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New York, la capitale méconnue de la francophonie

Francophonie New York Francophonie New York
De gauche à droite : Fabrice Jaumont, Ben Kallos, Anne-Claire Legendre, Stéphane Lautner et Catherine Rémy
Écrit par Bilinguisme avec le soutien de Suno.Space
Publié le 20 mars 2020, mis à jour le 20 mars 2020

Dans la métropole américaine, le français vit, parlé par des communautés diverses. À travers des festivals, des écoles ou des lieux culturels, une poignée de francophones travaillent à mettre la langue de Molière dans la bouche des Américains.

 

Plus de 80.000 francophones à New York

L'histoire du français à New York a commencé tôt. C'est sans doute en 1524 que notre langue a pour l'une des premières fois résonné sur Manhattan.

Depuis, le roman francophone continue de s'écrire grâce aux soubresauts de l'histoire et des migrations. Car, si New York n'a pas encore de quartier baptisé « Little France » ou « Little Paris » , la métropole a en revanche un « Little Sénégal ». Ce minuscule quartier s'étire sur deux blocs sur la 116e rue dans Harlem. Entre les magasins de produits africains, notre douce langue résonne. Une présence qui nous rappelle que  « 59% des locuteurs quotidiens du français se trouvent sur le continent africain » selon les chiffres de l’Office International de la Francophonie.

« À première vue, la francophonie sur le continent américain, c'est la Louisiane, le Maine ou l'Acadie, mais New York, c'est un peu la francophonie cachée. Des dizaines de milliers de personnes parlent français. » L'analyse est faite par Guillaume Parodi qui vit dans la métropole. Il est l’organisateur, lors du Printemps de la Francophonie en avril, du Festival des 5 continents. L'événement littéraire et culturel, l'un des seuls du genre à New York, est en français et met en avant des auteurs qui écrivent dans cette langue. Mais cette année, malheureusement, il ne se tiendra pas.

Difficile de savoir exactement combien de personnes parlent français à New York, mais selon l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), les locuteurs seraient plus de 80.000.

L'institution basée à quelques rues seulement du siège de l'ONU, sur les rives de l'East River promeut la langue française dans le monde, mais à d'autres objectifs comme nous l'expliquait l’an dernier Patricia Herdt, alors la représentante adjointe permanente « nous avons une mission de paix et de défense des droits de l'Homme, nous travaillons aussi à l'éducation, et à la recherche, et puis nous avons aussi une mission autour du développement durable. » L'OIF regroupe 88 pays, contre 21 en 1970, lors de sa création au Niger. Un développement lié à l'expansion de la langue française dans le monde. Selon les estimations de l'OIF, il y aurait 300 millions de locuteurs francophones sur la planète  (9,6% de locuteurs en plus selon la dernière étude en 2014), la majorité se situant en Afrique. « La Louisiane a adhéré à l'OIF, c'est la première fois qu'un état fédéré entre dans l'Institution. La côte Est des Etats-Unis est très marquée par la francophonie », indiquait Patricia Herdt.

À New York, d’autres initiatives privées tournées vers la francophonie se développent. Sur les réseaux sociaux, le groupe facebook « Comité Américain Des Auteurs Francophones » regroupe près de 450 d’entre eux. Il doit sa paternité à Sandrine Kukurudz, auteure et organisatrice de la première « Rencontre des Auteurs Francophones aux Usa », laquelle aurait du avoir lieu le 22 mai prochain au National Art Club de New York, mais qui est repoussée à une date ultérieure, à cause de la crise sanitaire actuelle. Il faudra un peu de patience aux 25 auteurs qui y présenteront leurs ouvrages.

 

« How do you say green in french ? »

Et la langue française est de plus en plus apprise à New York. Depuis 2007, des programmes bilingues se développent dans la ville. Le premier, dans une école publique, a été crée à Brooklyn, au sein de l'école PS58. « En 2007, un groupe de familles françaises a milité pour créer ce programme avec l'aide de notre directrice Giselle Gault Mc Gee. 24 élèves ont adhéré, c'était à la fois des enfants français, et des enfants qui voulaient apprendre une autre langue » explique Greer Patterson, l'une des professeurs de l'école. 350 élèves sur les 1000 de l'école sont dans des classes bilingues.  « Nous sommes malheureusement obligés de refuser des élèves, puisque nous avons un nombre limité d'enfants par classe. Nous avons développé des ateliers bilingues pour ceux qui ne peuvent pas suivre nos classes de français. »

La semaine dernière, le Department of Education de la ville de New York a accepté d’ouvrir un nouveau programme français-anglais à compter de la rentrée prochaine, dans l’Upper East Side après que des parents, Stephane Lautner à leur tête, se soient battus pendant presque deux ans. Le père franco-américain était parti d’un constat « quand ma fille est entrée en kindergarten, je me suis rendu compte que dans sa classe, il y avait environ 8 autres enfants francophones alors que c’est une école publique monolingue ». Avec l’aide de quelques parents, mais aussi le soutien de Fabrice Jaumont des Services culturels de l’Ambassade de France à New York, il aura remué ciel et terre pour qu’un nouveau programme bilingue ouvre dans la zone du district 2 du DOE.

Et l'apprentissage peut démarrer tôt. « How do you say green in french ? », la question est posée par l'un des professeurs de « Petits Poussins too » à des enfants de deux ans et demi. Dans cette crèche, les bouts de choux apprennent à la fois le français et l'anglais. Vanessa Handal-Ghenania, haïtienne d'origine est à la tête de ces crèches anglo-françaises à New-York. « Je cherchais une crèche bilingue pour mes enfants, et cela n'existait pas, donc j'ai commencé dans mon appartement. En 4 mois, j'avais 12 enfants dans mon salon. » Face à cette affluence, elle ouvre sa première crèche à Harlem en 2014. « Nous rassemblons 200 familles, et la moitié des enfants ont au moins un parent francophone », indique Marion Ménand, la directrice marketing.

Dans ces établissements qui accueillent des enfants de 3 mois à 4 ans, l'année coûte entre 22.000 et 25.000 dollars par an. « C'est une langue puissante, qui apparaît comme sophistiquée. Les parents qui viennent chez nous recherchent aussi une éducation française, c'est-à-dire disciplinée et avec des valeurs » précise la directrice. Aujourd'hui, elle en gère 4, et ce n'est pas suffisant puisque les parents doivent attendre 6 mois à un an pour avoir une place.

Et si vous avez vraiment peur de ne pas entendre parler français dans les rues de New York, vous pouvez compter sur les touristes français, qui, malgré l’actualité et la période mausade, finiront bien par revenir. Ils étaient 807.000 en 2018 à fouler le sol new-yorkais selon la NYC & Company.

Un très joyeuse anniversaire à l’Organisation Internationale de la Francophonie qui célèbre cette année ses 50 ans. Et notre édition se joint aux festivités !

 

Article rédigé par Julie Sicot et Rachel Brunet