Khnang Phsar, une randonnée dans un paradis tropical

Popularisé par les réseaux sociaux et par de jeunes aventuriers au cours des dernières années, Khnang Phsar est devenu un lieu de prédilection pour les personnes qui souhaitent échapper à l'agitation de la vie urbaine. Situé à environ 160 kilomètres de Phnom Penh, le terrain accidenté et l'isolement de Khnang Phsar en font un lieu idéal pour les aventuriers qui souhaitent randonner pendant plusieurs jours presque sans connexion internet ni service de téléphonie mobile.

 

En partant de Phnom Penh tôt, les voyageurs mettent environ une heure à atteindre leur destination en empruntant la route nationale 4, ou moins de 30 minutes s'ils utilisent la voie rapide Phnom Penh-Sihanoukville, avant de tourner sur la route nationale 44 qui traverse la ville de Kampong Speu.

 

L’activité touristique : un atout pour la population locale

En approchant Khnang Phsar, la route nationale traverse des villages isolés et le paysage devient de plus en plus montagneux. De temps à autre, on aperçoit de petites maisons en bois et en béton, ainsi que des terres agricoles et des prairies. Plus on s'éloigne de la ville, plus les routes deviennent cahoteuses et glissantes, en particulier pendant la saison des pluies. Des troupeaux traversent fréquemment la route, menés par les paysans.

 

 

 

Un petit déjeuner cambodgien pour prendre des forces 

Avant d'entamer leur randonnée, les voyageurs se rendent généralement dans la commune de Khnang Phsar, au pied de la montagne, pour petit-déjeuner.

 

Des villageois préparent la nourriture des randonneurs. Comme l'explique Vorn Sot, l'une d’entre eux, il est important d’être flexible: “Parfois, les voyageurs nous demandent de leur préparer le plat de leur choix, d'autres fois, ils nous laissent simplement leur présenter ce qui est intéressant dans notre village".

"Le riz au porc typique avec des œufs frits enveloppés dans des feuilles de bananier coûte environ 5 000 riels (1,25 dollar)", explique Mme Sot. "Pour la soupe, cela dépend du prix des ingrédients que j'achète au marché. En général, une marmite de soupe de poulet coûte environ 40 000 riels (10 dollars).” explique-t-elle.

 

 

Auparavant, Vorn Sot vendait ses produits aux villageois mais son service de restauration pour les randonneurs lui a véritablement permis de subvenir aux besoins de sa famille. "C'était plus difficile pour moi dans le passé", dit-elle. "J'étais ouvrière dans une usine de vêtements et agricultrice saisonnière. Mais aujourd'hui, avec l'augmentation du nombre de touristes, c'est plus facile pour moi et mon mari, qui conduit un motoculteur pour les voyageurs. Il arrive à faire quatre ou cinq voyages par mois à 30 dollars l'unité".

 

Des véhicules tout-terrain pour aider les touristes 

A partir de la commune, la route ne peut plus être empruntée que par des véhicules tout-terrain spécifiques, tels que des motoculteurs se déplaçant à vitesses réduites, dotés de pneus adaptés et dont les conducteurs sont familiers de la route. 

 

 

Un certain nombre d'hommes du village conduisent ces motoculteurs pour les touristes. Équipés d'une plate-forme en bois et d'une suspension rigide, ils offrent peu de confort, bien qu'ils soient pratiques et abordables. Pouvant accueillir une dizaine de passagers et leurs bagages, le service, qui est facultatif, permet de franchir facilement les 10 kilomètres entre la commune et le point de départ de la randonnée au sommet de la montagne.

 

Seng Soeun, chauffeur de motoculteurs, demande 30 dollars pour le trajet. Selon lui, la conduite de ce véhicule est parfois délicate, car il est puissant et peut déséquilibrer le conducteur. Il doit diriger son engin le long d'un chemin de montagne sinueux, parsemé de nids-de-poule et de blocs rocheux. Toute son attention doit être concentrée sur cette tâche. 

 

Atteindre le camping peut prendre plusieurs heures. En raison de l'absence de services de restauration, les conserves, les boissons énergétiques, les nouilles et le café instantanés, vendus par la population locale, sont des articles très prisés par les touristes. 

