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LOI EXCEPTIONNELLE – El Salvador interdit l’exploitation minière

Écrit par Lepetitjournal San Salvador
Publié le 7 juillet 2017, mis à jour le 7 janvier 2018

Une loi visant à interdire l'exploitation minière des métaux vient d'être adoptée à San Salvador. C'est la première fois qu'un pays d'Amérique latine applique une législation de ce type.

 

Une femme salvadorienne, contestant l'exploitation minière.

Le slogan « Si a la vida » (Oui à la vie), prend tout son sens lorsque l'on vit dans un des pays les plus violents d'Amérique latine. Ici en l'occurrence, cette formule se réfère à autre chose. Après plus de 12 ans de lutte, les communautés paysannes ont obtenu raison avec le vote d'une loi qui interdit l'exploitation minière des métaux sur tout son territoire.

La loi, qui ne comporte que 11 articles, interdit donc l'exploration par des entreprises nationales ou étrangères ou par des personnes qui pratiquaient l'extraction de métaux dans le pays. Elle interdit également l'usage de substances toxiques qui mettent en danger la santé des paysans et de l'environnement. La pression exercée sur le parlement a été très forte ces derniers mois. L'Église catholique s'est jointe à la lutte des paysans et se sont présentés devant les députés avec un document contenant 30 000 signatures.

Quoi qu'il en soit, le gouvernement a du créer les conditions pour que cette loi commence à porter ses fruits. Les ministères de l'environnement et de l'économie se sont chargés des décrets d'application de la loi et les organisations sociales, dont font parti les paysans, seront les garants de la mise en ?uvre des conditions puis de l'application de la loi.

Première conséquence immédiate : l'entreprise canadienne Pacific Rim qui effectuait déjà des travaux d'exploration à El Salvador devra cesser ses opérations et déposer le bilan. Mais elle devra surtout réparer les dommages causés à l'environnement et payer  une importante amende à l'État, après avoir perdu un procès à la Cour internationale, en raison du non-respect des normes exigées sur ses chantiers.

   Un conflit qui date

En 2005, les paysans avaient déjà constaté la présence d'entreprises qui cherchaient à initier des explorations pour l'extraction de métaux dans cette zone, et c'est pour cette raison qu'ils ont décidé de s'appuyer sur le soutien d'organisations de défense de l'environnement nationales et internationales. Une année auparavant, le Comité environnemental pour la défense de l'eau et la culture avait été fondé sur les lieux mêmes où l'entreprise canadienne Pacific Rim avait déjà entrepris ses activités.

Preuve de la tension dans ce dossier, cinq activistes, membres d'organisations environnementalistes et paysannes, ont été assassinés au cours de la dernière décennie. La loi, tout récemment appliquée, est aussi un hommage à ces victimes qui sont mortes en défendant les communautés paysannes et l'environnement.

La surprise pour beaucoup a été que l'Église catholique se joigne à la lutte contre l'exploitation minière. Quelques semaines auparavant que la loi ne soit votée, la curie catholique a organisé une manifestation imposante jusqu'au parlement pour exiger des députés qu'ils votent la loi.

   La dette de Pacific Rim envers l'État d'El Salvador

En octobre dernier, le Centre international pour le règlement des différends relatifs à des investissements (CIRDI) a tranché en faveur de l'État salvadorien contre l'entreprise canadienne Pacific Rim, dans le cadre d'un litige qui datait déjà depuis sept ans.

D'après le procès, l'entreprise n'avait pas respecté les conditions légales du pays concernant la protection de l'environnement et des ressources naturelles. Au mois de mai, le CIRDI a donc ordonné à l'entreprise le paiement de sa dette, soit 8 millions de dollars, plus 2% d'intérêts annuels sur le montant dû à l'État, qu'elle n'a encore pas commencé à payer.

Durant le procès, Pacific Rim a tenté de déposer plainte contre l'État d'El Salvador, assortie d'une demande d'indemnisation d'un montant de 315 millions de dollars, arguant que l'État n'avait pas respecté les conditions établies pour les investissements étrangers et l'exploration des mines de métaux, entraînant pour l'entreprise des pertes de plusieurs millions de dollars.

Mais en vain, la sanction est bien tombée, et la loi promulguée depuis cette semaine. Pour le plus grand bonheur des communautés sociales et paysannes, qui se sont battues bec et ongles pour se faire justice. Cette victoire judiciaire est tout un symbole qui illustre la force, la ténacité et la solidarité du peuple salvadorien.

Vincent VILLEMER pour www.lepetitjournal.com/San Salvador Vendredi 7 Juillet 2017

lepetitjournal.com san salvador
Publié le 7 juillet 2017, mis à jour le 7 janvier 2018