Présenté par Netflix comme "l'événement mondial”, le documentaire de six épisodes sur l’ancien couple fétiche de la monarchie britannique a fait couler beaucoup d’encre. S’il donne lieu à des révélations, “Harry and Meghan” revient surtout sur la belle histoire d’amour maudite qui lie les deux protagonistes.
"Après seulement quatre jours, plus de 28 millions de foyers ont vu les trois premiers épisodes, un chiffre exceptionnel pour une première semaine de sortie de documentaire.", a déclaré Netflix dans un communiqué quelques jours après la diffusion de la première partie du documentaire. Les trois derniers épisodes sont sortis jeudi 15 décembre dernier. Malgré quelques longueurs (six épisodes, c’est beaucoup), la seconde partie donne plus de grains à moudre aux détracteurs de la famille royale.
Collusion entre la famille royale et les médias tabloïds
Un des aspects les plus intéressants et les plus exotiques du point de vue français sur ce documentaire est ce qu’il révèle du lien entre la monarchie et les médias britanniques, dans un contrat presque inébranlable. Les personnes interviewées (amis du couple, experts de la communication, auteurs - tous favorables à leur cause) dans le documentaire le disent plusieurs fois : les membres de la famille royale vivent aux frais du contribuable britannique - ce dernier a alors un droit de regard absolu sur les moindres détails de leurs vies. Aucune intimité qui tienne.
La Royal Rota
Les tabloïds sont, au Royaume-Uni plus qu’ailleurs, de véritables faiseurs d’opinion. Le Sun et le Daily mail combinent les meilleures audiences imprimées et en ligne et observent des lignes éditoriales conservatrices et populistes. Tous deux font partie de la “Royal rota”, c'est-à-dire le groupe de médias ayant des accès privilégiés à la famille royale. Ce sont les seuls autorisés sur les grands événements royaux, qui partagent ensuite les photos et les informations avec les autres médias. Parmi les titres de presse présents on décompte : le Daily Express, le Daily Mail, le Daily Mirror, l'Evening Standard, le Telegraph, le Times et le Sun.
Jalousie et rivalité entre les couples princiers
Deux arguments principaux sont énoncés contre la famille royale et sa collusion avec les médias. Harry et Meghan dénoncent le timing du mauvais traitement des médias envers Meghan à partir du voyage en Australie du couple princier en 2018. Là bas, ils réalisent à quel point ils sont populaires et aimés du public.
Selon Harry et Meghan, c’est le début de la jalousie pour l’autre couple princier (et héritier du trône), William et Kate, avec lesquels les relations ne sont pas au beau fixe depuis leur mariage mais qui semblent à ce moment-là se dégrader. "Le problème, c'est que quand quelqu'un censé occuper un second rôle se marie aussi et vole la vedette, ou fait mieux le job que celui qui est né pour le faire, ça contrarie les gens, ça bouscule l'équilibre", accuse d'ailleurs le prince Harry, dans une attaque à peine voilée à son frère.
Dans les dernières minutes du dernier épisode, une information explosive est révélée dans l’affaire du procès de Meghan Markle contre Associated Newspaper, la société éditrice du Daily Mail, pour atteinte à la vie privée. En 2018, Meghan aurait écrit une lettre privée à son père pour lui demander d’arrêter de parler de leurs histoires intimes à la presse. Cette lettre s’est retrouvée en première page des tabloïds quelques jours après.
Après de longs mois de procès, Meghan remporte son procès mais les tabloïds l’affirment : elle aurait fait exprès de faire fuiter la lettre. Pour preuve ? Un échange de messages avec son attaché de presse de l’époque, Jason Knauf, dans lequel elle évoque une possibilité de fuite de la lettre. Problème : Jason Knauf travaille désormais pour le cabinet du Prince William et selon le couple et son avocate, impossible pour lui d’avoir divulgué ces messages sans l’aval de William.
Meghan Markle martyrisée par les médias et délaissée par la famille royale
Le documentaire ne fait pas d’économie sur les exemples de titres et d’extraits d’émissions plus qu’insultants envers l’ancienne actrice américaine. Les connotations racistes se font de plus en plus virulentes avec les mois qui passent, et sont largement relayées par les médias sur les réseaux sociaux.
Dans le quatrième épisode de “Harry and Meghan”, l’information choc sort : alors que Meghan était au plus mal, et souffrait de pensées suicidaires, la famille royale lui aurait interdit de consulter un professionnel et de suivre une thérapie. Selon elle, les membres séniors de la monarchie étaient inquiets de l’image que cela aurait pu donner de l’institution.
Harry et Meghan, les héros manqués d’une monarchie modernisée
Une bonne partie du documentaire s’attarde sur l’histoire d’amour moderne et fraîche du jeune couple. Ils se sont rencontrés sur Instagram, ont commencé leur relation à distance et dans le secret, incarnent le glamour et le progressisme qui manque quelque peu à la famille royale (et au couple William-Kate).
À une époque où le Royaume-Uni montre des signes de malaise vis-à-vis des populations du Commonwealth, le documentaire insiste sur l’espoir que représentait le nouveau couple princier, pour rétablir le lien qui s’effrite entre la monarchie britannique et le Commonwealth. La révocation d’Elizabeth II par la Barbade en novembre 2021 en est un symbole parlant : une partie importante des pays du Commonwealth ne se reconnaît plus dans la monarchie britannique. En revanche, Meghan et Harry ont connu un accueil plus qu’enthousiaste de ces pays lors de leur visite en 2018 - ils symbolisaient alors l’espoir de la modernité … qui ne verra pas le jour car le couple a quitté la monarchie en mars 2020 (mais conservent pour le moment leurs titres royaux).
Meghan et Harry restent les personnes les moins aimées de la famille royale
Au Royaume-Uni, la popularité de Harry et Meghan a encore chuté juste avant la sortie du documentaire - et continue de chuter depuis la sortie des trois premiers épisodes, alors qu'ils étaient déjà les membres de la famille royale les plus impopulaires après le prince Andrew, au cœur d'un scandale sexuel (l’affaire Epstein) ces dernières années. L’attaque de trop envers la famille royale ?
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