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Les événements participant à la reconstruction du Tohoku après 2011

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Écrit par Michael Amerigo
Publié le 25 octobre 2019, mis à jour le 25 octobre 2019

Le 11 mars 2011, un tremblement de terre de magnitude 9, dont l'épicentre était situé à près de 25 kilomètres de profondeur et 130 kilomètres des côtes japonaises, a provoqué la formation d'un tsunami qui a ravagé le nord du Japon, et plus particulièrement le Tohoku et ses trois préfectures en bordure d'Océan Pacifique, Iwate, Miyagi et Fukushima. La vague géante engendrée par la secousse massive, une des plus fortes jamais enregistrée, a pénétré jusqu'à dix kilomètres dans les terres, laissant derrière elle un bilan humain et matériel catastrophique.


Au lendemain du désastre, des mesures de grande échelle ont été entreprises en vue d'une rénovation, partielle ou totale, des zones les plus affectées et, depuis lors, la population locale n'a jamais cessé d'œuvrer au rétablissement de la région. En août et septembre 2019, des visites étaient organisées par le Tokyo Metropolitan Government pour montrer à plusieurs journalistes venus de différents pays l'avancée des travaux et l'état actuel des chantiers. A l'aube des deux grands événements qui allaient situer le Japon au centre du monde sportif (Coupe du Monde de Rugby et Jeux Olympiques et Paralympiques de Tokyo), ces voyages de presse étaient aussi et surtout l'occasion de dévoiler les installations qui ont été choisies pour accueillir certaines rencontres ou épreuves de ces deux rendez-vous majeurs. Alors que la préfecture d'Iwate est mise à l'honneur en 2019, avec notamment le rugby, celles de Fukushima et Miyagi vivent aussi sous le feu des projecteurs à travers une série d'événements. Les prochains JO, qui seront placés sous le signe du Reconstruction, en feront entièrement partie.

 

fukushima japon

 

 

Le Rétablissement de la préfecture de Fukushima
 

Dévastée par le tsunami, la centrale nucléaire de Fukushima, situé à 250 km au nord de Tokyo, a été au centre de l'attention du monde entier durant les jours et les semaines qui ont suivi la catastrophe. De telle sorte que la ville de Fukushima, capitale de la préfecture du même nom, souffre encore d'une notoriété internationale écornée qui joue sur le tourisme de la région. Pourtant, il n'en est rien et une visite de la ville montre que la catastrophe est désormais loin derrière. Il n'y a qu'à s'y rendre au début du mois d'août pour assister au "Waraji Festival", le plus grand festival de la région, et ressentir la joie de vivre de ses habitants. Les waraji sont les traditionnelles sandales de paille et les plus grandes du Japon, de 12 mètres de long, parcourent les rues de la ville dans une ambiance unique. La parade qui suit est constituée de plusieurs troupes de danse qui viennent exécuter leurs pas devant les yeux enchantés des spectateurs venus en masse. En 2020, le Waraji Festival fêtera son cinquantième anniversaire et, en plein cœur des JO, l'événement devrait encore plus avoir de portée. Le reste de la préfecture montre aussi le visage du rétablissement. Les efforts de reconstruction y ont été spectaculaires et, sur les 2160 sites ravagés qu'elle comptait à l'issue de la catastrophe, près de 95 % ont vu leurs travaux de rénovation accomplis. Dans les municipalités où l'ordre d'évacuation a été levé, toutes les installations médicales, éducatives et commerciales ont rouvert ou ont été reconstruites.

 

fukushima baseball

 

 

Dans le but d'y promouvoir le tourisme, des événements y sont organisés, tel le 29ème "World Children's Baseball Fair" ("Fête mondiale du Baseball pour les Enfants") qui s'est tenu du 30 juillet au 7 août. En plus de recevoir des enseignements liés à ce sport, 150 enfants issus d'une quinzaine de pays  peuvent venir y rencontrer d'autres jeunes ayant une culture différente mais animés par la même passion pendant les neuf jours de l'événement. Peu conscients ou même ignorants de ce qui s'est passé en 2011 à quelques kilomètres de leur terrain de jeu, venir jouer sur ces terres ne semblait pas vraiment poser de problèmes pour eux. Sadaharu Oh, champion de baseball des années 60 et 70 surnommé "The King of Homerun", est l'un des initiateurs de ce projet. Présent sur les lieux, il a accordé aux journalistes un rapide entretien dans lequel il ne cachait pas sa joie de voir le Baseball revenir parmi les disciplines olympiques lors des Jeux Olympiques de Tokyo. Et à Fukushima en plus, où auront lieu plusieurs matchs de Baseball et de Softball. L'article sur les Jeux Olympiques dans le Tohoku revient sur ce double événement. Au J-Village, un grand complexe sportif situé dans les hauteurs de Fukushima, aura lieu le premier événement olympique en mars avec le départ du relais de la flamme olympique. Le choix de ce site est très fort de symbole, comme le dévoile notre article qui lui est entièrement dédié. Ce genre d'événements sportifs permet aussi de mettre en avant les produits locaux, comme les fruits, qui sont servis aux enfants et qui devraient également être servis aux athlètes durant la tenue des épreuves olympiques.

