En attendant les beaux jours et de pouvoir ressortir en toute liberté, nous aimons vous conter de belles histoires. Celle dont nous vous parlons aujourd’hui commence sur Tinder (oui, c’est possible !).
Si en 1950, les mariages mixtes représentaient 6% des unions célébrées en France, en 2020, les Français sont plus de 15% à s’unir à un compagnon de nationalité étrangère, soit plus d’un mariage sur sept. Entre mélange des cultures et barrière de la langue, comment le couple binational doit-il s’adapter afin de durer dans le temps ? LePetitJournal.com a rencontré Sarah et Brandan, fin mélange franco-anglais et résidents au Royaume de Sa Majesté.
Sarah, peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
Je viens d’avoir 25 ans, je suis Française, originaire de Bordeaux. J’ai déménagé à Londres dans le cadre de mes études de communication pour un semestre en septembre 2020, et je n’ai finalement pas quitté l’Angleterre ! Cela fait 7 mois que j’y suis.
Tu es donc venue en Angleterre pour tes études il y a seulement quelques mois. Quel fut pour toi la chose la plus difficile à appréhender ?
Le « choc » des cultures n’a pas été extrême : mon beau père étant Anglais, j’ai souvent été amenée à aller voir sa famille en Angleterre depuis que je suis petite. C’est plus en emménageant à Londres que je me suis rendue compte des différences, notamment sur la nourriture : c’est vraiment dur de trouver des vrais bons pains au chocolat ici ! Et je ne vous parle pas de la conduite à gauche : encore aujourd’hui par réflexe, je monte du côté du conducteur ! C’est d’autant plus drôle lorsque l’on sait que je n’ai pas mon permis…
Tu as trouvé l’amour à l’étranger. Peux-tu nous raconter ta rencontre avec Brandan ?
Le premier contact a donc été via Tinder : nous avons “matché” pendant que j’effectuais ma quarantaine, dès mon quatrième jour en Angleterre. Au début, nous nous parlions seulement de temps en temps, pas tous les jours. Je parlais avec d’autres garçons, dont un Hongrois que j’ai rencontré avant Brandan. Cela n’a pas vraiment fonctionné. Avec Brandan, « le feeling » passait naturellement, il était force de proposition et c’est finalement ce qui a achevé de me convaincre. Il ne me proposait pas de nous voir l’un chez l’autre mais de découvrir des choses à l’extérieur, marcher, visiter des lieux etc. Un mois plus tard, nous avons donc eu notre premier rendez-vous dans un pub près de Liverpool Street Station. Nous étions vraiment stressés tous les deux, on ne faisait que parler pour essayer de détendre l’atmosphère ! Du coup, nous n’avions pas du tout regardé la carte et la serveuse désespérait de prendre notre commande. Ce qui était compliqué pour moi dans ce rendez-vous, c’était d’abord de le comprendre : il avait un accent très prononcé donc je le faisais beaucoup répéter. Du coup, lui était stressé de ne pas bien se faire comprendre. Mais finalement, nous avons passé la journée ensemble à nous promener et à parler de choses et d’autres et cela devenait de plus en plus facile au fur et à mesure : j’essayais de me concentrer le plus possible et lui faisait des efforts également pour parler plus doucement.
Comment as-tu compris qu’il cherchait une histoire sérieuse ?
Lors de nos premiers rendez-vous, nous n’étions pas vraiment dans la séduction mais vraiment dans l’envie de mieux nous connaître l’un l’autre. C’est vrai qu’en général sur des applications telles que Tinder, nous avons l’habitude des dragueurs un peu “lourds” ou en tout cas assez directs sur leurs intentions. Avec Brandan, ce n’était pas très clair et au début assez déstabilisant, parce que nous nous demandions presque si l’autre était intéressé par autre chose que par une relation amicale ! C’est vraiment ce que j’ai trouvé mignon, il n’était pas dans le calcul, il ne m’a pas brusquée et a pris le temps de me connaître.
Lorsque tu t’es inscrite sur Tinder, avais-tu des critères particuliers ? Recherchais-tu un étranger prioritairement ?
Oui ! J’en avais marre des Français (rires), je voulais vraiment rencontrer quelqu’un qui n’avait pas la même langue maternelle que moi. J’étais déjà inscrite sur Tinder en France, et je n’ai pas eu de bonnes expériences. En plus de cela, j’ai toujours été tentée d’avoir une relation avec un Anglais puisque, grâce à mon beau-père, j’ai été habituée à pratiquer la langue. Comme je le disais, j’ai rencontré un homme hongrois, mais finalement, je crois que je voulais être avec un « vrai British ».
À quel moment as-tu su que ton histoire devenait sérieuse ? N’était-ce pas tout de même un frein de t’engager avec quelqu’un d’une nationalité différente de la tienne ?
