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Le let it Be de Nalen : « j’ai créé cet endroit pour inspirer les gens à Phnom Penh »

Cookie Dingler disait qu’être une femme libérée n’était pas si facile. C’est pourtant le choix de Nalen (de son nom complet Channalen). Sur des airs d’Alain Bashung, elle arrange son comptoir. Ses mouvements sont naturels, pareils aux va-et-vient de l’archet d’un violoncelliste. Ils reflètent son calme tempérament. Parfaitement francophone, autrice et interprète dans un groupe de rock, elle vient d'ouvrir un café restaurant (rue 184) qui lui ressemble : simple, calme, ouvert, accueillant et inspirant.

Le let it Be de Nalen : « j’ai créé cet endroit pour inspirer les gens à Phnom Penh »  Le let it Be de Nalen : « j’ai créé cet endroit pour inspirer les gens à Phnom Penh »
Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 31 juillet 2024, mis à jour le 15 septembre 2024

Le ventilateur fait tourner des odeurs familières dans la petite salle aux murs couleur brique. La senteur du bois des meubles s’entremêle à celle des vieux livres, souvenirs de bouquinistes ou de bibliothèques de grand-mères. C’est vintage, cozy et confortable. 

« Bonjour, bienvenue! » dit-elle souriante. La cambodgienne s’installe, et revient sur les hauts et des bas de sa vie, sa partition, et son chemin pour être aujourd’hui femme libre au Cambodge. 

Un café-musique francophone

C’est indiqué sur la porte d’entrée : Nous parlons français. Nalen le parle couramment, parfaitement, elle l’écoute et elle le chante. « Maman ne parlait que quelques mots qu’elle a appris à l’école, sous le protectorat. En ce qui me concerne, c’est un peu par hasard, c’est la vie », évoque-t-elle d’un ton nostalgique. C’est sa tante, chez qui elle vit dès l’âge de 11 ans, qui l’a inscrite à l’Alliance française. Sa nostalgie se transforme en tristesse. Elle explique en un coup de vent qu’elle a quitté sa famille prématurément et ne revient plus du tout sur le sujet. 

Une jeunesse bercée par la francophonie, qui va modeler sa carrière. De facto, elle va étudier les langues étrangères à l’Université de Phnom Penh et travailler en tant que traductrice, interprète et professeur.

Let It Be : le nouveau départ

Ouvrir un café a été « un déclic dans la vie » pour la quadragénaire. « J’en ai eu assez, j’ai voulu changer.  Je me suis dit j’aime le café, j’aime la musique et je veux veux être indépendante», ajoute-t-elle. « Cet endroit, je l’ai créé dans le but d’inspirer les gens, pour qu’ils s’inspirent ou inspirent les autres. » Altruisme et philanthropie, clé de sol du Let It Be. Mais pas que. C’est aussi sa gamme préférée. Son regard s’illumine. 

« J’ai rencontré des personnes qui sont devenus mes amis, des clients qui sont venus discuter, qui m’ont raconté leur parcours, leurs problèmes ou qui sont venus parler des sujets du monde. »

« Let It Be c’est trois syllabes, simples, faciles à retenir. » Elle choisit le nom sans penser à la chanson des Beatles. « Mais ça colle bien, c’est un hasard qui fait bien les choses », dit-elle. Elle reprend l’explication du nom de son établissement, sa voix change de tempo, elle passe de moderato à allegro. « Quand c’est « Let it be » c’est pas trop sérieux. A force de tout prendre au sérieux, nous nous étouffons. Pourquoi ne sommes-nous pas « Let it be »? Ça respire, c’est ça la vie. Des fois il faut prendre les choses qui arrivent sans se casser la tête, faire confiance à ce qu’il se passe autour. Donc Let it be .» 

café musique let it be

 

La femme, l’artiste

Sur son bras gauche, un tatouage. Deux lignes parallèles. « Ca nous concerne tous », elle explique : « ce sont des marques de temps et pour moi le temps c’est important. On n’a qu’une vie. Moi, je vois le temps qui passe quand je le regarde et ça m’encourage à vivre pleinement. » 

Carpe Diem, oui, mais en musique. 

Adolescente, elle tente de prendre des cours de musique, mais se heurte au harcèlement de ses condisciples . « Il n’y avait que des garçons dans l’école de musique du Wat Phnom où j’ai commencé les cours. J’étais découragée. Étant la seule fille, tout le monde me demandait ce que je faisais là, et me disait je devais apprendre à cuisiner à la place d’apprendre à jouer de la guitare. Ça m'a vraiment blessé.» Une plaie qui n’a pas encore l’air d’avoir guéri aujourd’hui. Elle qui semblait si à l’aise quand elle parlait de musique, ne peut s’empêcher de frotter ses mains l’une contre l’autre. 

Le phœnix renaît de ses cendres

Malgré cette déception, elle se relève et intègre un groupe de rock en tant que bassiste, et y compose des chansons en khmer et en français. « J’ai réellement commencé la musique en 2005 avec un ami, quand j’étais étudiante», dit-elle. La musique coule dans ses veines. Après avoir passé plusieurs années en Thaïlande , elle décide de reprendre la guitare et le chant à son retour au Cambodge. « J’ai rencontré mon batteur par hasard ici en 2023 et nous avons depuis formé un groupe. Nous jouons des chansons originales et nous nous produisons en concert. » 

Elle tire l’inspiration de ses chansons de la vie de tous les jours, et écrit sur des thèmes comme le sport, les chagrins d’amour, la tristesse, l’étouffement... Elle organise aussi des bœufs, certaines soirées quand l’ambiance est à son pic. « Je bouge tous les meubles de la pièce, laisse un espace pour le groupe, un autre pour le buffet », ajoute-t-elle. 

L’entretien prend fin, Nalen se lève et remet la musique. Maintenant, place au jazz. 

N’hésitez pas à passer au Let It Be, Nalen vous y accueillera avec simplicité et bonne humeur.

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