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Muriel Augry-Merlino : la passion pour la littérature à Iasi

Muriel AUGRY-MERLINO Muriel AUGRY-MERLINO
Écrit par Grégory Rateau
Publié le 16 novembre 2020, mis à jour le 18 novembre 2020

Aujourd'hui, notre rédaction est allée à la rencontre de Muriel AUGRY-MERLINO, actuelle directrice de l'Institut français de Iasi mais aussi poétesse, essayiste et nouvelliste. Docteur ès lettres de l’Université de Paris Sorbonne, elle a enseigné à l’Université de Turin, puis exercé différentes fonctions dans la diplomatie culturelle en Italie (Palerme) ainsi qu'au Maroc (Rabat). Elle nous parle à présent des nouveaux enjeux pour la culture en Roumanie dans ce contexte difficile...

 

Grégory RATEAU: Vous dirigez l'Institut français de Iasi depuis une an maintenant et vous êtes également poétesse. Comment arrivez-vous à consigner vos deux activités ?

Muriel AUGRY-MERLINO: Elles sont totalement dissociées. Il s’agit juste d’une organisation des journées. C’est une simple question d’équilibre. Ce qui me fait sourire, c’est cette défiance à l’égard de la poésie, comme si ce genre était synonyme de douce rêverie, de total détachement face à la réalité. Mais vous savez que le Prix Nobel de littérature a été accordé à une poétesse américaine qui est aussi professeure d’université et que, dans le passé, de nombreux diplomates ont été aussi d’éminents poètes : citons Victor Hugo, Chateaubriand, Lamartine, Saint John Perse, Claudel…Pour moi, modestement, il s’agit d’une passion que je cultive depuis plus de vingt ans et qui est parfaitement compatible avec mes fonctions. J‘ai aussi écrit des recueils de nouvelles. J’aime beaucoup les formes brèves.

 

Quelle place occupe la poésie de nos jours ?

J’ai cité Louise Gluck. C’est un signe pour moi, une nouvelle attention à ce genre jugé mineur par certains et qui n‘attire pas les grandes ventes, comme le roman. Mais il y a des éditeurs courageux qui décident de se lancer dans l’aventure. Et pour parler de la Roumanie, je dois reconnaitre l’effervescence autour de la poésie avec l’organisation de nombreux festivals, de rencontres culturelles et surtout de traduction de la poésie. Puisque je vis à Iasi, je citerai le FILIT qui m’avait impressionnée par la présence de très nombreux jeunes lors de la Nuit de la poésie.

 

Votre activité artistique a-t-elle été un moteur pour vous décider à promouvoir la culture d’une autre manière ?

Promouvoir la culture d’une autre manière serait peut-être un peu ambitieux, voire présomptueux, disons que mon goût pour la peinture, la musique, les lettres a bien sûr orienté ma façon de transmettre la culture. Il y a pour moi une notion clé, c’est celle de partage. Et un public prioritaire : les jeunes. Les « promoteurs de la culture » au sens large du terme ont, selon moi, une responsabilité, celle de les aider à développer l’esprit critique. Mais il faut pour cela leur donner des bases solides. C ‘est l’essentiel.

 

Vous avez beaucoup voyagé dans le cadre de vos fonctions. Aviez-vous des a priori avant de venir en Roumanie ? Quelles furent vos premières impressions de la ville de Iasi?

J’ai beaucoup voyagé et je le considère comme une chance. Non, je n’ai eu aucun a priori. J ‘étais au contraire très heureuse de découvrir un pays que je ne connaissais pas, si ce n’est au cours d’un bref voyage touristique en Bucovine, lorsque j’étais adolescente…En revanche j’ai rencontré des réactions de perplexité de la part de connaissances, preuve que la Roumanie est mal connue. Quant à Iasi, la ville m’a tout de suite plu. Une agglomération à taille humaine, avec une grande population estudiantine et justement une ville où le mot de « Culture » résonne encore. Une ville à la riche histoire patrimoniale, mais aussi tournée vers l’avenir.

 

Comment l’Institut de Iasi s’est-il adapté à cette crise sanitaire pour continuer ses activités ? De futurs rendez-vous à annoncer à nos lecteurs ?

L’Institut français de Iasi est l’une des antennes de l’Institut français de Roumanie et nous travaillons selon des orientations nationales. La quasi-totalité de nos activités est désormais en ligne, qu’il s’agisse des cours de langue ou des manifestations culturelles. Cela aussi nous invite à faire preuve de créativité et c'est le côté positif ! Nous avons pour objectif prioritaire de maintenir le lien avec notre public. Pour ce mois-ci, nous avons un événement national « le novembre numérique » que nous déclinons localement. A Iasi, nous aurons une exposition de jeux vidéos et de BD numériques, et de nombreux ateliers de BD, de contes en réalité augmentée et des ateliers de films documentaires.

 

Pensez-vous que le secteur culturel va se remettre de cette crise sanitaire sans précédent ?

Le secteur culturel est profondément touché, puisque la plupart des activités face au public est à l’arrêt et que bon nombre d’artistes se retrouvent ainsi privés de ressources. Le secteur du livre est aussi fortement pénalisé. Il faudra de nombreux mois pour que l’économie se relève. Les activités en ligne, que chacun de nous invente dans le domaine culturel, permettent certes de continuer à exister, mais elles ne remplacent pas le présentiel. Le numérique est incontestablement l’avenir et la période pandémique nous aura appris des leçons, mais espérons que revienne une période plus sereine où la culture puisse se ressourcer dans des échanges et où l’émotion passe aussi par les cinq sens !

 

 

Au sujet de l'auteure :
Muriel AUGRY- MERLINO a reçu en 1990, le « Prix Roland de Jouvenel de l’Académie française », pour son essai Le cosmopolitisme dans les textes courts de Stendhal et Mérimée. (ed. Slatkine). Elle est l’auteure d’un recueil de nouvelles Rien ne va plus  (Ed.l’Harmattan, 2010) et  de cinq recueils de poésie : Les lendemains turquoises (Ed. Marsam, Rabat, 2010), Les Ecailles du Soir (Ed. L’Harmattan, 2012), Eclats de murmures (Virgule Editions, Tanger, 2016) Instantanés d’une rive à l’autre  (Virgule Editions, Tanger, 2019) qui a reçu , le « Prix Vénus Khoury Ghata de la poésie illustrée », et Les lignes de l’attente (Ed. Voix d’Encre, Montelimar, 2020). Ses poèmes sont traduits en cinq langues : italien, espagnol, anglais, arabe et roumain. Elle aime instaurer, dans le cadre de la poésie, un dialogue avec des artistes plasticiens et musiciens. Elle est membre de la Société des Gens de lettres et du Pen club français.Depuis 2019, elle est la directrice de l’Institut Français à Iași, ville culturelle, universitaire et francophone, au Nord-Est de la Roumanie.

 

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