À l’occasion de cette rencontre organisée par l’Association hispano-française Femmes Avenir, des intervenantes de prestige du monde politique, de la communication et universitaire ont analysé les inégalités liées au genre dans les postes de responsabilité de l’administration
L’Association d’amitié hispano-française Femmes Avenir a organisé la semaine dernière la tribune : « Comparaison France-Espagne en matière d’égalité : représentation des hommes et des femmes au sein des conseils d’administration et des comités de direction », pour examiner les inégalités au niveau de la représentation des sexes aux postes de direction dans les deux pays. D’importantes intervenantes, aussi bien françaises qu’espagnoles, provenant du domaine de la politique, de l’éducation et des affaires ont participé à la rencontre : Marie-Jo Zimmermann, députée qui a défendu la Loi des quotas en vigueur en France, Lucía Cerón, directrice de l’Institut des femmes et pour l’égalité des chances du gouvernement espagnol, Julia Sevilla, professeure de Droit constitutionnel de l’université de Valence et Muriel de Saint Sauveur, fondatrice du réseau Women Masterclass et auteure du livre « Un monde au féminin serait-il meilleur ? »
Cette tribune débat, qui a abordé d’importantes solutions pour que les femmes puissent accéder aux postes de leadership dans les entreprises, a été animée par María Luisa de Contes, présidente de l’Association et secrétaire générale de Renault Espagne. Les sociétés SODEXO, MAZARS ainsi que le réseau Women@Renault ont été les partenaires.
Susana Camarero, présidente de la Commission pour l’égalité des chances du Sénat, Cédric Prieto, consul général de France en Espagne et José Ignacio Landaluce, président de la Commission des affaires étrangères du Sénat, se sont chargés de l’ouverture de la rencontre. Ils ont expliqué que le Sénat avait souhaité ouvrir ses portes à un sujet aussi important que la diversité des sexes dans les conseils d’administration.
"Les femmes sont aussi préparées, voire plus, que les hommes"
María Luisa de Contes a entamé le débat en abordant la contradiction dont souffre la société actuelle. « Selon les données statistiques émanant des universités depuis de nombreuses années, les femmes sont aussi préparées, voire plus, que les hommes. Personne ne remet en question leurs capacités pour assumer des postes de responsabilité, cependant le nombre de femmes à des postes de haute direction dans les entreprises est encore très modeste ».
Marie-Jo Zimmermann, députée Les Républicains à l’Assemblée nationale, a abordé le chemin parcouru pour obtenir l’adoption de la présente loi des quotas en France, qui pénalise les entreprises qui n’incluent pas un minimum de 40 % de femmes dans leurs conseils d’administration, loi qui est en vigueur depuis le 1er janvier de cette année. « Il reste un énorme travail à faire au niveau parlementaire en matière d’égalité », a-t-elle affirmé. « En 2006, avant cette loi, les femmes étaient présentes à hauteur de 12,5 % dans les postes d’administration et on a atteint 40,1 % cette année » a conclu la femme politique qui a lutté pour modifier la Constitution française en faveur de l’égalité des sexes.
"58 % des diplômés en Espagne sont des femmes, mais elles n’atteignent pas le sommet pour des raisons structurelles"
Pour Lucía Cerón Hernández, directrice de l’Institut des femmes et pour l’égalité des chances (IMIO), « les discriminations persistent dans la société, aussi bien les plus visibles comme la violence à l’encontre des femmes, que les moins perceptibles comme les inégalités au niveau des postes de direction ». « 58 % des diplômés en Espagne sont des femmes, mais elles n’atteignent pas le sommet pour des raisons structurelles comme la faible visibilité, la présence de stéréotypes, comme par exemple celui de la femme qui manque de leadership, ou à cause de comportements sexistes dans certains processus » a-t-elle affirmé avant de rajouter qu’on ne pouvait pas tolérer qu’« à cause de la maternité, qui est un bien social, les femmes sont pénalisées professionnellement ». Pour Lucía Cerón, « il est temps de dynamiser un nouveau style de leadership adapté à la diversité sociale ».
