Le rapport de travail dans le secteur du spectacle/divertissement présente en Italie toute une série de particularités par rapport au rapport de travail « ordinaire ».
Qu’on entend par « spectacle/divertissement » ? Qui est le travailleur du spectacle ? Comment est-il embauché ? Quelles sont les causes de cessation de la relation de travail dans le secteur du spectacle ?
Voici un aperçu général du travail dans le secteur du spectacle à la lumière de la loi italienne, ainsi qu’une analyse des aspects les plus intéressants de cette relation de travail qu’on pourrait définir ad hoc.
À l’état actuel, existe-il un « Code du spectacle » ? Le cadre normatif de la relation de travail dans le secteur du spectacle
Depuis le 18 août 2022, la loi n° 106 de 2022 est en vigueur pour la réorganisation et la révision des instruments de soutien aux travailleurs du « spectacle vivant » et pour la reconnaissance de nouvelles protections en matière de contrats de travail et de rémunération équitable pour les travailleurs indépendants dans ledit secteur.
À l’état actuel, il n’existe pas encore du « Code de spectacle », mais son élaboration fait partie du programme du Gouvernement italien.
Qu’on entend par « spectacle/divertissement » ?
Dans le système juridique italien, il n'existe pas de définition légale de « spectacle » ou de « divertissement », car il s’agit d’un phénomène très vaste qui peut impliquer différentes activités selon des modalités qui varient dans le temps et l'espace.
Comme reconnu par la jurisprudence, « la notion de spectacle englobe une multiplicité de formes de communication et de divertissement » (Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 1° juin 2004, n. 10528).
En l’absence d’une définition légale, la jurisprudence a fourni des précisions et/ou indications pour chercher de délimiter les contours de cette notion, en affirmant que le spectacle est entendu comme une « activité visant à la représentation théâtrale, cinématographique ou télévisuelle, ou à la réalisation d'un produit destiné à être vu ou entendu par un public présent ou éloigné » (Cour de Milan, chambre sociale, arrêt n. 1106 de 2021) ou encore que le spectacle est une «exposition artistique ou récréative qui, en tant que telle, trouve sa raison d'être en elle-même et non dans des buts ultérieurs (commerciaux ou autres)", et à laquelle « le public se rend essentiellement pour jouir de sa beauté, pour y puiser un contenu culturel ou simplement pour se divertir » (Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 2 mai 2006, n° 10114).
Un organisme national de prévoyance et d'assistance pour les travailleurs du spectacle vivant
Des indications ultérieures ont été fournies par le décret législatif n. 708 du 16 juillet 1947, qui a créé l'organisme national de prévoyance et d'assistance pour les travailleurs du spectacle vivant (en Italien, « ENPALS, Ente Nazionale di Previdenza e di Assistenza per i Lavoratori dello Spettacolo ») et qui a établi une liste très détaillée des travailleurs du spectacle, forcément inscrits à cet organisme (Article 3, paragraphe 1).
À cet égard, à titre d’exemple, sont inscrits à l’ENPALS italien les artistes lyriques, les acteurs de prose, d'opérette, de revues, de variétés et d'attractions, les chanteurs de musique légère, les présentateurs, les disc-jockeys et les animateurs d'établissements touristiques, les acteurs et généraux de cinéma, les acteurs de doublage de films ou encore les techniciens du montage, du son, du développement et de l'impression.
Également, des aspects spécifiques de la matière sont contenus dans plusieurs conventions collectives (par exemple, la Convention collective nationale de travail pour le personnel des troupes cinématographiques et audiovisuelles du 7 décembre 1999 ou la Convention collective d’Industrie du cinéma et de l'audiovisuel du 9 juillet 2019).
La relation de travail dans le secteur du spectacle : autonome ou subordonnée ?
En ligne de principe, les services artistiques peuvent être fournis à titre autonome ou subordonné.
Par « travail subordonné » on entend toute manifestation d'emploi subordonné, y compris le travail flexible, comme le travail sur appel et à des fins de formation, comme le contrat d'insertion ou de réinsertion (Ministère du travail et des politiques sociales italien, réponse interprétative du 16 mai 2006).
