Alors qu'à Hong Kong, une marche en faveur des Droits de la Femme a été interdite dans la crainte de possible violences, qu’en est-il de la condition féminine à Hong Kong ?
Le 8 mars, Journée Internationale des Droits de la Femme
Tout d’abord un peu d’histoire, la Journée Internationale des Droits de la Femme fut officialisée en 1977 par les Nations Unies. L’initiative naît au sein de l’Internationale ou plus précisément dans le parti socialiste américain en 1908. En 1910, le Danemark suit la tendance américaine et institue lui aussi une journée nationale des droits de la femme. En France, un an plus tard, la date choisie pour ce jour est le 19 Mars, jour alors commémoratif de la commune de paris. Pendant les guerres mondiales, le jour des droits de la femme devient symbole de protestation. Aux alentours du 8 mars les femmes organisent des manifestations et des rallyes pour réclamer leurs droits. Depuis 1977 et l’adoption du 8 Mars comme journée symbole par tous les signataires du traité des Nations Unies, l’organisation cherche l’amélioration de la condition féminine à l’international.
Qu’en est-il de la place de la femme à Hong Kong ?
Les chiffres sur le genre recensés à Hong Kong restent articulés autour d’une définition binaire ; à Hong Kong et dans le cadre de la discussion autour de la condition féminine ce volet d’analyse sera utilisé. Les femmes restent majoritaires à Hong Kong représentant 54,3% de la population pour 45,7% d’hommes.
La place de la femme dans la société hong-kongaise suit les codes culturels chinois.
Dans l’héritage religieux (bouddhiste, taoïste, protestant et catholique) ou culturel (chinois et britannique) la place de la femme dans l’esprit traditionnel est au foyer en « propriété » de l’homme, qui se doit de se désintéresser des sphères d’importances sociétales. Les mœurs ont évolué depuis mais la perception reste la même, la femme est épouse, mère et « inférieure ». Les parents préfèrent un fils et l’absence de système de retraite entretien ce stéréotype. En effet le fils prend traditionnellement en charge ses parents et la fille les parents de son époux.
Le mariage est un code culturel clé. Les femmes peuvent se marier dès 20 ans et les hommes doivent attendre 21 ans (contre 22 en chine continentale), là où la majorité reste à 18 ans. Cela prédispose la femme à être épouse plus tôt dans sa vie. Le divorce est toujours mal vu par les mœurs mais est légalement beaucoup plus facile et n’est plus synonyme de la répudiation féminine. En cas de divorce avec enfants la garde est souvent accordée à la mère sans pension alimentaire car la loi ne l’envisage pas.
La situation de la femme évolue pour le mieux car reconnu par les accords internationaux et les travaux nationaux comme une urgence sociale. Le développement et le travail du parti communiste chinois a grandement favorisé l’évolution de la place de la femme en chine continentale et par extension à Hong et Macao.
Quels progrès légaux pour la condition féminine à Hong Kong ?
L’amélioration de la condition féminine à Hong Kong est en forte corrélation avec le développement économique de la région post seconde-guerre mondiale, car les femmes étaient alors majoritaires dans les usines. En 1970, l’ordinance d’emploi offre le congé maternité. En majorité les évolutions des droits des femmes ont été déclenchées par des initiatives gouvernementales dans les 70-80s avec la coopération des entreprises privées. En 1972 des femmes entrent la politique Hong-Kongaise dans le Legislative Council. Depuis, des améliorations de ces changements historiques ont eu lieu comme des lois pour protéger les femmes d’harcèlement sur leur lieu de travail ou légalisent l’avortement (1981).
L’égalité des genres dans l’éducation
L’éducation féminine est la vedette des initiatives Hong Kongaises avec un nombre d’étudiantes en licence en études supérieures surpassant celle de leurs homologues masculins. Cependant en matière de majeures le stéréotype des « domaines féminins » comme l’art, les sciences sociales ou l’aide à la personne restent entre 60 à 80% étudiés par des jeunes femmes.
Cependant l’écart hommes-femmes en termes d’individualité persiste toujours. Si le taux d’alphabétisation pour les filles de plus de 15 ans avoisine les 80%, ce qui place Hong-Kong non loin de la moyenne mondiale (83% d’après la Banque Mondiale), l’écart garçon fille est toujours présent quand près de 85% des garçons bénéficient d’une meilleure éducation.
Globalement Hong Kong reste un des leaders de l’éducation féminine en Asie et les efforts pour améliorer cette dimension sociétale sont globalement productifs.
Inégalités dans l’emploi à Hong Kong
L’emploi à Hong-Kong reste inégalitaire et dur pour les femmes. Les femmes Hong-Kongaises ne représentent que 49,6% des travailleurs en 2020, mais 2 fois plus de femmes que d’hommes sont inactives professionnellement.