 

fukushima baseball

 

 

La préfecture fait d'ailleurs d'énormes efforts pour changer la réputation de son agriculture, qui n'a pas encore retrouvé le niveau qu'elle avait avant la tragédie, afin de proposer des produits fiables. Notamment la pêche, qui était très réputée avant 2011 et dont le prix de vente est toujours inférieur au niveau national. Il en va de même pour ses produits forestiers et ceux issus de sa pêche. La préfecture met aussi l'accent sur la nécessité de vendre ses produits en-dehors de la préfecture et à terme à l'extérieur du Japon. Les produits locaux sont mis en avant, comme la serviette en coton ou le sake produit à Fukushima qui est l'un des meilleurs du Japon, ainsi reconnu par sa septième médaille d'or d'affilée obtenue à la compétition nationale annuelle ("Annual Japan Sake Awards"). Des tours sont aussi organisés pour expliquer aux consommateurs le bon fonctionnement des opérations ainsi que la sécurité et la grande fiabilité des produits locaux. La préfecture a ainsi développé la notion de "Hope Tourism" ("Le Tourisme de l'Espoir") pour aider les visiteurs à mieux comprendre comment la région se relève. Des informations pratiques sont notamment explicitées pour contrer les fausse idées liées aux radiations dans un site Internet. Avec d'autres initiatives touristiques, telles le "Diamond Route Japan", mis en place avec d'autres préfectures, le "Hope Tourism" propose un voyage qui fait évoluer le visiteur sur l'approche qu'il peut avoir de Fukushima en lui proposant de rencontrer des personnes qui continuent à œuvrer à la reconstruction. En visitant Fukushima, on nous fait réfléchir aux leçons du séisme et de l'accident nucléaire qui a suivi, ainsi qu'à la Reconstruction dans son ensemble. Autant de facteurs qui, associés aux Jeux Olympiques, permettent de revaloriser l'image de Fukushima.

 

miyagi japon


La Reconstruction de Miyagi à travers le Tour de Tohoku
 

Lors du "Tohoku Media Tour" de septembre 2019, les organisateurs avaient prévu de nous montrer trois sites majeurs de la préfecture pour promouvoir le Rétablissement de la région. Le premier de ces sites était le Miyagi Stadium dans lequel les opérations de secours ont été organisées en 2011 et où vont se dérouler dix matchs de Football durant les Jeux Olympiques de Tokyo. L'article sur les JO dans le Tohoku revient en long et en large sur le stade de l'événement. Le second site, à une cinquantaine de kilomètres de Sendai, était l'Université Ishinomaki Senshu, choisie comme lieu de départ d'une course cycliste tout à fait particulière qui s'est tenue les 14 et 15 septembre. Le "Tour de Tohoku", qui profite volontiers de la réputation de notre fameux "Tour de France" et qui en a même pris le nom, écrit à l'origine en katakana, est une course de charité créée pour inviter les gens à enfourcher leur vélo et de (re)découvrir ainsi la région. Mais plus qu'une course, le Tour de Tohoku consiste en un challenge dans lequel le chronomètre n'a pas sa place. La victoire tient ici dans la réalisation du challenge qui est de parcourir pendant les deux jours de l'événement un maximum de kilomètres au travers de cinq courses imaginées sur les routes de la côte. La plus courte de ces courses mesure 65 kilomètres de long et la plus longue 210. La réalisation de ces challenges permet ainsi de récolter de l'argent et de participer aux efforts de Reconstruction.

 

tohoku japon


 

