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Léopold Prudon à l'Alliance Française de Siem Reap

L’Alliance Française de Siem Reap accueille Léopold Prudon, nouveau lauréat du programme La Route des Résidences Thaïlande - Cambodge, mené par l’Institut français du Cambodge et l'Alliance Française de Chiang Mai, pour la présentation de son roman graphique "Shanghai Chagrin", le mardi 6 août à 18h.

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photo fournie
Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 3 août 2024

Le Petit Journal : Bonjour Léopold, pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?

Léopold Prudon : Oui je suis Léopold Prudon, 31 ans, français et je vis en Normandie. J’ai grandi à Paris où j’ai fait mes études à l’école Estienne, spécialisée dans les métiers du livre, c’est-à-dire gravure, typographie, reliure, et moi j’étais en illustration. Puis, j’ai rejoint les arts décoratifs de Strasbourg avec un groupe de potes avec qui on a fondé un fanzine. Cette expérience m’a permis d’apprendre à réfléchir à l’objet livre et aussi à expérimenter pas mal en bande dessinée, en travaillant sur la forme et en essayant de ne pas reproduire des formes préexistantes.

J’ai publié un premier livre que j’avais réalisé dans le cadre de mon projet d’étudiant, ma première bande dessinée qui s'appelait “De l’autre côté”.

Après mes études à Strasbourg je suis parti une année en Chine à l’école Offshore, une toute petite école en lien avec les Beaux Arts de Nancy. J'ai passé une année là-bas et j’ai utilisé cette année pour réaliser ma deuxième bande dessinée, “Shanghai Chagrin”, publiée chez la maison d’édition L’Association.

Depuis mon retour en France, il y a 5 ans, je travaille sur ma troisième bande dessinée, encore chez un autre éditeur, Aliocha disparue.

 

LPJ : Pourquoi êtes-vous au Cambodge ?

LP : J’ai postulé à un appel à résidence dans cette région du monde. Tout de suite, j’ai été extrêmement intéressé parce que c’est une région qui m’a toujours intéressé et que j’ai toujours un peu entrevu de l’autre côté de la frontière quand j’ai passé cette année en Chine.

J’ai beaucoup voyagé dans le sud de la Chine et notamment dans le Yunan, le Sichuan, et j’étais à la frontière du Viêtnam dans une petite ville qui s’appelait Nening et c’était vraiment les endroits qui m’intéressaient le plus en Chine. Cette ambiance de scooters, de végétation tropicale, l’atmosphère dans les rues, les villes qui se réveillent à la tombée du jour après des journées beaucoup trop chaudes. J’avais vraiment envie de retrouver et d’approfondir ce sentiment-là.

Il y avait aussi le cinéma d’Asie du sud-est, que je ne connais pas très bien mais que j’admire. Et puis, j’avais également envie d’explorer le côté fascination pour les fantômes, pour les créatures, les croyances qui existent dans cette région du monde, qui va vraiment au-delà de la rationalité occidentale.

 

LPJ : Pouvez-vous nous parler de la résidence au Cambodge dans laquelle vous êtes actuellement ?

LP : Oui, c’est une résidence qui s’appelle La Route des Résidences, organisé par l’Institut Français du Cambodge à Phnom Penh, en collaboration avec l’Alliance Française de Chiang Mai et qui bénéficie de l’appui de la Fabrique des Résidences, de l’Institut Français, et du fond de dotation La Petite Escalère. C’est vraiment une résidence artistique, plutôt orientée écriture, mais cette fois-ci, ils ont pris un auteur de BD, à mon plus grand contentement.

Une des raisons pour laquelle j’ai postulé à cette résidence, c’est qu’il y avait une coïncidence entre le projet que j’étais en train de mener et la possibilité de partir dans cette région du monde. Car, j’étais en train de travailler sur un projet de science-fiction portant sur l’histoire d’une âme. L’histoire au début, ce sont deux soldats dans un monde apocalyptique, ils sont à l’orée d’une forêt tropicale, pour moi c’était vraiment dans un pays d’Asie du sud-est.

On ne voit même pas leurs visages, ils sont dans des tenues très étranges et ce sont deux amants. Ils partent au combat tous les deux et l’un d’entre eux se fait tuer à l’orée de la forêt. Et là, il y a une sorte de substance noire, gluante qui sort de son corps et qui se perd dans la forêt. C’est l’âme du soldat qui cherche un corps. Donc cette âme entre en négociation avec les esprits de la forêt, les animaux, pour qu’ils acceptent de la laisser pénétrer à l’intérieur de leurs corps.

