Anfa, Dar Beida puis Casablanca, à l'aube du 20e siècle, la ville blanche se confondait avec ce qu'on appelle aujourd'hui l'ancienne médina. C'était une ville d'une cinquantaine d'hectares en bordure d'une rade rocheuse peu hospitalière, entourée d'une ceinture de remparts qui lui donnait une forme triangulaire. L'arrivée massive d'européens au début du 20ème siècle puis l'instauration du Protectorat français vont marquer un tournant décisif dans le développement de cette petit ville devenue un des ports les plus importants d'Afrique.
A partir de 1906, des hommes vont imaginé une nouvelle ville, telle un laboratoire de sciences parmi lesquelles l'urbanisme et l'architecture ont occupé une place prépondérante. De Lyautey à Zevaco, célèbres ou inconnus, ils sont nombreux à avoir laissé un peu d'eux-mêmes dans la construction de Casablanca.
1ére Partie ? Casablanca : une histoire d'Hommes
Les services de la municipalité et de l'urbanisme
Ils ont toujours été confrontés à « la fièvre de la construction » malgré la mise en place par Henri Prost d'une administration rigoureuse chargée de faire respecter les dispositions de ses plans d'aménagement. Mais l'affrontement et la négociation ont engendré des solutions inédites qui ont fait de Casablanca une « ville pragmatique » (J.-L. Cohen). Cet équilibre précaire entre intérêts publics et privés s'observe jusqu'à nos jours.
(Boulevard de Paris - 1935)
Les promoteurs
Ils étaient européens de toutes origines, marocains issus de la grande bourgeoisie commerçante de Fès, israélites, certains venaient aussi d'Essaouira dont l'expansion du port de Casablanca a accéléré le déclin? Tous attirés par la croissance prodigieuse de la ville. Leurs commandes, tant pour les immeubles de rapport que pour les habitations privées, montrent leur goût pour les constructions modernes, et leur confiance dans l'essor d'une ville qui, dans les années 20, n'existe pas encore. Parmi eux, on retrouve des promoteurs « publics » qui marquent la ville de bâtiments imposants qui structurent l'espace : place Mohamed V, hôpitaux, etc. Et surtout des promoteurs « privés » : industriels, de grandes sociétés telles que les banques, les assurances, mais aussi beaucoup d'architectes et d'entrepreneurs.
(Bank El Maghreb - Edmond Brion - 1937)
Souvent d'origine italienne, ils ont su transmettre leur savoir-faire en matière de finitions : ornementation et revêtements (sols en granito poli). La main-d'?uvre est de toutes origines (européenne et marocaine). Les entrepreneurs ont été secondés par les mâalems et artisans marocains dans la mise en ?uvre des matériaux traditionnels : zelliges, bois sculptés, tuiles vernissées, plâtres ciselés. Ils ont utilisé très vite les nouvelles techniques du béton armé grâce aux pionniers en la matière : les frères Perret.
Ils sont venus d'Europe (essentiellement français) ou d'Afrique du Nord (Algérie, Tunisie). Encouragés par l'atmosphère innovante qui règnait à Casablanca, ils ont pu réaliser des édifices d'envergure. Libres dans leurs orientations, ils ont, indifféremment, conçu leurs ?uvres dans les styles relevés à Casablanca. Ils ont trouvé dans l'architecture traditionnelle marocaine la correspondance avec le mouvement cubiste (toit terrasse, volumes dépouillés) et dans l'artisanat local (zelliges, fers forgés) les éléments de décoration propres à l'architecture « art déco ». En étudiant l'habitat marocain et l'organisation des villes, ils ont aussi construit les nouveaux quartiers, exemple des Habous. Plus tard, après la deuxième guerre mondiale, des jeunes architectes expérimenteront de nouveaux modes d'habitat. La réputation de modernité de Casablanca se transforme définitivement en tradition.
(Immeuble Villas Paquet - Jacques Gouyon - 1952)
Sans oublier bien sûr les urbanistes, véritables chefs d'orchestre de la création et du développement de Casablanca. Ils n'ont pas seulement construit la ville, ils l'ont pensée, rêvée et conçue. Découvrez dans notre prochain article le travail de deux urbanistes qui ont marqué l'histoire de Casablanca : Henri Prost et Michel Ecochard.
A venir également, le programme détaillé des Journées du Patrimoine de Casablanca qui se dérouleront les 17 et 18 avril !
Casa-Mémoire / Marlène HYVERT. (www.lepetitjournal.com/Casablanca), mercredi 7 avril 2010
Sources et crédits photos: "Association Casa-Mémoire, association de sauvegarde du patrimoine architectural du 20è siècle au Maroc"
Lire aussi >>
- « Casablanca ? A la (re)découverte de la « vieille medina », LPJ/11.02.10
- Bibliographie proposée par l'Association Casa-Mémoire
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