Organisé par le journal régional Kahoku Shimpo et Yahoo Japan chaque année depuis sept ans, près de 4000 personnes, dont l'ambassadeur des Etats-Unis au Japon, ont participé au Tour de Tohoku 2019 alors qu'ils étaient 1316 lors de la première édition de 2013. Ils viennent pour la plupart de la région (la plupart font partie des populations affectées), d'autres préfectures ou même d'autres pays, ils sont plus ou moins jeunes (l'un des participants avait 72 ans et courait pour la sixième fois) et ont tous participé avec forte émotion à la minute de silence avant le lancement de la course. Les départs sont ensuite échelonnés tout au long de la matinée, avec des groupes d'une vingtaine de cyclistes qui se succèdent. Et afin de fournir un support à long terme pour le Rétablissement, un des objectifs affichés par les organisateurs est de tenir l'événement pendant dix années consécutives, soit jusqu'en 2023. Avec la venue des Jeux Olympiques en 2020 et une médiatisation plus importante (Yuzuru Hanyu, le champion de patinage artistique, originaire de Sendai, a participé à une campagne publicitaire pour promouvoir la course cette année), le nombre de participants pourrait encore augmenter dans les années à venir. Au-delà de son aspect éminemment sportif, l'événement, qui jouit d'un grand support auprès des locaux, permet aussi aux participants de faire du tourisme en traversant les zones dévastées par le tsunami. Ils peuvent ainsi admirer la beauté des paysages de la région tout en témoignant de l'évolution, année après année, des travaux entrepris le long de la côte. Et si son but de supporter les efforts de Rétablissement est bien respecté, les aspects social et culturel ne sont pas mis de côté. L'autre objectif du Tour de Tohoku réside aussi dans la transmission et le partage des souvenirs liés au Grand Tremblement de terre de 2011. C'est ainsi que des étapes ont été aménagées le long du parcours pour permettre aux cyclistes de se remettre de leurs efforts (le dénivelé peut être important par endroits), de goûter les spécialités régionales préparées par la population locale et de tisser des liens avec elle.

 

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Nous avons ainsi pu nous rendre sur les lieux de la première étape située à Onagawa, petite bourgade située à 15 kilomètres de l'université. Aujourd'hui très calme, elle a pourtant connu l'enfer en ce jour du 11 mars 2011. Le poste de police balayé et totalement renversé a été laissé en place volontairement à quelques mètres du rivage pour en témoigner. Avec 827 personnes tuées, soit 8,26 % de sa population, et 4316 bâtiments détruits, soit les deux tiers de la ville, Onagawa possède le taux de dommages dus au grand séisme de 2011 le plus élevé de toutes les municipalités du Japon. Les photos prises après le passage de la vague montrent un véritable champ de bataille dans lequel rien n'a été épargné. Mais depuis la catastrophe, la ville a su se relever pour montrer un visage des plus charmants. Et des plus neufs parce qu'il a fallu tout reconstruire. Grâce à son maire en place depuis 8 ans, Monsieur Yoshiaki Suda, et sa grande motivation pour le projet de Reconstruction, la nouvelle Onagawa a pu se construire  Un chantier énorme a pris place sur les restes de la ville et a façonné un nouveau paysage. Les flancs de trois montagnes alentours ont dû être partiellement coupées et le terrain surélevé de plusieurs mètres pour garantir une meilleure sécurité à l'avenir. En 2015, une nouvelle gare et un centre commercial ont ainsi été ouverts, montrant ainsi le visage du Renouveau toujours tourné vers l'avenir. Chose unique, les concepteurs du projet sont allés jusqu'à orienter dans un angle précis la rue principale de cette zone commerciale afin que le premier lever du soleil de l'année, qui a une symbolique toute particulière pour les Japonais, soit exactement dans son axe au-dessus de l'océan. Il nous a expliqué que, si un quart de la population avait quitté les lieux au lendemain de la catastrophe, les autres, surtout les jeunes, avaient accepté le challenge avec fierté. Tout le monde a retrouvé ici une maison et les aides à la reconstruction ont bien fonctionné. Reste à attirer de nouvelles entreprises pour permettre à l'économie de la ville et de la région de se relever complètement.

 

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Les trois événements de la préfecture d'Iwate en 2019
 

Deux articles ont été réalisés pour revenir en profondeur sur les trois événements qui ont fait de 2019 une année très forte pour la préfecture d'Iwate, au nord de l'île de Honshu. Sur un plan pratique, c'est d'abord l'ouverture d'une ligne de train en mars qui permet aux locaux de retrouver une totale liberté de mouvement sur la côte pacifique de la préfecture. Une liberté qui avait été mise à mal après le passage de la vague et les dégâts engendrés sur les voies ferrées, les gares et les ponts du réseau. Sur un plan sportif, c'est la Coupe du Monde de Rugby qui est venue s'installer le temps d'un match (Uruguay-Fidgi du 25 septembre) à Kamaishi. Spécialement construit pour l'événement, le stade se situe à une cinquantaine de mètres du rivage, à l'emplacement exact d'un complexe scolaire qui avait été détruit par le tsunami. Le puissant typhon Hagibis, qui a frappé la préfecture quelques heures avant le deuxième match (Canada-Namibie), a gâché la fête et la rencontre a dû être annulée à cause des inondations et glissements de terrains des alentours. Mais le principal a été assuré : Kamaishi, "la Ville du Rugby", a pu montrer au monde, grâce à ce nouveau stade et au grand rendez-vous qui y a eu lieu, que la région et ses habitants ont pu œuvrer de la plus belle des façons dans la voie de la Reconstruction. Sur un plan culturel enfin, c'est l'ouverture le 22 septembre d'un musée sur la catastrophe de 2011 à Rikuzentakata, une ville qui a perdu plus de 1700 personnes sur ses 24000 habitants lors de la catastrophe. Tout a été mis en œuvre pour que les travaux soient complétés avant le premier des deux match de la Coupe du monde de rugby qui avait lieu dans la ville voisine de Kamaishi.