Photo Julia Robles
De son côté, Julia Sevilla, représentante de la sphère universitaire espagnole dans sa qualité de professeure de Droit constitutionnel de l’université de Valence, a déclaré qu’on ne compte pas suffisamment sur le talent féminin, ce qui porte préjudice à l’économie en général. « Si les entreprises considéraient les vrais critères économiques, le caractère des entreprises ne serait pas aussi masculin comme il l’est à présent » a affirmé la chercheuse universitaire.
Afin d’atteindre une plus grande représentation des femmes dans les instances de direction, Muriel de Saint Sauveur, fondatrice du réseau Women Masterclass, a expliqué dans quelle mesure la féminisation des postes de responsabilité apporterait une plus grande efficacité dans les affaires. « Une augmentation du taux d’activité féminine profiterait à tous : Christine Lagarde a démontré que si le nombre de femmes au travail était porté au même niveau que celui des hommes aux Émirats arabes unis, le PIB progresserait de 12 %, au Japon de 9 % et aux États-Unis de 5 %. », a-t-elle expliqué. L’experte en communication a fait valoir que malgré le fait que les femmes représentent plus de 50 % de la population mondiale, elles contribuent seulement à 37 % du PIB mondial. Une augmentation du taux d’activité des femmes rapporterait donc « 12 trillions de dollars d’ici 2025 à la croissance mondiale ».
Les femmes représentent plus de 50 % de la population mondiale, elles contribuent seulement à 37 % du PIB mondial
Elle a rappelé que si la société ne modifie pas le paradigme actuel, selon les estimations du Forum économique mondial, nous aurons l’égalité en 2186 et qu’il n’est pas suffisant de « changer et d’adapter des lois, mais il faut aussi les appliquer, car en France nous en avons beaucoup, mais pas toutes son appliquées dans la pratique ». Pour Muriel de Saint Sauveur, il s’agirait de « communiquer afin de motiver pour arriver au changement, égaliser de salaires, offrir une formation pour déconstruire les stéréotypes, mettre à plat les processus de recrutement au sein des entreprises et inciter les femmes à se débarrasser des freins : elles doivent oser postuler et se rendre visibles. » En ce qui concerne la comparaison entre les deux pays, alors que la France se trouve à la 17ème place du Global Gender Index (rapport mondial en matière de disparités entre les sexes) l’Espagne se trouve à la 29ème place.
Pour conclure, il semble évident que l’adoption d’une loi qui oblige l’inclusion d’un minimum de 40 % de femmes dans les conseils d’administration, ne serait pas une révolution à proprement dire, mais une mesure rationnelle et juste rapportant des bénéfices économiques optimaux attendus pour les entreprises.
Sur l’ASSOCIATION D’AMITIÉ HISPANO - FRANÇAISE FEMMES AVENIR :
Femmes Avenir travaille pour que les femmes se fassent entendre et pour contribuer à l’égalité dans tous les domaines, grâce au soutien de Monsieur l’Ambassadeur de France en Espagne, de Monsieur l’Ambassadeur d’Espagne en France et de Monsieur le Consul général de France à Madrid. L’Association œuvre pour encourager la constitution d’un réseau de relations qui concoure à la création de valeur dans la société et à resserrer les liens entre l’Espagne et la France, ainsi que pour être plus visible dans la lutte efficace contre les inégalités.
L’Association est présidée par María Luisa de Contes (secrétaire générale de Renault Espagne). Candice Laporte (secrétaire générale de CCEF Espagne) et Estefanía Narrillos (directrice financière région ibérique et Algérie de PSA Groupe) en sont les vice-présidentes et María Blazquez (directrice des ventes de PSA Groupe) est la directrice générale de développement des activités.