En revanche, par « travail autonome » on entend tout type de travail non subordonné.
Il est essentiel d’identifier la commune intention des parties afin de vérifier si elles ont voulu que le travailleur soit inclus dans l'organisation de l'employeur, avec pour conséquence la soumission de celui-ci au pouvoir d'organisation, de direction et de discipline de l'employeur, étant entendu que la qualification d'une relation de travail comme autonome ou subordonnée se fonde sur son exécution réelle et concrète (Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 23 novembre 1998, n. 11885).
À titre d’exemple, sur la base de modalités d’exécution du service artistique, la jurisprudence a reconnu comme « autonome » l’activité préparatoire, ainsi que la direction artistique et le montage du film exécutés par le réalisateur (Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 6 janvier 1982, n. 20). Encore, a été qualifiée comme « subordonnée » l'activité exercée par des musiciens d'orchestre si elle est exercée dans un ensemble dont la direction et l'organisation relèvent de la responsabilité d'un impresario artistique (Cour de cassation, chambre pénale, arrêt du 5 février 1975, n. 1088).
L’embauche, le déroulement et la cessation de la relation de travail dans le secteur du spectacle : les principales particularités
Tous les travailleurs du spectacle peuvent être embauchés directement, selon les modalités ordinaires prévues par la généralité de travailleurs.
L’employeur doit communiquer au Ministère de travail et des politiques sociales italien (« Ministero del Lavoro e delle Politiche Sociali ») l’embauche du travailleur du spectacle, qu’il soit autonome ou subordonné, par voie télématique, dans les 24 heures suivant le jour précédant celui où la relation de travail est effectivement établie (même s'il s'agit d'un jour férié).
Attention : l’obligation de communication de la part de l’employeur ne concerne pas les opérateurs autonomes du secteur de la musique.
La première particularité de cette relation de travail ad hoc est le contrat de travail, qui est défini « contrat d’écriture artistique » (en Italien, « contratto di scrittura artistica ») et qui peut être, exactement comme un contrat de travail « ordinaire », à durée indéterminée ou à durée déterminée.
Par ce contrat, l’employeur assume l’obligation de payer la rémunération établie et le travailleur du spectacle celle de fournir sa prestation artistique.
L’employeur peut conclure ce contrat « d’écriture artistique » avec un ou plusieurs artistes. Lorsque l’embauche concerne deux ou plusieurs artistes, le contrat est dit « contrat jumelé ».
Autre particularité : En dérogation au principe général de non-discrimination, l’embauche des travailleurs du spectacle peut être subordonnée à l'appartenance à un sexe déterminé si cela est essentiel à la nature du travail ou du service artistique.
Le contrat d’écriture artistique est-il soumis à des contraintes formelles ?
En ligne de principe, le contrat conclu avec le travailleur dans le secteur du spectacle n’est pas soumis à des contraintes formelles, puisque la rencontre des déclarations de volonté des parties est suffisante.
Cependant, la loi ou la convention collective applicable peuvent prévoir que le contrat individuel (en particulier, certains de ses éléments) soit rédigé en forme écrite, surtout s’il s’agit des contrats à durée déterminée.
Dans le contrat d’écriture artistique on peut souvent trouver la « clause d’exclusivité », avec laquelle le travailleur (qu’il soit l’artiste ou l’acteur ou le disc-jockey), s’engage à travailler, sous une rémunération et pour une période prédéterminée, exclusivement au service de l'employeur. La rupture de l'engagement entraîne une responsabilité compensatoire pour le travailleur.
Autre particularité : la clause dite « de protestation », qui fonctionne comme une condition résolutoire du contrat. Il s’agit d’une clause particulièrement diffusée dans les différentes CCNL des artistes, qui permet de résilier le contrat si le travailleur du spectacle ne se révèle pas à la hauteur des exigences du public ou du directeur artistique ou également de son employeur.
Cette clause – généralement en forme écrite – se distingue de la période d’essai contenue dans le contrat, dans laquelle chaque partie peut se retirer librement du contrat et aussi du juste motif (en Italien, « giusta causa »), qui suppose un manquement délibéré de la part du travailleur du spectacle.
