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Les chefs d’États et le Covid-19

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Number 10 - Flickr
Écrit par Corentin Mittet-Magnan
Publié le 18 décembre 2020, mis à jour le 18 décembre 2020

Le président français Emmanuel Macron est entré hier dans le club plus très fermé des chefs d’États contaminés par le Covid-19.

 

Depuis hier, l’actualité nous rappelle que personne n’est à l’abri d’une contamination au Covid-19. Emmanuel Macron, testé positif dans la journée de jeudi, est à l’isolement. Plus d’une dizaine de personnes ayant été récemment en contact avec lui ont dû en faire de même. Parmi elles, le chef du gouvernement espagnol Pedro Sanchez, et le Premier ministre portugais Antonio Costa.

Avant eux, bon nombre de chefs d’Etats avaient déjà contracté la pathologie. Parmi eux, le président américain Donald Trump, le Premier ministre britannique Boris Johnson, le président brésilien Jair Bolsonaro, le Prince Albert de Monaco, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian ou encore le président algérien Abdedlmajid Tebboune.

De l'absence totale de symptômes à l’hospitalisation en urgence, tous les combats face à la maladie n’ont pas été les mêmes. L’exercice du pouvoir et l’approche de l’épidémie de chacun ont été influencés dans certains cas par leur propre affrontement du Covid-19.

 

Des leaders covido-sceptiques

Donald Trump, Jair Bolsonaro et Boris Johnson ont beaucoup de points communs. L’un d’entre eux étant la façon dont ils ont minimisé la gravité de la crise du Covid-19.

Au début du mois de mars, Boris Johnson, qui ne voulait surtout pas entendre parler de confinement à l’époque, se vante, lors d’une conférence de presse d’avoir serrer la main à « tous les patients » lors d’une visite dans un hôpital où étaient traités des malades du virus. Quelques semaines plus tard, il est testé positif au Covid-19 et passe, au début du mois d’avril, trois nuits en soins intensifs à l’hôpital.

Au mois de juillet, c’est Jair Bolsonaro qui est testé positif. Depuis le début de l’épidémie au Brésil il avait catégoriquement refusé de porter un masque et avait continué à rencontrer ses supporters sans aucun respect des règles de distanciation. Il restera positif au Covid-19, qu’il considère comme « une grippette », pendant trois semaines. Même son de cloche du côté de Donald Trump, dont la stratégie de lutte contre l’épidémie repose presque uniquement sur l’attente d’un vaccin. Il est testé positif au début du mois d’octobre en pleine campagne présidentielle. Il est hospitalisé dès le lendemain de son test et la communication de la Maison Blanche laissera planer le doute sur la nature de son état de santé.

Parmi ces trois chefs d’État, seul Boris Johnson, sûrement le plus gravement atteint, changera sa stratégie de lutte contre le virus après son expérience de contamination. Il abandonne notamment l’idée d’une immunité collective. Trump et Bolsonaro utiliseront quant à eux le fait d’avoir vaincu le virus comme un argument prouvant leur force. Le président brésilien ira même jusqu’à une sortie homophobe et véritablement honteuse, appelant le Brésil à cesser « d’être un pays de pédés » ayant peur du virus.

Les États-Unis et le Brésil sont aujourd’hui les deux pays les plus touchés par la pandémie. Pour le premier, le bilan s’élève à plus de 310 000 morts, pour le second, le bilan, considéré par les experts comme sous-évalué, est de plus de 184 000 morts.

 

Vacance du pouvoir et flou constitutionnel

Certains des chefs d’États malades du Covid-19 se sont retrouvés, à cause de symptômes importants, dans l’incapacité de diriger leur pays. L’appareil de l’État a parfois réagi de manière efficace avec un dispositif clair permettant d’assurer l’intérim le temps de la convalescence du chef de l’État mais ce ne fut pas toujours le cas.

En l’occurrence, le Royaume-Uni et sa constitution non-écrite n’a pas de dispositif suffisamment explicite. Lors de l’hospitalisation du Premier ministre, une partie de ses responsabilités furent transférées au ministre des Affaires étrangères Dominic Raab. Le Premier ministre était encore consulté sur certains sujet mais c’est bien Raab qui entérinait les décisions « là où c’était nécessaire ». Celui-ci présidait le conseil des ministres ainsi que les réunions de crise dénommées « Cobra ». Selon des experts du droit britannique, les actions de Dominic Raab restaient étroitement surveillées par les membres du cabinet, le premier cercle du pouvoir.

Dans d’autres pays, l’absence du chef de l’État à cause de la maladie mène à un épisode de vacance du pouvoir. C’est le cas en Algérie, pays tristement habitué à ce genre d’épisodes après l’interminable présidence d’Abdelaziz Bouteflika. Le président actuel, Abdelmadjid Tebboune, est hospitalisé en Allemagne à cause du Covid-19 depuis la fin du mois d’octobre. Il n’est réapparu que le 13 décembre dernier dans une courte vidéo publiée sur son compte Twitter dans laquelle il promet de rentrer bientôt en Algérie. Entre-temps, aucune information sur son état de santé n’avait été transmise, laissant planer le doute sur sa capacité ou non à exercer son rôle. La constitution algérienne, dans son article 102, prévoit la possibilité pour le Conseil Constitutionnel et les deux chambres du Parlement de nommer un président par intérim lorsque le chef du gouvernement en fonction se trouve « dans l’incapacité totale d’exercer ses fonctions ». Difficile de savoir quel était le véritable état de santé du président Tebboune mais le flou entretenu autour de son hospitalisation et la longueur de celle-ci donne l’impression d’une « incapacité ».

Enfin, la contamination du chef de l’État par le Covid-19 amène parfois au drame. C’est ce qu’il s’est passé le 13 décembre dernier lorsqu’Ambrose Dlamini, Premier ministre d’Eswatani (anciennement Swaziland), petit royaume d’Afrique australe coincé entre l’Afrique du Sud et le Mozambique, est décédé presque un mois après avoir été testé positif. C’est le vice-Premier ministre Themba Masuku qui assure sa succession pour une période de trois mois. Selon les journaux de la région, la famille royale, qui possède la quasi-totalité des pouvoirs et nomme les responsables politiques, est entrée dans une guerre de clan pour décider de la nomination du successeur d’Ambrose Dlamini.

En France, c’est le président du Sénat Gérard Larcher qui prendrait le pouvoir si Emmanuel Macron ne se trouvait plus en capacité de l’exercer. Nous espérons évidemment que nous n’en arriveront pas à ce stade et lui souhaitons un rétablissement rapide.