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L’oranger de Malabar, arbre fruitier et espèce sacrée de l’hindouisme

L’oranger de Malabar, ou bael, est un arbre fruitier qui n’est pas très commun. Proche parent des agrumes, ce fruit a la taille et l'aspect d'une orange. On le cultive en Asie orientale pour ses fruits et ses vertus médicinales. C’est également un arbre sacré de l’hindouisme.

L'oranger de MalabarL'oranger de Malabar
Pascal Medeville Tela Botanica
Écrit par Pascal Médeville
Publié le 5 mars 2024, mis à jour le 5 mars 2024

Aegle marmelos, l’oranger de Malabad ou bael, connu en khmer sous le nom de « pnov » (ព្នៅ, parfois orthographié ភ្នៅ) et en chinois sous celui de « pommier du Bengale » (孟加拉苹果 [mèngjiālā píngguǒ]) ou encore celui d’« orange ligneuse » (木橘 [mùjú]), est la seule espèce du genre monotypique Aegle. Il est originaire des forêts de Coromandel (Inde) et a été acclimaté dans d’autres pays d’Asie orientale. On le trouve aujourd’hui dans le district de Xishuangbanna, dans la province chinoise du Yunnan, où il pousse à une altitude comprise entre 600 et 1000 mètres dans les forêts à flanc de montagne, ainsi qu’un Inde, au Myanmar, au Laos, au Vietnam, au Cambodge, en Thaïlande, en Malaisie et en Indonésie.ois orthographié ភ្នៅ) et en chinois sous celui de « pommier du Bengale » (孟加拉苹果 [mèngjiālā píngguǒ]) ou encore celui d’« orange ligneuse » (木橘 [mùjú]), est la seule espèce du genre monotypique Aegle. Il est originaire des forêts de Coromandel (Inde) et a été acclimaté dans d’autres pays d’Asie orientale. On le trouve aujourd’hui dans le district de Xishuangbanna, dans la province chinoise du Yunnan, où il pousse à une altitude comprise entre 600 et 1000 mètres dans les forêts à flanc de montagne, ainsi qu’un Inde, au Myanmar, au Laos, au Vietnam, au Cambodge, en Thaïlande, en Malaisie et en Indonésie.

C’est un arbre dont la taille peut atteindre 15 mètres. Les vieilles branches portent des épines, simples ou doubles, longues de 1 à 2 centimètres. Le fruit est une baie dont le diamètre est d’une dizaine de centimètres, protégée par un péricarpe dur, ligneux, collant, dont la pulpe est comestible. D’après la base de données que le JIRCAS (Japan International Research Center for Agricultural Sciences) consacrée aux légumes de Thaïlande, l’oranger de Malabar est parfois cultivé dans les jardins familiaux pour ses fruits. Dans le nord-est du pays, les jeunes feuilles et les inflorescences sont parfois consommées avec de la sauce aux piments.

Fruit de l’oranger de Malabar (Photographie : J.M.Garg, CC BY-SA 3.0)
Fruit de l’oranger de Malabar (Photographie : J.M.Garg, CC BY-SA 3.0)

Ses vertus médicinales

Dans la Flore de la République Populaire de Chine, ce sont les vertus médicinales de l’espèce qui sont mises en avant : la racine, l’écorce, les feuilles et les fleurs apaisent les fièvres ; le fruit, parfumé, est un produit apte à nettoyer le système digestif et à apaiser les diarrhées. (Pendant les années 1960, un pharmacien cambodgien avait mis au point un médicament à base de pulpe de bael, appelé « mixture khmère », pour soigner la dysenterie.) D’après cette même source, en Birmanie, les jeunes feuilles pilées sont utilisées comme produit cicatrisant. Le jus obtenu par broyage des feuilles est utilisé en ophtalmologie, tandis que les feuilles elles-mêmes ont des vertus contraceptives et abortives (voir ici la fiche en chinois ; la version en anglais de cette fiche se contente de dire que l’espèce a un usage médicinal).

