Alors que la crise démographique chinoise fait couler beaucoup d’encre, où en est la démographie hongkongaise ? Depuis la naissance jusqu’à la scolarisation, l’arrivée sur le monde du travail, les finances familiales, la santé mentale… l’expérience familiale à Hong Kong est bien particulière. Quelles sont les pistes explorées par le gouvernement pour agir sur la situation démographique à Hong Kong ?
Quelques chiffres sur la démographie à Hong Kong
D’après les derniers chiffres publiés par le Census and Statistics Department, la fertilité hongkongaise est en chute, elle est passée de 1.080 naissances pour 1.000 femmes en 2018 à 772 en 2021 (ce chiffre exclut les helpers). C’était 5.170 en 1961 et encore 1.360 en 1994. En France, c’était 1.830 en 2020.
Les tendances sur l’âge médian à Hong Kong sont aussi mauvaises (43 ans en 2016, 46 en 2021), le taux de dépendance (personnes de moins de 15 ans ou plus de 65 ans) de 37% en 2016 est passé à 44% en 2021. La population active reste stable (60%). En France, l’âge médian est de 41 ans en 2021 et le taux de dépendance de 36% (17% moins de 15 ans, 19% plus de 65 ans).
Les chiffres chinois, rappelons-le, sont très préoccupants : 1.280 naissances pour 1000 femmes seulement, l’âge médian 38 ans est en hausse, le taux de dépendance de 25% de moins de 15 ans et 21% de plus de 65 ans en 2020 (soit 46% au total). La population chinoise est en baisse.
Les chiffres sur le taux de décès, dans un contexte Covid, sont plutôt déprimants et ne sont pas le sujet d’article.
Combien coûte l’éducation d’un enfant à Hong Kong ?
C’est une question qui est loin d’être taboue à Hong Kong. Elle fait ainsi l’objet d’enquêtes d’opinions. En 2022, il faut 6 millions HKD pour élever un enfant jusqu’à ses 22 ans (la fin des études supérieures) d’après une enquête de la Hang Seng bank. Il faut comparer ce chiffre avec celui de 4 millions HKD, évoqué en 2006 par la sportive Lee Lai-shan sur le même sujet. Il avait alors fait couler beaucoup d’encre et la société avait exprimé des demandes envers le gouvernement d’alors pour améliorer la situation des familles. Certes, on reste exactement sur le taux d’inflation (+50% sur la période) mais le montant actualisé cela montre que la politique familiale a failli, malgré les débats de 2006.
Donner vie coûte entre 70.000 et 300.000 HKD dans une clinique et au minimum 25.000 HKD dans un hôpital en chambre partagée. La maman a droit à 14 semaines de congé maternité depuis 2020, contre 10 auparavant. Le papa a 5 jours, contre 3 avant 2019. Les frais de garde (crèche) et le système scolaire (maternelle) sont payants jusqu’à l’âge de 6 ans. La plupart des familles font appel à une helper, par manque de solution de garde d’après-midi. Après cet âge, les écoles publiques sont gratuites mais les écoles assimilées internationales ou privées sont payantes. Durant toute la période, il n’y a pas de centre social ou centre aéré pour les enfants sortis de classe. Il faut aussi organiser (et payer) des cours de soutien, des cours d’activités extra scolaires (chers), des activités pendant les vacances, etc.
Parents à Hong Kong : quelle aide aujourd’hui et quelles pistes pour demain ?
Les parents se sentent peu soutenus. Au niveau fiscal, le gouvernement prévoit une déduction qui passe de 120.000 à 130.000 HKD par an par enfant.
Une enquête menée en février 2023 par Judy Chan Kapui du New People’s Party et deux associations de défense des familles, rapporte le Top 10 des souhaits des femmes hongkongaises qui pourrait leur faire décider d’agrandir la famille. 88% des femmes souhaitent une déduction fiscale pour l’emploi d’une helper. 87.5% souhaitent une subvention pour les mères de nouveau-nés, et 70% souhaitent une augmentation de l’offre de garde d’enfant. Les attentes envers le gouvernement sont ainsi lourdes.
Quant aux employeurs, ils fonctionnent souvent selon des modèles de société traditionnelle mais encadrés par des lois antidiscriminatoires. Les Hongkongaises sont en effet très éduquées et, s’il faut choisir entre avoir un enfant et avoir une carrière, ce n’est pas toujours l’enfant qui gagne. La même enquête a exploré les souhaits des femmes envers le monde de l’entreprise.
Pour sauter le pas de la maternité, 75% des femmes souhaitent un environnement de travail plus “family-friendly“ avec des horaires de travail plus flexibles.
Côté changement social, les pères font la quasi-unanimité (contre eux !), avec 94% des femmes souhaitant “un mari qui aide à la maison”. Les préliminaires les plus efficaces seraient donc que les hommes se mettent à faire la vaisselle…
Le modèle le plus prometteur est le Japon, avec une natalité de 1.4 enfants par femme contre 0.77 à Hong Kong. D’après le Professeur Paul Yip Siu-fai, expert démographe à l’University of Hong Kong, le Japon est bien plus avancé que Hong Kong.
Le gouvernement japonais est en avance sur Hong Kong en termes d’investissement, de prise de conscience, et de sens de l’urgence
L’expérience des enfants à Hong Kong
S’il est dur d’être parent à Hong Kong, il est aussi dur dur d’être bébé! Le système scolaire y est très concurrentiel et la pression ressentie par les enfants très forte. L’enfant (de plus en plus) unique sur lequel les parents mettent tous leurs espoirs en souffre. L’adolescence est une période difficile, avec un taux de suicide des jeunes (10-20 ans) à Hong Kong très élevé et en hausse : 2.2 pour 100.000 (16 au Japon, 11 aux Etats-Unis). La principale cause identifiée est souvent la difficulté scolaire.
Autre difficulté, l’arrivée sur le monde du travail et la prise d’autonomie. Pour les jeunes Hongkongais, les prix de l’immobilier empêchent l’installation dans son propre chez soi. Coucher sur le canapé n’est pas le meilleur moyen, pour les jeunes couples, de donner vie à leur tour…