 

La plupart des randonneurs portent leurs affaires sur le dos, mais la population locale propose également un service de transport à pied et sur de petites motos semi-automatiques de 110 cm3.

 

 

Service de porteur 

Contrairement aux touristes qui portent des équipements et tenues spécialisés, les habitants de la région, comme Chey Chin, sont vêtus simplement : un tee-shirt ordinaire, un short et une paire de tongs. Comme il l'explique, il a l'habitude de gravir la montagne chargé des bagages des randonneurs, puisqu'il propose ce service depuis trois ans. "Mes services coûtent 80 000 riels par jour (environ 20 dollars). Cependant, si les touristes veulent que je reste sur place toute la nuit, je dois facturer le double, techniquement, deux jours. Par mois, je peux avoir deux voyages".

 

À la question de savoir si ce travail est physiquement éprouvant, il répond par l'affirmative. "Mais avec le temps, cela devient normal. Il faut porter les sacs aussi serré que possible tout en répartissant le poids autour du corps. Comme c'est mon travail, je porte normalement environ 15 kg.”

 

“Un petit complexe touristique au milieu d’un monde vert”

Conserver de l'eau potable peut s'avérer délicat, car les réserves sont limitées en raison de difficultés logistiques. Les randonneurs sont invités à boire le moins possible tout en veillant à ne pas se déshydrater tout au long du voyage.

 

À mesure que l'altitude augmente, la brise se rafraîchit et des fougères sont visibles çà et là. Après avoir traversé des zones arborées et de hautes herbes, le paysage s'ouvre soudain sur un immense champ luxuriant entourant le sommet de la montagne.

 

Les tentes, pour une ou deux personnes, sont préinstallées en rangées par les membres de la communauté et équipées de lampes électriques alimentées par des batteries portables ou de véhicules : un petit complexe touristique au milieu d'un monde vert.

 

Hun Many, député de la province de Kampong Speu et ministre de la fonction publique a décrit Khnang Phsar comme un endroit idéal pour se défier en plein air et ce, à une distance relativement courte de Phnom Penh.

 

“Cette région montagneuse de Khnang Phsar est un site qui peut intéresser les Cambodgiens, les étrangers vivant dans le pays ainsi que les touristes”, a-t-il déclaré, ajoutant qu'il espérait voir davantage de visiteurs se rendre dans la montagne.

 

 

Quant aux éventuels projets d’amélioration de la route provinciale reliant la route nationale 4 à la région de Khnang Phsar, Hun Many annonce : "Il y aura des améliorations, mais cela prendra un certain temps. Néanmoins, le développement s'arrêtera à un moment donné, par exemple au pied de la montagne, de sorte que les aventuriers puissent encore faire face à des défis lorsqu'ils grimpent jusqu'au site de camping."

 

Une baisse du braconnage 

Parmi les personnes assises dans la légère bruine près du feu de camp, en attendant l'arrivée de la soupe de poulet chaude à l'heure du dîner, se trouve Keiy Sochetra, un garde forestier qui travaille dans la région de Khnang Phsar depuis 2017.

 

Très attaché à la faune et à la flore, Keiy Sochetra se réjouit de la diminution du braconnage, due en partie selon lui à l'augmentation du nombre de touristes. "Au cours de mes patrouilles dans cette région, j'ai repéré de nombreux grands animaux tels que des gaurs, des bantengs et des cerfs", a-t-il déclaré. "Il n'est pas facile de les rencontrer. La plupart du temps, je ne peux voir que des traces de leur présence, comme leurs empreintes.”

 

 

"Durant nos patrouilles dans la jungle, lorsque nous trouvons des pièges, nous les détruisons. Nous patrouillons principalement le jour et parfois la nuit, en fonction des appels de service. Traverser la jungle à pied est plus efficace pour s'approcher des animaux, car les transports bruyants tels que les motos peuvent les effrayer."

 

"D'après ce que je peux voir, lorsque davantage de touristes viennent ici, cela crée des emplois pour les habitants. Ainsi, le braconnage et la déforestation diminuent."