En d’autres termes, cette clause « de protestation » peut être utilisée lorsque l'artiste engagé n'est pas jugé suffisamment bon.
À cet égard, la Cour suprême a correctement fait application de ladite clause, en jugeant un chanteur (en l’espèce, un soprano) inadapté sur le plan vocal et en rejetant par conséquent son recours, par lequel il demandait plus de 17.000 euros d'indemnités pour la résiliation unilatérale de son contrat par la compagnie d'opéra avant l'expiration du contrat (Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 20 août 2019, n. 21506).
Concernant la rémunération des travailleurs du spectacle, on peut distinguer plusieurs formes, qui sont très particulières, c’est-à-dire :
- une rémunération basée sur le temps, en référence à la durée du service ;
- une rémunération par pose, par représentation ou par cachet, en fonction du nombre de scènes ou de représentations ;
- un montant forfaitaire, entendu comme une rémunération globale.
Cependant, il existe également d'autres formes de rémunération spécifiques, telles que la participation aux subventions de l'État ou aux recettes de l'œuvre, ce qui constitue une forme d'intéressement.
En ce qui concerne la cessation de la relation de travail dans le secteur du spectacle, les cause de cessation sont presque les mêmes de la relation de travail dite « ordinaire », parmi lesquelles figurent, à titre d’exemple, la démission, l'empêchement grave et la force majeure, le licenciement individuel et collectif ou le non-accomplissement de la période d'essai.
Si l’employeur décide de faire cesser le contrat d’écriture artistique du travailleur du spectacle parce qu’il a exercé son « droit de protestation », en raison de la mauvaise qualité de la prestation de ce dernier, la relation de travail est interrompue prématurément par un acte unilatéral de l'employeur.
Les mineurs peuvent-ils travailler dans le secteur du spectacle en Italie ?
En ligne de principe, oui, mais il faut l’autorisation de l’Inspectorat Territorial du Travail …
Les mineurs peuvent être employés dans des activités artistiques, culturelles, sportives ou publicitaires et dans le secteur du spectacle.
Les enfants (c’est-à-dire les mineurs qui n’ont pas encore atteint l'âge de 15 ans ou qui sont encore soumis à la scolarité obligatoire) ne peuvent être employés dans ces activités que pour une durée de travail maximale de 7 heures par jour et de 35 heures par semaine (Article 18, paragraphe 1 de la loi n. 977 de 1967).
Reste entendu que le temps de travail dans le secteur du spectacle doit permettre à l'enfant de suivre sa scolarité obligatoire.
Pour les adolescents (c’est-à-dire les mineurs âgés de 15 à 18 ans qui ne sont plus soumis à la scolarité obligatoire), les heures de travail ne peuvent excéder 8 heures par jour et 40 heures par semaine.
C’est l’Inspectorat Territorial du Travail (en Italien, « l’ITL ») qui peut autoriser les mineurs à travailler dans le secteur du spectacle, si sont remplies les critères suivants :
• il faut le consentement écrit des parents ou du tuteur ;
• il doit s'agir d'activités qui ne compromettent pas la sécurité, l'intégrité psychophysique et le développement des mineurs, leur scolarisation ou leur participation à des programmes d'orientation ou de formation professionnelle. (Article 4, paragraphe 2 de la loi n. 977/1967 ; Article 2 du Décret du Président de la République n. 365/1994).
• Il faut une expresse autorisation de la part de l’ITL.
C’est l’ITL qui délivre ou refuse l'autorisation après avoir vérifié que toutes les conditions sont remplies.
15 jours civils après le jour suivant l'introduction de la demande et si la demande contient toutes les informations requises par les formulaires mis à disposition par le même ITL, alors l'autorisation est réputée être délivrée par consentement tacite.
Dernière chose importante : l’ITL vérifie l'existence de mesures de sécurité au travail, conformément au décret législatif n. 81 de 2008, ainsi que la garantie de la santé physique de l'enfant et la sauvegarde de la moralité.
Si, par exemple, le mineur est appelé à lire/réciter un texte, le contexte dans lequel se déroule la prestation (lieu, conditions d'hygiène, etc.) doit également être évalué.