Si vous achetez votre poulet chez Tesco, Asda ou Lidl, ou que vous mangez celui de Macdonald's ou de Nando's, vous êtes sûrement impliqués dans la déforestation au Brésil, selon une enquête menée par The Guardian, ITV News, Greenpeace Unearthed et le Bureau du Journalisme d'Investigation.
Le Brésil et le Royaume-Uni, plus proches que nous pourrions le penser
Le Royaume-Uni abat au moins un milliard de poulets par an. Un grand nombre d'entre eux ont été engraissés par Cargill, entreprise privée américaine spécialisée dans la fourniture d'ingrédients alimentaires, dont le chiffre d'affaires en 2018 s'élevait à pas moins de 114,7 milliards de dollars.
Cargill a exporté au Royaume-Uni 1,5 millions de tonnes de graines de soja entre 2014 et 2020, originaires de la région du Cerrado au Brésil. Là demeure le problème. Avec une superficie équivalente à la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et l'Italie réunis, le Cerrado est un des territoires du monde, si ce n'est le territoire du monde, le plus touché par la déforestation. D'après une étude du cabinet de conseil Aidenvironment, 801 km2 ont été déforestés depuis 2015, correspondant à 16 fois le quartier de Manhattan, et ce sont 12,397 feux de forêts qui ont été déclenchés.
Une chaîne logistique opaque, symbole d'un système international d'échange court-termiste
Ce dernier est un des grands responsables de ce massacre environnemental. Alimenté par la volonté de profit économique à court-terme, il n'a aucun égard vis à vis de l'impact à long-terme de la déforestation.
Pourtant, la végétation du Cerrado stocke 13,7 milliards de tonnes de CO2, un chiffre ubuesque équivalent à la quantité d'émissions annuelles de CO2 d’une nation comme la Chine. Surnommée the "birthplace of waters", constituant la source de nombreuses rivières, les scientifiques affirment qu'il sera très compliqué de protéger cette région tout en préservant sa voisine, l’Amazonie.
En effet, alors que l'Amazonie fait l'objet d'une surveillance internationale, le Cerrado a été abandonné à son sort, suite à la promulgation du Forest Code brésilien en 2012. Ce dernier procure l’autorisation aux fermiers de brûler et couper légalement une grande quantité d'arbres. Pire encore, les produits issus des récoltes et de l'élevage sur le territoire déforesté peuvent se revendiquer de l'étiquette "durable".
Se méfier des étiquettes
Ces dernières sont très souvent mensongères. Nous venons de le voir, elles peuvent qualifier de "durable" des poulets nourris au soja récolté sur des territoires dont 50 à 80% de la superficie se sont transformés en ranch d'élevage ou en fermes agroalimentaires suite à la déforestation. Les firmes citées précédemment sont également coupables. En effet, elles valident ces étiquettes et fournissent des certificats de durabilité aux consommateurs, alors même que l'opacité des chaînes de production ne leur permettent pas d'avoir la garantie que les produits vendus ne sont pas impliqués dans la déforestation au Brésil.
Le consommateur est volontairement gardé dans le flou, étant impossible pour lui de vérifier l'origine du poulet qu'il achète, en raison du système d'étiquetage complexe et frauduleux.
Macdonald's, Nando's, Tesco, Asda et Lidl ont exprimé leur volonté de signer un nouvel accord international similaire au Moratoire sur le soja en Amazonie promulgué en 2006, interdisant la culture de nouvelles terres pour la production de soja. Cargill s'y est publiquement opposé.
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