Je savais que je devais rentrer en France à la fin du semestre donc en effet, j’étais stressée parce que j’étais clairement en train de m’attacher. Je ne pensais pas sincèrement tomber amoureuse ! Donc il est vrai qu’à un moment, j’ai eu peur pour notre relation, mais cela ne m’a pas freinée pour autant. Je cherchais des solutions à tout prix. J’ai d’abord décidé de rester fêter Noël avec lui et sa famille. J’avais peur de ne pas pouvoir revenir à cause de la situation sanitaire qui empirait… J’essayais, en parallèle de mes cours, de trouver un stage avec une haute gratification pour pouvoir me permettre, au pire, de faire des allers-retours entre la France et l’Angleterre. Et finalement, je me suis dit que j’avais toujours voulu avoir une expérience professionnelle à l’étranger : d’où une motivation pour rester. Autant professionnellement que personnellement, j’avais d’excellentes raisons de vivre en Angleterre : c’était un choix logique, après tout. Et nous voilà aujourd’hui : nous avons emménagé dans notre petit appartement de Southend on Sea à l’Est de Londres. Je ne regrette tellement pas mon choix !
Quelles différences remarques-tu entre vos deux quotidiens ?
Le truc vraiment « so british » que j’ai remarqué, c’est sa consommation de bières ! (Rires). Sinon, lorsque nous prenons le petit déjeuner, ici, c’est toujours salé ! Par exemple du bacon (très important de ne pas l’oublier), des « beans », des œufs, champignons, saucisses… On est loin des viennoiseries à la française !
Aussi, je ne sais pas si c’est un côté particulièrement britannique, mais il a besoin de pouvoir discuter de tout à propos de notre couple, de mettre des mots sur les situations et ce qu’il se passe. Je pense personnellement que cela n’a rien à voir avec le fait qu’il soit Anglais, mais plutôt le fait de ne pas parler la même langue maternelle : il veut toujours s’assurer de s’être bien fait comprendre et d’avoir bien compris. C’est vrai qu’il peut facilement y avoir des quiproquos dans les couples binationaux sans même, parfois, que nous nous en rendions compte. Je pense donc qu’il a ce besoin de tout clarifier du mieux qu’il peut. Je trouve cela vraiment touchant !
Par rapport à la façon de s’exprimer : il peut déjà être difficile d’exprimer des sentiments dans sa propre langue ; n’est-ce pas presque mission impossible dans une autre langue ?
En effet, c’est une conversation que nous avons déjà eue tous les deux, et nous nous sommes dit que finalement cela avait du bon : tu es forcé d’aller droit au but, d’être clair pour être compris, et d’une certaine manière, cela te force à éviter les choses superflues et par conséquent certains quiproquos.
D’un point de vue plus général, penses-tu que l’équilibre que tu as trouvé avec Brandan aurait été plus difficile à trouver avec un homme français ?
Oui, j’en suis même sûre. Quand je repense à mes précédentes relations avec des Français, je pense que ce genre d’aprioris sur la langue nous sert plus qu’il ne nous dessert : chaque phrase que tu prononces est un effort de concentration, donc finalement cela évite les états d’âmes « inutiles » qui peuvent venir polluer une conversation. En plus de cela, nous avons énormément de choses à partager tout le temps, ce qui tue la routine : nous n’avons pas les mêmes habitudes, pas les mêmes accents. Lorsqu’il se met à parler français par exemple, c’est souvent source de grands fous-rires et ce genre d’humour et de « piment » dans le quotidien change tout.
Exprime-t-il la volonté d’apprendre le français ?
Oui ! Il a téléchargé toutes les applications du monde pour s'entraîner parce qu’il doit rencontrer ma famille en juin et il aimerait pouvoir se débrouiller d’ici là. Chaque semaine, il me demande de lui apprendre des mots. Au début je ne savais pas trop par où commencer, mais finalement j’ai décidé de lui faire une liste par thème tous les deux jours ; il essaie ensuite de les dire et de les retenir !
Brandan, en t’inscrivant sur Tinder, pensais-tu rencontrer l’amour et d’autant plus avec une Française ?
Non pas du tout. Je ne cherchais pas vraiment quelque chose de sérieux en m’inscrivant sur Tinder et parfois, j’allais sur l’application sans grand intérêt, juste « comme ça », pour essayer de trouver des discussions intéressantes en espérant le meilleur. Sarah est mon seul « date » Tinder, en réalité ! Alors pour moi, échouer avec des centaines de filles anglaises et avoir du succès avec une belle Française, c’était vraiment une surprise !
Quel est son côté « frenchie » qui t’interpelle le plus ?
Elle mange beaucoup de choses dont je n’avais jamais entendu parler avant, des légumes surtout. Avant de rencontrer Sarah, je ne mangeais que des carottes et des petits pois comme un petit enfant mange son dîner en revenant de l’école (rires). Mais je mange plus varié maintenant, parfois j’aime et parfois moins, même si j’avoue que mes « noodle pot » me manquent. Elle ne sait même pas ce qu’est un « noodle pot » !
Qu’est ce qui te plait le plus chez elle, que tu ne retrouverais pas chez une Anglaise ?
J’adore son accent, et j’aime apprendre le français tous les jours et l’aider à mieux parler anglais également. C’est tellement drôle quand elle dit quelque chose en pensant que c’est la bonne façon de le dire, mais que ce n’est pas le cas ! Une fois, on préparait à manger, et elle m’a demandé « can you rape the cheese please » (littéralement traduit, « peux-tu violer le fromage s’il te plait »). C’était tellement drôle ! (Rires).
C’est aussi très drôle quand elle s’énerve contre moi en français quand je fais quelque chose qui l’ennuie. Elle pourrait dire le pire sur moi et moi, comme je ne le comprends pas, je ris sûrement de ma propre tête !
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