 

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Faisant face à l'Océan Pacifique à proximité du "Miraculous Lone Pine" (le seul pin à avoir miraculeusement résisté à la vague), le "Iwate Tsunami Memorial Museum", dont la construction a coûté 800 millions de yens, raconte l'impact des tsunamis et des catastrophes qui ont frappé le Japon. Il ne reste pas seulement sur la préfecture d'Iwate mais aussi sur l'ensemble de la région, avec celles de Miyagi et de Fukushima. Le musée, le premier du genre à être ouvert par l'une des trois préfectures, comporte quatre zones d’exposition permanentes intitulées “Understand History” (“Comprendre l’Histoire“), “Learn Lessons“ (“Apprendre les Leçons“) et “Promote Recovery Together” (“Promouvoir le Rétablissement Ensemble“), sur le thème “Protecting lives and living with the ocean and land” (“Protéger des vies et vivre avec l’océan et la terre“). Parmi les 150 objets exposés figurent des fragments d'un pont et un véhicule de pompiers qui ont été détruits par le tsunami. Au théâtre du musée, les visiteurs peuvent visionner une vidéo montrant le tsunami s'abattant sur les côtes et la façon dont les gens ont été évacués. Ils pourront ainsi venir ici pour bien comprendre ce qui s'est passé le 11 mars 2011 sur la côte nord-est du Japon et se recueillir puisque, parallèlement au musée, un mémorial a également été créé. Le but du musée, dont l’admission est gratuite pour garantir un accès plus facile à tous les visiteurs de la région, est également de laisser un message fort aux générations futures afin de les préparer à affronter les catastrophes naturelles de cette nature.

 

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Les temps durs que les préfectures de Fukushima, Miyagi et Iwate ont connus en 2011 et durant toutes les années suivantes semblent être sur la bonne voie de la Reconstruction. C'est l'enseignement que les trois tours organisés par le "Tokyo Metropolitan Government" en août et septembre 2019 auront permis de retenir. Les gens restent conscients du travail qu'il reste à faire mais les efforts qui ont déjà été accomplis les rendent fiers et confiants dans l'avenir. A travers l'épisode douloureux que les populations locales de ces trois préfectures ont connu, de nouvelles idées ont fleuri, de nouvelles valeurs ont été créées et d'immenses possibilités ont vu le jour. A l'image du Tour de Tohoku qui a instauré dans la région une culture du cyclisme liée à celle du tourisme, les projets et innovations ont apporté du neuf dans la région, sans jamais oublier les leçons du passé. Le neuf se bâtit sur un événement tragique qui aura affaibli l'ensemble de la population de ces régions. Comme pour les événements sportifs qui ont eu lieu ou qui vont se produire l'année prochaine, la joie liée au Sport se bâtit sur les restes de la catastrophe de 2011, la plus grande qu'ait connu le Japon ces dernières décennies. Mais l'archipel s'est toujours relevé des désastres qui l'ont frappés et il n'y aura pas d'exception encore. Le Sport, le courage et la force de caractère de sa population lui permettront de continuer allègrement dans la voie du Rétablissement. Pour finir, le maire de Rifu, dans son discours qu'il a prononcé en anglais devant les journalistes venus visiter le Miyagi Stadium, est revenu sur une histoire émouvante. Juri Sato est une jeune étudiante qui a perdu Airi, sa sœur ainée alors âgée de six ans, durant la catastrophe. Une fleur blanche a été trouvée là où reposait Airi. La jeune Juri l'a récupérée et, bien que flétrie, elle a décidé de la replanter. Comme un symbole, la fleur a fini par repartir. La dernière partie d'une lettre que Juri a écrite indique "j'espère que cette fleur sera une chance pour tout le monde de penser à la prévention de futures catastrophes. Personne ne sait quand et où se produiront les futurs séismes. C'est pourquoi j'aimerais qu'à travers cette fleur tout le monde pense à combien la vie est précieuse. En 2020, nous célébrerons les Jeux Olympiques et durant cette période j'aimerais que tout le monde voie cette fleur, nommée Airi, et pense à la signification du mot Vie."

 

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