Pascal Médeville revient sur la méthode de préparation traditionnelle des « ta-paé », dessert à base de riz, coutumier en pays khmer.
Le riz glutineux est un ingrédient de choix dans de nombreux desserts d’Asie orientale. En pays khmer, les gourmands déclinent les deux variétés de ce riz, le blanc et le noir, pour en faire deux desserts, appelés « ta-paé », qui sont à consommer avec modération.
Le riz glutineux, dit encore riz « gluant », est un mutant du riz « classique » (Oriza sativa). Il est populaire dans une aire qui s’étend de la Chine du Sud (où il est connu sous le nom de 糯米[nuòmǐ]) au Cambodge (où l’on appelle le riz glutineux cuit « bay dâm-naep » បាយដំណើប), et dans toute l’Asie du Sud-Est. Ce riz est apprécié pour sa texture collante, due à sa teneur élevée en amylopectine, l’un des deux composants de l’amidon (l’autre composant, l’amylose, est absent ou presque du riz gluant).
Au Cambodge, deux variétés de riz gluant sont bien connues : le riz gluant blanc (បាយដំណើបស [bay dâm-naep sâ]) et le riz gluant noir (បាយដំណើដខ្មៅ [bay dâm-naep khmav]). Le blanc se rencontre beaucoup plus souvent que le noir.
A partir du riz glutineux blanc, on cuisine couramment des plats cuits à la vapeur, souvent enveloppés dans des feuilles de bananier ou de lotus. On consomme également le riz glutineux blanc simplement cuit avec de la viande grillée (porc, volaille).
Les riz glutineux blanc et noir servent aussi souvent à confectionner des desserts. Parmi ces desserts, on trouve au Cambodge le « ta-paé » (តាប៉ែ) ou « trâ-paé » (ត្រប៉ែ), que l’on conseille de consommer avec modération, en raison de sa teneur non négligeable en alcool.
Pour préparer ce dessert, la première étape consiste à faire cuire le riz, avec une quantité modérée d’eau. Une fois le riz refroidi, on y mélange de la levure réduite en poudre et on forme des boulettes (avec le riz glutineux noir, on peut aussi s’abstenir de façonner des boulettes). Il faut ensuite conserver le riz ainsi préparé dans un récipient fermé et maintenu pendant deux ou trois jours dans un endroit tiède (on enveloppe soigneusement le récipient dans une serviette éponge). À l’issue de deux ou trois jours de repos, le riz a fermenté et a laissé échapper du liquide qui n’est autre que de l’alcool de riz fermenté. Les boulettes de riz gluant blanc fermenté sont naturellement sucrées. Mais si l’on a un amour immodéré pour le sucre, rien n’empêche de préparer un sirop avec de l’eau et du sucre en poudre qui sera à verser sur les boulettes.
La vidéo ci-dessous, en khmer sous-titrée en anglais, explique parfaitement la méthode de préparation des boulettes de riz glutineux :
La préparation du « ta-paé » avec le riz glutineux noir est légèrement différente, mais le principe reste le même. La recette illustrée en vidéo de la préparation du « ta-paé » de riz glutineux noir est accessible dans la description de la vidéo ci-dessus. Le « ta-paé » confectionné avec le riz glutineux noir peut aussi se présenter « en vrac », c’est-à-dire sans formation de boulette. La photo ci-dessous en est l’illustration. L’habitude est de consommer le « ta-paé » de riz glutineux noir agrémenté de chair de noix de coco fraîche râpée.
Certains se soucient peu du riz, et ne consomment que l’alcool produit par fermentation du riz glutineux. Cet alcool est appelé « alcool de ta-paé » (ស្រាតាប៉ែ [sra ta-paé]). Notons que ce dessert, qui par le passé était très populaire, semble être passé de mode : il est désormais assez difficile de s’en procurer sur les marchés de Phnom Penh.
Enfin, signalons que, en raison de la texture gluante de la préparation, on appelle en khmer « personne ta-paè] (មនុស្សតាប៉ែ) une personne « collante » qui en poursuit une autre de ses assiduités de façon insistante.
Cet article a été publié précédemment sur Tela-Botanica.