Et donc il y avait un truc qui pour moi fonctionnait vraiment bien avec le côté syncrétisme religieux qu’il y a ici entre le bouddhisme et cette question de la régénération de l’âme, l'animisme et les significations qui sont associées à tous les animaux. Très vite j’ai vu que je pouvais utiliser un certain nombre de ces significations-là, les serpents qui gardent les points d’eaux, le côté sacré des grottes, le sens de la forêt, lieu qui fait peur, un lieu de magie en dehors de la civilisation, le lieu de la mort aussi. La signification liée aux buffles ou aux vaches … Juste utiliser ces choses que je peux comprendre ici ou là, l’esthétique ou même simplement la beauté des forêts, des cascades, des grottes, la beauté visuelle, m’en inspirer et les mettre dans cette bande dessinée là sans que ce soit trop explicite.

 

LPJ : De quoi parle “Shanghai Chagrin” ?

LP : “Shanghai Chagrin a été mon premier vrai voyage, ce qui m’a donné le goût du voyage lors de cette année passée en Chine. L'idée était de faire un livre qui était improvisé, même dans le dessin, que ce soit un livre qui était un carnet de voyage, il a été entièrement dessiné dans la rue, je dessinais des structures de cases dans un carnet rigide A4.  Et après dans ces structures je pouvais faire entrer ce que je voyais dans la rue, presque sous forme photographique et essayer d’agencer ces espaces entre eux pour avoir une promenade géographique à travers le livre. Mais il se trouve que, dans le même temps, c’est l’année du décès de mon père et donc, en fait, c’est devenu le sujet de mon livre comme je n’en avais pas trop à la base, c’est devenu un peu le récit d’une errance, de deuil, c’est aussi l'errance du voyage, ou les deux sont un peu devenu la même chose.

Quand on voyage comme ça, on a un point de vue hyper subjectif, on se raconte des histoires. Un voyage c’est comme un livre, on se fait des films en permanence et c’est dur un peu de revenir à la signification objective. C’est à la fois intéressant d’avoir cette connaissance des choses mais quand on en connaît trop ça devient le quotidien et c’est moins fascinant.

 

LPJ : C’est dans quel cadre de votre résidence que vous bénéficiez d’un séjour à Siem Reap ?

LP : Il y deux versants dans cette résidence, la première moitié était en Thaïlande, et la deuxième moitié est au Cambodge. Et dès le début, au Cambodge, on m’a dit que je pouvais être logé à moitié à Phnom Penh et à moitié à Siem Reap et tout de suite cette possibilité m’a intéressé notamment parce que je voulais travailler autour des jungles et de Siem Reap. Pour moi n’y connaissant pas grand-chose, c’est vraiment associé aux temples dans la jungle. L’image que j’avais d’Angkor c’étaient des temples au milieu de la jungle et donc cette espèce de mélange dans les créations humaines et la nature, la force de la nature en elle-même. Je suis aussi fasciné par les effets du temps sur les architectures, sur tout ce qui est humain et artificiel et comment plusieurs temps cohabitent dans un même espace à travers les gens qui ont habité là, les traces, les vestiges. Donc j’avais très envie de venir, de passer du temps dans les temples d’Angkor, de les dessiner, de les fréquenter quotidiennement.  

 

LPJ: Et dans le cadre de votre séjour à Siem Reap, vous vous arrêtez à l’Alliance Française. Qu’allez-vous y faire ?

LP : Avec l’Alliance, nous organisons deux événements. Le premier aura lieu le mardi 6 août, et il s’agit d’une présentation de ma deuxième BD, “Shanghai Chagrin”. J’y parlerai des circonstances particulières de mon voyage en Chine, de mes impressions de Shanghai, de ma méthodologie de travail, des challenges que j’ai dû surmonter en tant qu’artiste. Pour illustrer cette présentation, je montrerai des extraits du livre ainsi que d’autres œuvres qui ont influencé mon travail.

Le second événement est un atelier de dessin, prévu pour le samedi 10 août. Durant cet atelier, je vais expliquer ma démarche artistique pour imaginer et dessiner un personnage qui reflète sa propre personnalité. Les participants seront invités à créer un personnage et à le faire vivre dans une situation inventée. À la fin de l'atelier, chacun repartira avec sa propre création originale, un souvenir unique de cette expérience artistique.

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