Dans son Dictionnaire des plantes utilisées au Cambodge (p. 11), Pauline Dy Phon explique que, en pays khmer, l’oranger de Malabar est utilisé à la fois comme arbre d’ombrage et comme arbre fruitier. Les fruits coupés par leur milieu servent de pots à colle car la pulpe, sèche, possède un pouvoir adhésif puissant. L’auteure précise aussi que le bois de cette espèce est utilisé dans la fabrication de menus objets.

Mathieu Léti, dans sa Flore photographique du Cambodge (p. 492) donne les informations suivantes au sujet des vertus médicinales de l’espèce : « racine antiémétique ; fruit abortif, antidiarrhéique, diurétique, stomachique ; feuille abortive et cicatrisante ; épicarpe du fruit carminatif. »

Tranches séchées de bael (Photographie : Pascal Médeville)
Tranches séchées de bael (Photographie : Pascal Médeville)

Les fruits sont coupés en tranches qui sont mises à sécher et peuvent être conservées plusieurs mois à l’air libre. Ces tranches sont grillées à la flamme avant d’être mises à infuser dans de l’eau chaude pour produire une boisson théiforme très parfumée, dont la couleur rappelle celle de l’infusion de thé rouge, mais dont la saveur est plus douce que celle du thé. Les fruits peuvent aussi être consommés frais ; leur saveur est souvent comparée à celle de la mandarine.

Thé d’orange de Malabar (Photographie : Pascal Médeville)
Thé d’orange de Malabar (Photographie : Pascal Médeville)

La pulpe pressée des fruits mélangée à de l’eau ou du lait constitue une boisson qui aurait des vertus médicinales.

Pour l’anecdote, notons aussi qu’au Cambodge, les œufs mollets, dont le jaune a une texture assez épaisse et dont la couleur rappelle celle de la pulpe de l’orange de Malabar fraîche, sont appelés en khmer « œufs à la sève de bael » (ពង​ជ័រ​ព្នៅ [pong choa pnov]).

 

Un symbole sacré en Inde

Les usages décrits ci-dessus de l’oranger de Malabar ne doivent cependant pas occulter que cet arbre était surtout connu dans l’Inde ancienne pour son caractère sacré. Il était fréquemment planté à proximité des édifices religieux, car il était dit que Shiva élisait domicile dans ses racines ou à la base de son tronc. L’habitude de cultiver A. marmelos à proximité des sanctuaires s’est perpétuée au Cambodge, puisque l’on trouve encore aujourd’hui ces arbres sur le territoire ou dans le voisinage immédiat de temples tels qu’Angkor Vat ou le Phnom Bakeng. On a même retrouvé, dans les dépôts de fondation de quelques temples, des feuilles en métal précieux, notamment en or, façonnées de façon à avoir la forme d’une feuille de cet arbre.

 

Une coutume encore ancrée au Cambodge

Enfin, aujourd’hui encore, à l’occasion de la fête des régates qui se déroulent à Phnom Penh au moment de l’inversement du cours de la rivière Tonlé Sap, le roi n’apparaît jamais à la tribune sans avoir glissé derrière son oreille droite un rameau portant trois feuilles d’oranger de Malabar. Des arbres de cette espèce sont plantés dans l’enceinte du Palais Royal, et les bakous (descendants des anciens brahmanes) qui officient au palais royal sélectionnent les plus belles feuilles pour le roi. Les trois feuilles symbolisent la trimūrti, trinité hindouiste constituée des trois dieux Brahmā, Vishnu et Shiva. Cette pratique est une réminiscence de l’hindouisme, qui était la religion prépondérante de l’empire khmer avant d’être supplanté par le bouddhisme. Ci-dessous, une photo de Sa Majesté Norodom Sihamouni, actuel Roi du Cambodge, portant des feuilles de bael derrière l’oreille droite :

S.M. Norodom Sihamouni, Roi du Cambodge, lors de la fête des eaux en 2018 (Photographie : site d’information cambodgien Knongsrok)
S.M. Norodom Sihamouni, Roi du Cambodge, lors de la fête des eaux en 2018 (Photographie : site d’information cambodgien Knongsrok)

Article préalablement publié sur tela botanica

 

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