter les demandes d’asiles. La France reste pourtant le dernier dans le classement sur ce sujet, avec 2,1 demandes d’asiles enregistrées pour 1.000 habitants en 2023.
La crise climatique intervient en seconde priorité chez les Français, à 37 % contre 21 % en Europe. De plus en plus reconnue comme une menace, elle nécessite des mesures ambitieuses qui continuent de susciter le débat, notamment en ce qui concerne l’utilisation de l’énergie nucléaire. En parallèle, une prise de conscience croissante est observée concernant l’agriculture en Europe, suite aux derniers mouvements sociaux ainsi qu’aux conséquences de la guerre en Ukraine notamment.
Enfin, la santé publique arrive en troisième place (36 % en France contre 32 % en Europe). Le résultat des conséquences de la pandémie de Covid-19, qui a su mettre en lumière les faiblesses des systèmes de santé et de protection sociale.
Lutter contre la propagande
Le 25 avril 2024, le Parlement Européen partage un communiqué demandant une réponse ferme des députés européens, au sujet « d’allégations crédibles selon lesquelles certains députés auraient été payés pour relayer la propagande russe ». La Bulgarie, la Slovaquie et plus précisément l’Allemagne sont visés par le Parlement. Le 24 avril, la presse allemande a confirmé l'ouverture d'une enquête sur Maximilian Krah, tête de liste du parti Alternative für Deutschland (AfD), concernant des soupçons de réception de fonds de la part d'agents du Kremlin, en lien notamment avec un précédent interrogatoire du FBI à ce sujet.
Espionnage pour la Chine : un assistant d'eurodéputé d'extrême droite arrêté
La veille, son assistant parlementaire a été arrêté, accusé de travailler pour les services de renseignement chinois. Dans ce contexte, le Parlement européen a demandé « que les dirigeants de l'UE et des États membres réagissent aux efforts d'ingérence de la Russie, non seulement dans les institutions de l'UE, mais dans toute l’Union. » Lors de la présentation du plan d’incitation à voter, le 24 avril 2024, Jean-Noël Barrot a aussi mis en garde les citoyens français face aux « discours trompeurs » : « Lors des six semaines qui viennent de s’écouler, on s’aperçoit que chaque semaine, la France a été la cible d’une campagne coordonnée détournant des sites du gouvernement ou propageant des nouvelles farfelues de manière à déstabiliser le débat public, ou affaiblir dans l’opinion le soutien à la résistance ukrainienne contre l’agression russe », a indiqué le ministre délégué en guise d’exemple.
Le 9 juin 2024, dans le bruissement des urnes, se dessinera un peu plus l'avenir économique, géopolitique, social et écologique de l'Europe.