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Qui sème le vent récolte la tempête … médiatique : les éoliennes en France

eoliennes sur une collineeoliennes sur une colline
Écrit par Natacha Marbot
Publié le 21 juin 2022, mis à jour le 7 juin 2023

On les aime, on les déteste, les éoliennes font désormais partie du débat médiatique et politique à chaque élection. Cristallisant nombre de paradoxes envers les énergies renouvelables et la transition écologique, les éoliennes font l’objet de beaucoup d’idées reçues.

 

Les énergies renouvelables représentent aujourd’hui en France 16% de la consommation brute finale d’énergie. La France a inscrit dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte l’objectif de porter cette part à 32 % en 2030. Parmi toutes les énergies renouvelables (éolien, solaire, bois énergie, hydraulique, biogaz, déchets, pompes à chaleur …) en France, l’éolien fournit 7,1% de l’énergie renouvelable consommée. Pourtant, les débats que le secteur éolien provoque ne prennent pas une place proportionnelle à son utilisation : ils envahissent régulièrement l’espace médiatique. Qu’en est-il réellement des éoliennes en France ? Voici une sélection des idées reçues sur les éoliennes, pour que vous vous fassiez votre avis.

La France a déjà une électricité décarbonée, pas besoin de nouvelles éoliennes

FAUX

Si la France, grâce à son parc nucléaire, a une production énergétique relativement basse en carbone, elle reste bien au dessus des recommandations des scientifiques et loin des ambitions de la neutralité carbone pour 2050. Alors que le mix énergétique français actuel émet 60 grammes de CO2 par kWh, l’énergie éolienne émet 15 grammes, selon l’ADEME. Pour comparaison, le mix énergétique en Allemagne émet 430 grammes de CO2/ par kWh, car elle dépend encore beaucoup de la filière du charbon.

 

consommation des éoliennes en C02

 

Comme nous le rappelle Romain Perriniaux, du cabinet de conseil environnemental I Care & Consult : « le parc de production d'énergie français est plutôt vieux et arrive en fin de vie, ainsi se pose la question du renouvellement des infrastructures qui est nécessaire dans les années à venir ». Il s’agit donc de centrales hydroélectriques et thermiques vieillissantes, qu’il va falloir remplacer quoi qu’il se passe, reste à savoir par quoi.

Enfin, il faut prendre en compte l’augmentation de la consommation d’énergie électrique. Dans l’idée de remplacer des énergies telles que le fuel et le gaz, à forte émission de carbone par de l’électricité … Il va falloir en produire plus !  Romain Perriniaux poursuit, « On oublie souvent que si on utilise plus d'énergie électrique alors il faut aussi en produire plus, l'électricité ne représentant qu'une toute petite partie de notre consommation d’énergie (ndlr: environ 25%). »

 

eoliennes en mer
Éoliennes au large de Oostende en Belgique 

 

Les éoliennes sont nocives pour la faune et la flore sur terre … et en mer

VRAI et FAUX

L’impact des éoliennes sur la biodiversité est très observé par les professionnels du secteur et les scientifiques, car il est réel - dans une certaine mesure. Un rapport de LPO rapporte que la manière dont sont disposées les éoliennes dans les parcs influe énormément sur l’impact sur la biodiversité, comme le montre la capture d’écran ci dessous.

 

capture d'écran du rapport de LPO sur les éoliennes

 

Quid des oiseaux et des chauves-souris ? La mort de ces animaux sur les pâles des éoliennes est certes la conséquence la plus spectaculaire, mais ce n’est pas réellement ce qui inquiète les associations de protection des animaux. Sur ce point, il existe aujourd’hui des dispositifs de radars permettant de les repousser afin qu’ils contournent l’éolienne, ou l’idée de les arrêter lors des heures de sortie des chauves-souris. L’implantation des parcs éoliens peut effectivement bouleverser l’alimentation et la nidation de certaines espèces. Cependant, « tous les projets éoliens doivent étudier l'impact sur la faune et la flore locales. Certaines contraintes peuvent être imposées en cas d'espèces protégées ». La règlementation en France est très stricte à ce sujet, et ne laisse que peu de place à l’erreur.

La phase la plus problématique pour la biodiversité est le montage, autant pour les éoliennes terrestres que offshore (sauf pour les éoliennes flottantes, domaine encore à ses débuts). « Dans tous les cas la construction d'une éolienne nécessite le passage de beaucoup de camions, l'artificialisation d'une ancienne prairie, champ ou forêt, pour une plate-forme de béton de 50 sur 100 mètres » précise Romain Perriniaux.

En ce qui concerne les éoliennes en mer, la phase la plus critique est la construction sur site, qui génère des vibrations et des ondes - qui peuvent être atténuées. Les éoliennes flottantes permettraient d’éviter cela, et l’industrie compte dessus dans un futur proche. Cela dit, une fois installée, les éoliennes marines plantées permettent à des espèces marines de s’installer sur la partie immergée, créant ainsi une forme de récif, très favorable pour la biodiversité.

La construction des éoliennes est très polluante

VRAI ET FAUX

Pour calculer l’empreinte écologique d’une éolienne, il faut faire attention à ce que l’on regarde. Le cycle entier de l’éolienne doit être pris en compte, et pas seulement sa construction - qui est effectivement le moment où elle polluera le plus. Comme l’explique Philippe Collet, journaliste à Actu-environnement, au micro de France Culture : « Au bout de 1 an, l’éolienne a remboursé sa facture énergétique puisqu'au moment de la production, elle n'émet pas ».