 

Des commodités aménagées pour les randonneurs 

Alors que le soleil se couche derrière la colline et que le vent commence à se lever, des feux de camp sont progressivement allumés par les voyageurs à proximité de leurs tentes. Les randonneurs boivent des bières ou du café tout en discutant jusqu'au bout de la nuit. Certains s'allongent sur l'herbe, contemplant les constellations, leur rêverie accompagnée des mélodies des instruments de musique, du chant des insectes et du craquement des branches des arbres.

 

 

Chea Yuthea, vice-président du bureau du parc national de Phnom Kravanh nous explique que ce complexe touristique est en place depuis plusieurs années. "Construit à la fin de l'année 2021, le complexe dispose de 10 toilettes et salles de douche. L'eau est pompée dans un ruisseau en contrebas et stockée dans d'immenses réservoirs en hauteur. Notre objectif est d'améliorer l'hygiène de notre camping et d'offrir plus de confort à nos campeurs, en particulier aux femmes.”

 

“Cependant, ce complexe n’est pas encore suffisant. Pendant la haute saison, jusqu'à 1 000 campeurs viennent ici chaque semaine. Nous devrons encore construire d'autres blocs sanitaires à l'avenir.”

 

Aujourd'hui, les toilettes sont accessibles gratuitement. Le bureau du parc national a-t-il l'intention de faire payer un jour une somme aux visiteurs pour couvrir le coût des améliorations apportées aux installations ? "Cela n'a pas encore été décidé", répond M. Yuthea. "Actuellement, les campeurs peuvent participer à l’entretien du complexe en faisant des dons. À l'avenir, le centre pourrait demander aux campeurs de déposer 1 000 riels (0,25 $) par utilisation des sanitaires par exemple. Il dépend des efforts des campeurs pour garder ce lieu propre pour les autres visiteurs".

 

Vers minuit, alors que les voyageurs ont finalement épuisé leurs forces, le calme règne sur le campement.

 

Un véritable défi sportif 

Une longue nuit de sommeil n'est pas toujours possible car les visiteurs doivent se lever tôt pour commencer leur journée de randonnée en direction d’un autre sommet. Il faut environ une heure de marche à travers les cols de montagne plongés dans l'obscurité, sur un terrain très accidenté, des pentes raides et un enchevêtrement de branches d'arbres pour l’atteindre. La brume et les nuages réduisant la visibilité, de petites torches électriques permettent d'éclairer le chemin. Marchant en ligne, les voyageurs à l'avant avertissent de temps à autre ceux à l'arrière des obstacles à venir, tels que des rochers, des pierres ou des zones glissantes. Les voyageurs arrivent juste avant le lever du soleil afin de pouvoir l'observer au loin sur l'horizon.

 

 

Parmi eux, Khon Leang Eng, une jeune alpiniste et vlogueuse qui a traversé la région de Khnang Phsar 30 fois au cours des quatre dernières années. "Mon premier voyage a été un peu difficile car je n'étais pas assez entraînée physiquement", a-t-elle expliqué. "Au cours des voyages suivants, je me suis lancée différents défis, tels que le voyage en solitaire, le voyage de nuit, la durée de l'ascension fixée à deux heures seulement ou le fait d'apporter mon vélo au camping. Le paysage de Khnang Phsar est toujours magnifique avec ses prairies dorées pendant la saison sèche, et son paysage verdoyant et son air très humide pendant la saison des pluies."

 

Au sommet, la température baisse et le vent se lève. Un océan de nuages se déplace à toute vitesse dans le ciel. Certains voyageurs apportent leur propre petit réchaud à gaz portable pour faire bouillir de l'eau pour leurs nouilles instantanées et leur café pendant qu'ils admirent le paysage. Au fur et à mesure que le ciel s'éclaircit, de plus en plus de groupes arrivent. Sans oublier les chiens des villageois qui montent de temps en temps au sommet.

 

Heng Sreylin, Ky Chamna, Sem Vanna et Zul Rorvy 

Avec l'aimable autorisation de Cambodianess, qui a permis de traduire cet article et ainsi de le rendre accessible au lectorat francophone.