C'est sur une thématique exigente, inscrite au cœur de la révolution urbaine de demain, révolution irrémédiable et pourtant mal connue encore, que l'association d'amitié hispano-français a inauguré la rentrée. Une fois de plus, salle comble et expertes de haut vol ont fait de l'événement un rdv incontournable, et permis de confirmer l'un des slogans de l'association : "Former partie du futur et participer aux changements de la société".
Avis aux amateurs : les places sont chères et la ponctualité est de mise sur les conférences de Mujeres Avenir. Cette fois encore, la technicité patente du colloque -"Les enjeux de la mobilité connectée et durable"- n'a donc pas effrayé l'assistance. Tant mieux : la thématique était porteuse de débats sociétaux, éthiques et philosophiques de fond, et les interventions, centrées sur les domaines de l'automobile, du transport collectif et de l'énergie, et de leur régulation par l'administration publique, ont permis d'esquisser certaines pistes très concrètes de ce à quoi pourrait ressembler la smartcity de demain. A moins qu'il ne s'agisse d'aujourd'hui : les chamboulements sont en marche, et le citadin ordinaire n'en mesure pas toujours la portée, qui devrait pourtant changer de façon profonde son quotidien. Or, la moitié de la population mondiale est aujourd'hui urbaine, les deux-tiers devraient l'être d'ici 2050. Les enjeux sont de taille.
Hyperconnecté, voire "omniconnecté", l'habitant des villes sera de fait générateur continu de données, dont le traitement constituera l'un des principaux axes qui devrait structurer certains secteurs urbains. Le contrôle de ces données, par les acteurs du transport et de l'énergie notamment, et la maîtrise des paramètres à caractère commerciaux qui seront établis par ces opérateurs, conditionneront l'usage qui sera fait de leurs services, les coûts et les prestations. Le citadin doit donc se préparer à changer plus d'une de ses habitudes et à devoir plonger, bon gré mal gré, dans le grand magma du big data. Il bénéficiera d'une offre désormais protéiforme, personnalisable, plus proche des besoins individuels, mais aussi plus complexe à comprendre et à gérer.
"Nos besoins en mobilité sont en train de changer", a avancé en guise d'introduction Estefanía Narrillos, Vice-Présidente de Mujeres Avenir, directrice financière de PSA GROUPE dans la Péninsule et modératrice du débat. "Nous assistons à une profonde transformation des conceptions de la mobilité, liées notamment à la recherche de liberté individuelle". La rapidité, la simplicité et l'accessibilité des vecteurs de la mobilité sont devenues des exigences prioritaires des utilisateurs, et ces exigences conditionnent les politiques de développement des acteurs impliqués, à l'image par exemple des constructeurs automobile. Et "le respect de l'environnement", préoccupation citoyenne montante, forme aussi partie de l'équation. "L'industrie traditionnelle est en train d'élargir son offre", a précisé la modératrice.
Carla Gohin, directrice de l'innovation chez PSA GROUPE, a ainsi détaillé les grandes orientations du constructeur français en la matière. Elle a ébauché un véhicule du futur qui devrait acquérir une autonomie croissante vis à vis du pilote, remplaçant en dernière instance icelui. L'électro-mobilité est aussi au cœur des développements de PSA, qui parie pour l'avenir sur un portefeuille de solutions là encore progressives, permettant à l'utilisateur de choisir des modèles allant de l'hybride au tout-électrique. "Nous sommes passés d'un rapport de possession de la voiture à un rapport d'usage" a en outre évoqué l'ingénieure. En septembre 2016, le Groupe PSA a lancé la marque Free2move, une plateforme de mobilité partagée qui permet de de répondre à cette tendance, à l'instar du réseau Emov, exploité par la marque à Madrid. Un véritable pari concernant l'usage futur de la voiture.
Loreto Ordoñez, CEO de ENGIE España, groupe industriel énergétique français issu de la fusion de GDF et de Suez, a pour sa part décrypté les grandes orientations liées au transport de l'énergie. Dans un univers où le véhicule électrique prendra une part croissante, la manière dont son "carburant" sera distribuée aux utilisateurs est primordiale. "Du fait des avancées technologiques, des enjeux du changement climatique et des nouveaux comportements des consommateurs finaux, le transport de l'énergie va évoluer de façon considérable dans les années à venir" a-t-elle confirmé. "On assistera à la démocratisation de l'accès à l'énergie et à la dérégulation du secteur". De fait, c'est une certaine forme d'uberisation de l'accès à l'énergie, électrique et gazière, qui est programmée. Il faudra savoir choisir son bon fournisseur.
Mónica Tejedor, Manager en Intelligence Marketing chez ALSTOM, aura enfin apporté la dose de rêve et de futurisme dont la conférence ne pouvait manquer. Elle a décliné une série de véhicules dédiés au transport collectif qui devraient peupler les mégalopoles du futur. Digne des romans de science fiction du siècle dernier, la voiture volante n'en est pas la moins spectaculaire. Plus prosaïque les autobus et autres métros sans chauffeur, 100% connectés, 100% électriques, accés vers l'intermodalité, devraient permettre de proposer très vite des solutions en ligne avec les exigences de la smartcity. Là-encore, le traitement des données est au cœur du développement : concernant la gestion des flux de passagers, la sécurité, mais aussi l'offre personnalisée de prestations par voie digitale, sur le dispositif mobile du voyageur.
Nuria Román Bernet, responsable d'homologation des véhicules spéciaux au sein du ministère de l'Economie, a enfin conclu la conférence en indiquant les lignes de conduite adoptées par l'Etat pour valider les futurs véhicules -et les doutes soulevés, à l'instar du véhicule sans chauffeur.
Maria Luisa de Contes, Présidente de Mujeres Avenir, a tenu à remercier le soutien de l'Ambassade de France en Espagne et l'implication des instances gouvernementales espagnoles. "Mujers Avenir doit son succès à l'implication et à l'appui de ses membres, je vous en remercie", a-t-elle déclaré. "Concrètement, plus de 60 entreprises corporate, plus de 200 adhérents individuels et 7 associations partenaires, contribuent à notre action, dont l'objectif est de mettre en lumière l'excellence des parcours féminins et atteindre à l'égalité hommes-femmes".