 

recyclage éoliennes
Infographie à retrouver ici 

 

Comme le souligne l’ADEME, seules les éoliennes offshore (et 6% des éoliennes terrestres) nécessitent l’utilisation de métaux rares. L’extraction de ces métaux est effectivement un désastre écologique et humain et la fin de son utilisation est un objectif souhaité. C’est pourquoi les fabricants d’éoliennes planchent sur le sujet afin de réussir, grâce l’innovation, à se passer à terme de ces métaux rares. Cela dit, en guise de rappel, les métaux rares sont indispensables dans la construction des smartphones, ordinateurs, matériels militaires, voitures hybrides et électriques etc. Il s’agit donc d’un enjeu bien plus grand que celui des éoliennes. Selon l’ADEME, les terres rares représentent moins de 0,001% du poids de l’éolienne.

Les éoliennes sont par ailleurs recyclables à 90%, et ont une durée de vie moyenne de 20 à 30 ans. Les 10% restant à recycler sont les pales des éoliennes, que l’on a encore du mal à valoriser, mais qui font l’objet de recherche.

 

 

Les Français détestent les éoliennes

VRAI ET FAUX

La lutte contre les éoliennes occupe un espace médiatique conséquent et a souvent été utilisée à des fins politiques, comme épouvantail des énergies renouvelables. Qu’en est-il réellement ? Pour répondre à ce point, on peut s’appuyer sur les enquêtes d’Harris Interactive, datant de 2018 et faites auprès du grand public et des publics riverains de parcs éoliens. 73% des Français indiquent avoir une bonne image de l’éolien (et même 23% une très bonne image), notamment les plus jeunes (84% auprès des 18-34 ans, 78% auprès des 35-49 ans). Cette image est par ailleurs encore meilleure auprès des riverains de parcs éoliens (80%).

Cependant, le très grand nombre de pétitions locales contre l’implantation des éoliennes vient nuancer ce plébiscite. Le collectif Vent des Maires rassemble, par exemple, 500 maires opposés à l’implantation d’éoliennes sur leurs communes. Au menu des craintes des futurs riverains : le bruit, l’esthétique et la baisse du patrimoine immobilier. Pour ces deux dernier points, assez subjectifs, pas d’études ne viennent les corroborer. En revanche pour le bruit, L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) déclare que les émissions sonores des éoliennes sont inférieures à celles du conversation à voix basse, soit moins de 35 décibels à 500m, la distance légale entre une éolienne et la limite d’une habitation.

L’éolien a été surtout choisi comme fer de lance politique contre l’écologie pour des partis tels que le Rassemblement national .. mais pas que. En témoigne la tribune de Stéphane Bern dans le Figaro en mai 2021 « Madame Pompili, les éoliennes sont une négation de l’écologie ! ».

 

Après avoir critiqué hier la tribune antinucléaire de plusieurs ONG, passons à la tribune anti-éolienne de @bernstephane qui contient de lourdes inexactitudes (pour le dire gentiment).

[1/7]https://t.co/eOZpFAQ1iq

— Maxence Cordiez (@maxcordiez) June 2, 2021

Limiter la contestation des éoliennes à de la manipulation politique par la droite radicale est toutefois un peu trompeur, lorsqu’on réalise que « 61,2% des personnes qui se sont exprimées lors de ces enquêtes publiques sont défavorables au projet développé sur leur territoire », ainsi que le décrit l’analyse qualitative de la perception et de l’acceptation sociale d’un parc éolien faite par ENCIS Environnement en 2020. Il y a donc un réel problème de communication de la part du camp « pro-éolienne ». Pour éviter la circulation de fausses informations, les entreprises d’énergies renouvelables, les ONG environnementales et le gouvernement devraient être plus pédagogiques dans l’approche de l’implantation des parcs éoliens.

La France est le seul pays à avoir autant d’éoliennes

FAUX

Dans un mix énergétique composé de toutes les sources d'énergies renouvelables il faudrait compter environ 19 000 éoliennes au total sur l’ensemble du territoire pour répondre à la demande. Sachant que la France possède déjà 8000 éoliennes sur son sol, le pays ne serait pas du tout recouvert de ces géantes à pales. Pour comparaison, l’Allemagne compte  26 000 éoliennes pour une superficie presque deux fois plus petite que la France…

 

éoliennes en allemagne
Éoliennes à Biedesheim en Allemagne 

 

La France, avec plus de 15GW de puissance installée est le 4e pays en Europe en termes de volume derrière l’Allemagne (59,3 GW, l’Espagne (23,4 GW) et le Royaume-Uni (20,9 GW). La part de l'éolien dans la production mondiale d'électricité atteint 5,9 % en 2020. Les principaux pays producteurs sont la Chine (29,6 % du total mondial en 2020), les États-Unis (21,5 %) et l'Allemagne (8,2 %).

Il y a-t-il autant de résistance aux éoliennes ailleurs dans le monde ? On connait le fameux syndrome britannique « not in my backyard » (pas dans mon jardin), qui n’est pas né dans le refus des éoliennes et trouve ses causes plus profondément dans la société, mais qui s’est vu appliqué aux projets d’éoliennes récemment. Cela correspond au fait d’être, de manière générale, favorable aux éoliennes … mais pas lorsqu’il s’agit d’en implanter autour de chez soi.

En Europe, la Plateforme européenne contre l'éolien industriel (EPAW) créée en octobre 2008 regroupe 1615 organisations de 31 pays, en majorité européens, dont 999 associations françaises.

 

Maxence Cordiez, dans Fake or not Énergies, rappelle et conclut que la seule énergie propre est celle qu’on ne produit pas, il faut donc en priorité, et en parallèle des solutions renouvelables, penser à la sobriété énergétique, en tant que modèle de société et de comportements individuels.

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