La crise sanitaire a poussé bon nombre de Français à réévaluer leurs choix de vie, parmi eux, la possibilité de vivre à l’étranger. Changer de cadre oui, mais à quel prix ? Est-ce que l’expatriation fait-elle encore rêver les Français ? Témoignages
Le confinement, le télétravail, l’angoisse de la crise sanitaire, autant de raisons pour les Français de réévaluer leur cadre de vie. Mais la question se pose : est-ce que vivre à l’étranger demeure un rêve pour les Français ?
L’expatriation fait rêver… en France !
Une enquête réalisée par SettleSweet, un assistant virtuel de recherche immobilière, révèle que suite au premier confinement 58% des Français interrogés rêvent de vivre et de travailler à l’étranger. Mais quelles sont les destinations les plus prisées ? 31% souhaiteraient quitter la France pour s’installer en Amérique du Nord, 25% en Europe, 17% en Asie et 11% en Afrique. Seuls 8% veulent s’aventurer en Amérique du Sud et 7% en Océanie. La condition sine qua non reste l’obtention d’un emploi sur place. 78% des personnes interrogées n’osent pas franchir le pas par peur de se retrouver sans travail ou dans une situation financière précaire.
Même pas peur de la crise
Malgré certaines réticences, les candidats à l’expatriation sont encore nombreux. A coup de reportages sur ces « Français qui réussissent à l’étranger », les médias tricolores ont fait favorablement évoluer l’image de l’expatrié, autrefois taxé d’exilé fiscal. L’expatriation semble beaucoup plus accessible et pas uniquement dans un cadre de mobilité professionnelle. Bien que contrecarrant certains projets, la crise sanitaire mondiale n’effraie pas tout le monde. Ainsi Hugues nous a confié : « J’ai toujours, si ce n’est autant hâte de m’expatrier et de découvrir de nouvelles cultures une fois mes études terminées en septembre 2021! Restons optimiste ! »
Un message positif partagé par Guillaume : « le Coronavirus a eu pour effet de stopper l'ambition des peuples à se croiser et espérons que cela soit juste temporaire car cela fait du bien à tout le monde, de partager d'autres réalités. »
Kmat se « prépare activement » à une expatriation au Brésil au premier semestre 2021. « Je n'ai aucune réticence malgré les difficultés inhérentes au pays car la France connait désormais au moins autant de "désagréments" que le Brésil ! », nous explique-t-il.
Quand le rêve devient réalité
Et quand on saute le pas, que se passe-t-il ? Pour de nombreux expatriés, le rêve devient une réalité. Ils sont ainsi nombreux à ne pas regretter leur décision. D’après le premier Observatoire de l’expatriation, mené par la Banque Transatlantique, l’Union des Français de l'Étranger (UFE) et OpinionWay, la quasi-totalité des expatriés sont satisfaits de leur expatriation (93 %) et 51% d'entre eux sont même « très satisfaits ». F.J nous l’a également exprimé : « J'ai définitivement quitté Paris et ses beaux quartiers pour m'installer dans un ravissant village à 15mn en métro du centre de Valencia. Quelle bonne idée j'ai eu. Je ne regrette ni Paris ni la France où je retourne en vacances pour revoir les amis. N'hésitez pas ».
Pour Myrtille, expatriée au Royaume-Uni, il faudrait davantage parler de parenthèse enchantée, malheureusement gâchée par le Brexit et la crise de la Covid-19 : « J’aime toujours l’expatriation mais c’est un choix qui a une nouvelle saveur disons les choses. Ça devient plus aigre-doux qu’avant. Il faut rajouter pour ma part le Brexit qui pimente encore plus la sauce. Je vois plus la France comme un pays où je serai rassurée et sécurisée pour une vie familiale. Je vois maintenant l’expatriation comme un avantage si c’est temporaire, une parenthèse d’une année ou deux. Avant je voyais ma vie a Londres et y rester, le covid a changé la donne. »
Pour Hélène en PVT au Canada, la crise a également compliqué cette expatriation tant désirée. « La France me manque plus que jamais. Être dans cette période difficile de pandémie loin de tous ses proches et très compliqué pour moi. Je compte rentrer en France dans quelques mois. Une belle expérience qui doit être écourtée malheureusement… », nous a-t-elle confié.
« L'expatriation ne me fait plus rêver ! »
L’expatriation peut être une belle aventure mais a également ses inconvénients. Comme nous le rappelle Guillaume, expatrié multi-récidiviste (Vietnam, Thaïlande, Maurice et Royaume-Uni), l’expatriation d’aujourd’hui n’a rien à voir avec celle de nos ainés. Il est bien loin le temps des packages expatriés et des avantages à gogo. « A l'époque de mon père, l'expatriation était l'occasion de mieux gagner sa vie, en partant 15 ou 20 ans pour une grande entreprise. Aujourd'hui, depuis que le cost killer intervenant sans cesse dans l'entreprise, l'expatrié passe très souvent par un contrat de droit local, avec le paiement du déménagement et une prime. Cela permet d'attirer une autre population de candidats, plus ouverts et concernés par le pays où ils se rendent. », nous explique-t-il.
Marina a, elle auss,i vécu des expatriations « sous différentes formes - VIA, regroupement familial, puis poste en contrat local - au Sénégal, à Trinité et Tobago et au Maroc ». Elle est de retour en France et a repris « une vie dite "normale", avec un contrat de travail français, une protection sociale digne de ce nom, une vie de quartier, des habitudes, des amis à proximité ». L’attrait de l’ailleurs reste fort mais elle se dit plus prudente : « Parfois l'envie de tout quitter me reprend, elle réapparaît en toile de fond comme un rêve, mais je sais désormais quels en sont les sacrifices, les obstacles, les peurs et le prix. (…) C'est pourquoi avant de retenter une expatriation, ma décision sera mûrement réfléchie. L'expatriation ne me fait plus rêver ! »
Parfois compliquée, parfois décevante, l’expatriation reste tout de même une opportunité à saisir pour bon nombre de Français. L’expatriation offre une ouverture sur le monde sans égale, d’autres opportunités et permet de faire de sa vie toute tracée, un véritable plongeon vers l’inconnu. Mais comme pour tout rêve, le réveil peut parfois s’avérer brutal. La crise sanitaire a pu souligner pour certains les difficultés d’être loin de son pays d’origine et de sa zone de confort. D’après une enquête de Knight Frank, spécialiste de l’immobilier d’entreprise, les expatriés souhaitent rentrer chez eux principalement pour raisons familiales et pour bénéficier d’un meilleur système de santé. Mais si l’amour dure trois ans, qu’en est-il de l’expatriation ? D’après l’Observatoire de l’expatriation, elle dure en moyenne 20 ans. Une question reste pourtant en suspens : combien de belles histoires seront avortées par la crise sanitaire ?