L’e-commerce ne connait pas de frontières et facilite l’exportation pour les opérateurs économiques, mais quel traitement fiscal est applicable aux ventes réalisées en Italie ?
Le commerce en ligne (« E-commerce ») ne connait pas de frontières et facilite l’exportation pour les opérateurs économiques, jusqu’à permettre une implantation digitale dans divers pays, sans nécessité d’une présence physique sur le territoire. Après l’analyse des règles juridiques à respecter pour le commerce en ligne destiné au marché italien, il convient de s’interroger sur le traitement fiscal applicable à cette activité. Les ventes réalisées en Italie relèveront-elles du fisc italien ou de celui de résidence de l’entreprise à l’étranger ?
En d’autres termes, l’activité de vente de produits ou services en ligne à de la clientèle italienne, exercée en Italie par l’entreprise ayant son siège dans un autre Etat, constitue-t-elle un établissement stable (stabile organizzazione) au sens de la règlementation italienne?
L’art. 5, 1er§ du modèle OCDE de Convention fiscale (« Modèle ») définit l’« établissement stable » comme une installation fixe d’affaires par l’intermédiaire de laquelle une entreprise exerce toute ou partie de son activité.
L’art. 162 du Code General des Impôts italien (TUIR), conformément au Modèle susvisé désigne comme « établissement stable » :
a) Une installation fixe d’affaires (soit avec des locaux, du matériel, etc.. à disposition de l’entreprise étrangère) par l’intermédiaire de laquelle celle-ci exerce tout ou partie de son activité (Etablissement stable matériel); où
b) Un intermédiaire (société ou personne physique, agent ou salarié) qui représente sur le territoire italien l’entreprise non résidente et qui est habilité à conclure des contrats en son nom (Etablissement stable personnel).
Ces deux définitions s’adaptent mal à l’économie numérique, qui permet aux entreprises de pénétrer les marchés étrangers sans besoin présence physique ni personnel ou agent.
La loi n° 205/2017, conformément aux lignes directrices de l’OECD, a profondément modifié la législation italienne en matière d’établissement stable. Maintenant l’art. 162, paragraphe 2, alinéa f-bis) du TUIR, désigne comme établissement stable d’une entreprise non résidente aussi sa présence économique importante et durable sur le territoire italien.
En raison de l’évolution du panorama économique, l’OECD a introduit le concept de « présence économique significative » pour vérifier l’existence d’un établissement stable sans disposer d’éléments matériels où de personnel dans un état.
La présence significative est ainsi caractérisée par trois critères non cumulatifs :
1. Les revenus. Le dépassement d’un certain seuil de revenus est considéré comme un indice de présence économique significative dans l’état où le territoire étranger ;
2. Les facteurs numériques. Il s’agit de l’utilisation d’outils numériques pour atteindre les consommateurs où les utilisateurs dans un autre état tels que la mise à disposition d’un site internet dans la langue du pays, des plateformes locales de réseaux sociaux ou la possibilité d’utiliser des moyens de paiement électronique.
3. D’autres éléments qui supposent la collaboration des utilisateurs et leur participation active. Il s’agit de la juridiction où les contrats sont conclus ou les utilisateurs sont situés, du nombre d’utilisateurs qui ont une participation active sur le site internet ou la plateforme locale de l’entreprise, de la collecte de données des utilisateurs et des clients qui résident habituellement dans un état.
D’autres éléments devront être pris en considération en cas d’entreprise « mixtes » qui n’ont pas seulement une activités numérique, mais aussi un modèle d’affaires traditionnel (auquel il est possible d’appliquer le test de présence matérielle ou de présence personnelle).
TVA et établissement stable
En matière de TVA, la notion d'établissement stable remplit deux fonctions :
• Déterminer les règles de territorialité de la TVA ;
• Déterminer le redevable légal de la TVA et ses obligations déclaratives.
Les opérations de commerce électronique peuvent être classées dans deux catégories : directes et indirectes.
Pour le commerce électronique indirect, qui touche des biens matériels, la prise de commande et le paiement s'effectuent en ligne alors que la livraison se fait par l'intermédiaire de réseaux traditionnels de livraison (poste, courrier express, …). Il est donc assimilé aux ventes à distance de biens matériels.
Le commerce électronique direct touche toutes les transmissions électroniques et les biens immatériels (œuvres musicales, vidéos, logiciels, etc.) livrés par des moyens électroniques. La prise de commande, le paiement et la livraison se font donc en ligne sans passer par les réseaux traditionnels de vente.
Pour ces biens immatériels commandés et livrés en ligne, une analyse au cas par cas doit être effectuée pour déterminer le régime de TVA.
La taxe sur les services numériques (taxe GAFA)
L’art. 1, § 36 de la loi n. 145/2018 a instauré en Italie une taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique. Les entreprises (sociétés italiennes ainsi qu’établissements stables des sociétés étrangères) du secteur numérique, qui individuellement ou au niveau du groupe, sont redevables de la taxe si elles ont généré au cours de l’année précédente :
a) Un montant total de revenus non inférieur à 750.000.000 euros au niveau mondial;
b) Des revenus des services numériques rattachables à l’Italie non inferieurs à 5.500.000 euros.
Elle est calculée en appliquant un taux de 3 % sur le montant des sommes perçues en contrepartie des services numériques taxables rattachables à l’Italie.
En collaboration avec Sabrina Lombardo et Igor Parisi – Dottore commercialista Pirola Pennuto Zei & Associati