Mais les hautes fonctions restent fermées aux femmes. Parmi la globalité des postes de managers, CEO et toutes positions prestigieuses, seulement 35,5% sont occupés par des femmes. Cela limite la représentation féminine dans la sphère élitiste. Dans le secteur public le chiffre tombe à 30%. Un chiffre encore trop bas mais qui par soucis de contextualisation est similaire à celui de l’Australie, de Singapour et supérieur à celui du Japon par exemple.
La sphère politique est la plus masculine, avec seulement 5 femmes sur 32 membres du Conseil Exécutif. Hong Kong est bien derrière ses voisins en termes d’inclusion féminine en politique, plus bas que la Chine (25%), l’Australie (28,7%) ou Singapour (23%). Dans le Comité d’Election, seulement 190 membres sur 1 160 sont des femmes (soit moins de 17%).
Quant à l’écart de salaire entre hommes et femmes, Hong Kong n’est pas une exception et suit le révoltant 30% d’écart des autres pays. En 2020, le salaire mensuel médian d’une femme était autour HK$15,000 (1.794€) contre HK$20,000 (2.392€) pour les hommes, soit un quart inférieur.
La place de la mère dans la société hongkongaise
Héritée d’une culture conservatrice, l’inégale division des tâches ménagères et de la parenté persiste. En effet, parmi un échantillon de personnes sans emploi (étudié par le centre de statistique officiel du HKSAR), près de 16 fois plus de femmes affirment ne pas rechercher d’emploi rémunéré pour répondre à des obligations ménagères. Cela est dut au fait qu’en 2021, seulement 17% des entreprises respectent des mesures encourageant la famille. Le congé maternité est difficile d’accès (seulement 10 semaines) et 1 femme sur 5 à Hong Kong aurait connu de la discrimination liée à sa grossesse sur son lieu de travail d’après une étude menée en 2016. D’après The Women’s Foundation of Hong Kong, de ce fait, 30% des femmes abandonnent leurs carrières après leur première grossesse pour devenir femme au foyer. Plus de la moitié des employeurs assument la discrimination à l’emploi des mères affirmant préférer une employée sans enfants et célibataire.
Crimes contre les femmes et violences sexuelles à Hong Kong
La Hong Kong Police Force reporte avoir condamné 80 viols et environ 1200 cas de violences conjugales en 2020. Cependant la réalité de la criminalité envers les femmes serait plus profonde et plus fréquente que déclarée par la police d’après une étude publiée en 2021 par la Hong Kong Women's Coalition on Equal Opportunities et l’Université de Lingnan. 37,54% des répondantes à leurs questionnaires affirment avoir subi des violences sexuelles. 26,37% ont été victimes de leur partenaire et 93% des agresseurs étaient des hommes. Hong-Kong bénéficie l’un des taux mondiaux les plus bas en termes de viols et féminicides. Cependant seulement 40% des victimes ont demandé de l’aide post-agression souvent sans succès. Ces statistiques représentent une dure réalité des crimes sexuels à l’encontre des femmes. Cela est dut au fort tabou de la sexualité féminine et au manque de protection pour la femme. Les ressources sur les féminicides quant-à-elles, à Hong Kong sont dangereusement limitées et l’appellation n’est pas reconnue légalement par la police de Hong Kong. D’après l’experte mondiale en féminicides Hava Dayan, 38 cas ont été recensés à Hong Kong entre 2015 et 2019.
Mentions spéciales aux associations qui se battent pour les droits de la femme à Hong Kong
Si les améliorations restent à explorer, des ONGs, ou des organisations diverses accompagnent les femmes à Hong Kong. The Women Foundation à Hong Kong est particulièrement active, produisant un travail d’analyse remarquable et organisant divers évènements pour encourager l’empowerment féminin. De la jeunesse aux entrepreneurs en passant par la technologie, TWF est très active. Sinon, Menstruaction se bat pour briser les tabous autour de la menstruation. Mother’s Choice accompagnent les jeunes femmes dans le conseil pour leur grossesse, comment la terminer ou la prendre en charge. Women helping Women aide les victimes de violences sexuelles et protègent les femmes vulnérables.
Manifestation interdite ce 8 mars 2023 à Hong Kong
Une marche de protestation en faveur des Droits des Femmes, prévue dimanche dernier par The Hong Kong Women Worker's Association en amont de la journée internationale du 8 mars, a été finalement interdite par la police, au chef que celle-ci était susceptible d'entrainer des épisodes de violence. Depuis la reprise en main de la contestation à Hong Kong dans le cadre des Lois de Sécurité Nationale de 2020, les rassemblements faisant figure d'opposition aux politiques gouvernementales sont la plupart du temps interdits. Le dernier épisode en date est l'arrestations d'opposants venus manifester leur soutien lors de la comparution au tribunal de 47 démocrates dont les principaux leaders des manifestations qui ont agité la ville entre 2019 et 2020. La plupart l'ont été pour "non port du masque". Rappelons que les crimes de "sédition", "terrorisme", "collusion avec les forces étrangères" et "sécession" sont passibles de peines allant jusqu'à la prison à perpétuité.