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Coronavirus: quel impact sur le marché italien des avocats d’affaires?

Avocat d'affaires milanAvocat d'affaires milan
@lucabravo Unsplash
Écrit par Lisa Alice Julien
Publié le 8 avril 2020, mis à jour le 8 avril 2020

Les avocats, ni plus ni moins que les autres professions, n’étaient préparés à la révolution engendrée par l’urgence sanitaire. Les impacts sont nombreux, à de multiples niveaux.

Différents Managing Partners d’importants cabinets d’avocats d’affaires italiens et internationaux se sont exprimés à l’occasion d’un webinar organisé par Legalcommunity et modéré par Nicola di Molfetta mardi 6 avril dernier, sur le thème « Avocats et coronavirus, de l’urgence à la restructuration du marché ».

Beaucoup de ces grands cabinets prestigieux avaient lancé il y a quelques mois des projets pilotes pour implanter de nouvelles méthodes de travail, notamment la possibilité -limitée- de faire du télétravail, avec tout ce que cela implique en termes de licences, de matériel informatique, d’accès à distance garantissant sécurité et confidentialité. Du jour au lendemain pratiquement, dès l’arrivée des premiers signes de crise en Italie fin février, ils ont été nombreux à appliquer immédiatement ces projets pilotes à l’ensemble du cabinet, accélérant ainsi la « courbe d’apprentissage », relatent différents Partners.

Espaces physiques versus télétravail

Le passage au télétravail a dû être immédiat. Certains cabinets, comme Dentons qui a une présence capillaire en Chine, ou encore Gianni, Origoni, Grippo, Cappelli & Partners avec une présence à Honk Kong et Shanghai, ont pu peut-être mieux anticiper. Selon l’Avvocato Andrea Carta Mantiglia, Partner et Consigliere Delegato de BonelliErede, l’impact sera profond, et ce sur différents aspects : « sur l’espace physique et la conception de l’espace dans des organisations comme les nôtres ». Il est d’avis que si le travail peut être réalisé pour des grands groupes de travail de façon efficace et qui satisfassent les exigences des clients, cela nous indique que dans le futur les espaces devront être repensés, en termes de volume et d’organisation. Autre impact important selon lui : « l’exigence, de l’opportunité, du plaisir » d’être ensemble physiquement, surtout pour les plus jeunes avocats, favorisant le travail d’équipe. Le recours au télétravail est nécessaire pour les nouvelles générations, qui le voient comme un avantage. L’Avvocato Gregorio Consoli, Partner chez Chiomenti, a confirmé qu’il s’agissait d’un « instrument important pour améliorer la qualité de vie des personnes », à tout âge.
Tous ou presque s’accordent avec l’Avvocato Sutti pour dire que l’open space peut constituer une limite. En termes de sécurité dorénavant, mais également car la profession nécessite de la concentration. Pour Filippo Troisi, Senior Partner de Legance, « Le Covid, c’est la mort de l’open space ».

Par ailleurs, les réunions d’une heure à Paris ou Londres feront partie du passé, s’accordent à penser plusieurs managers de ces grands cabinets. Testée par la force des choses, la vidéoconférence, autrefois boudée, va désormais prévaloir sur la perte d’une journée de transport et de centaines d’euros de déplacement.


Assistance légale pro bono

Plusieurs de ces cabinets d’affaires en ont profité pour fournir une assistance pro bono aux entreprises, via la mise en place d’une task force externe et/ou interne dédiée au Covid-19, préparant des notes, des newsletters, des approfondissements mis à jour continuellement. L’Avvocato Rosario Zacca, Co-Managing Partner du cabinet Gianni, Origoni, Grippo, Cappelli & Partners, l’a pensé comme une “activité de services, [les entreprises] étaient en difficulté comme nous, nous l’avons pensé sans but lucratif dans la période initiale”. En particulier Dentons, présent dans la plupart des pays du monde, a lancé des task force Covid-19 dans pratiquement tous ces pays. « C’est une preuve de grande maturité et de grande disponibilité », renchérit l’Avvocato Giuseppe Catalano, secrétaire du Conseil d’Administration d’Assicurazioni Generali, questionné sur la perception par les entreprises de cette aide fournie par certains cabinets d’avocats. Une preuve de maturité des relations avec les partners qui « certainement sera reconnue dans le futur », ceux qui ont donné un coup de main en ces moments difficiles, seront sollicités ensuite.

Impact sur les avocats « associates » et le personnel

Les Associates, ou avocats collaborateurs, sont profession libérale (« partita IVA » dans le jargon italien). Seul le staff (secrétaires, personnel administratif et financier) est salarié. Les Partners de ces grands cabinets d’affaires ont été interrogés sur leurs intentions quant au maintien de leurs avocats et de leur rémunération. Certains cabinets ont suspendu le versement des bonus de compétence de l’année 2019, mais affirment qu’ils seront quoi qu’il en soit payés. L’Avvocato Carta Mantiglia a indiqué que « nos avocats sont l’unique asset que nous avons, nous n’avons aucune intention de nous priver d’eux ni de notre staff pour toute l’année 2020. La policy du cabinet [BonelliErede] est très claire ». Pour l’Avvocato Troisi, « le capital humain est un bien suprême à préserver » et va jusqu’à affirmer que devrait être éliminée la précision de l’absence de mesures pour « cette année ». Cela serait « éthiquement inacceptable et stupide d’un point de vue du capital humain ». Quant à l’Avvocato Sutti di Dentons « en règle générale, l’idée est de sauver le capital humain sur lequel nous avons misé ».


Une aubaine pour les femmes ?

L’Avvocato Gattai a tenu à faire remarquer que ce télétravail forcé sera selon lui une aide aux carrières des femmes avocates. Si le télétravail fonctionne, « je ne me sentirai plus de demander à une femme de rester jusqu’à 21h au cabinet, si elle peut tranquillement travailler de chez elle ». En effet, il déplore la constatation de la très faible proportion de femmes associées dans tous ces cabinets d’avocats d’affaires. L’Avvocato Consoli a également évoqué les parités d’accès aux carrières professionnelles et de ce « choc » pour affirmer que l’on peut travailler différemment. La parité au niveau de la partnership dans les cabinets d’affaires, nous n’y sommes pas encore, peut-être que le Covid-19 contribuera à une évolution positive en ce sens.

Ce webinar, ayant attiré plus de 260 auditeurs, concernait des grandes réalités de cabinets d’avocats d’affaires italiens et internationaux, souvent full services, disposant de ressources importantes.

 

Lisa Alice Julien avocat
Publié le 8 avril 2020, mis à jour le 8 avril 2020

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