Avec un sac sur le dos et leur visa en poche, des milliers de jeunes parcourent chaque année le monde en mode “backpack”. Plus qu’une façon de voyager, c’est un mode de vie, une quête de liberté et de rencontres. Mais derrière les clichés de l’errance sans attaches, combien préparent méticuleusement leur itinéraire, économisent des mois, ou affrontent la solitude à l’autre bout du monde ? De la cueillette de kiwis en Nouvelle-Zélande aux plages d’Indonésie, en passant par le Vietnam, Margaux et Louise, deux amies parties plusieurs mois sur les routes, nous déconstruisent les fantasmes du backpacking.


Partir des mois à l’autre bout du monde, vivre avec peu, improviser ses étapes et s’ouvrir à l’inconnu…Voici l’essence du backpacking, une forme de voyage itinérant qui séduit de plus en plus de jeunes. C’est le cas de Margaux, 25 ans, en école d’ingénieur, et Louise, 24 ans, étudiante en STAPS, qui ont sauté le pas en pleine année de césure. Elles ne se connaissaient pas au départ, mais se sont rencontrées dans les champs de kiwis de Nouvelle-Zélande, où elles travaillaient pour financer leur voyage, puis ont poursuivi leur périple en Indonésie et au Vietnam, sac sur le dos. Après huit mois de voyage à l'autre bout du monde, les deux jeunes femmes partagent avec Lepetitjournal.com leur expérience du terrain et lèvent le voile sur les idées reçues les plus tenaces autour du backpacking.

« La liberté et l’improvisation font partie de l’expérience »
Intox : on peut partir en backpack du jour au lendemain
L’image romantique du backpacker qui claque la porte de son bureau pour s’envoler vers l’inconnu dès le lendemain est souvent fantasmée. Mais si « la liberté et l’improvisation font partie de l’expérience », souligne Margaux, dans les faits, très peu de voyageurs partent sans un minimum d’organisation. « On entend souvent que le backpack, c’est juste prendre un billet d’avion et partir. Mais en réalité, j’ai mis des semaines à me préparer », poursuit-elle.
Avant de décoller pour la Nouvelle-Zélande, elle a notamment dû gérer des formalités administratives (visas, assurance, permis de conduire international), économiser plusieurs mois et planifier ses premiers points de chute. « Rien que pour travailler dans les champs, il fallait un numéro fiscal néo-zélandais et un compte en banque local, donc ça ne s’improvise pas », ajoute Louise. Mais cela ne veut pas dire que tout est figé une fois sur place. « Nous avons réservé beaucoup de choses au dernier moment. Et parfois, nous changions de plan du jour au lendemain », concède Margaux. Mais cette souplesse n’est possible que si l’essentiel a été préparé en amont.
Les ressources pour préparer son voyage
Avant de tout plaquer pour partir avec son sac à dos, mieux vaut s’informer. Pour éviter les mauvaises surprises, deux sites se démarquent pour préparer un séjour de longue durée à l’étranger. Le Guide du Routard consacre une rubrique complète à la préparation d’un voyage en prenant en compte les formalités administratives, la santé, le budget ou l’équipement. Tout y est expliqué de manière claire et accessible. Une autre ressource précieuse est le blog de Chapka Assurances, spécialisé dans les voyages au long cours. On y trouve de nombreux témoignages concrets, des conseils actualisés sur les visas vacances-travail (PVT), et des astuces pour travailler à l’étranger ou limiter les frais.

« Je n’avais vraiment personne pour me réconforter »
Info : on se sent souvent seul
Le sentiment de solitude est une réalité du voyage en backpack. Margaux et Louise ne se connaissaient pas avant de partir et se sont rencontrées en Nouvelle-Zélande, dans des exploitations agricoles. Mais l’itinérance permanente, les lieux isolés, les longues heures de route ou de travail épuisant participent à un sentiment important de déconnexion selon elles. « En Nouvelle-Zélande, quand je me retrouvais seule au volant après dix heures de cueillette sous la pluie, je n’avais vraiment personne pour me réconforter », se souvient Margaux.
Et si les rencontres sont nombreuses et intenses, dans les auberges, les bus, les excursions ou les fermes, elles sont bien souvent éphémères. « Nous croisons plein de gens, c’est enrichissant, mais nous ne nous attachons pas vraiment puisque chacun poursuit sa route à un moment donné. Ça peut devenir frustrant », explique Louise. « Au début, on garde contact avec certaines personnes mais après quelques jours c’est terminé, et nous n’avons plus jamais de nouvelles. Ça renforce beaucoup le sentiment de solitude. » L’éloignement géographique joue aussi un rôle central dans ce ressenti. En Asie, les deux amies ont particulièrement senti le poids de la distance. « Nous étions très loin, avec 12h de décalage horaire. Même un appel avec la famille ou les amis est compliqué », se souvient Louise, qui n’avait des nouvelles de ses proches « qu’une ou deux fois par semaine maximum ».

Intox : le backpack pour une femme, c’est dangereux
Partir seule à l’autre bout du monde en tant que femme a de quoi en inquiéter plus d’un. Pourtant, si Margaux et Louise avaient un léger stress avant de décoller, elles précisent qu’en « Nouvelle-Zélande, nous nous sentions hyper libres, nous dormions dans notre van n’importe où ». Un sentiment moins présent en Indonésie, où elles « évitaient de sortir seules le soir », précisent-elles. Mais leur vigilance n’était pas spécialement liée à leur genre, plutôt au simple fait d’être des voyageuses étrangères. « Dans certains coins, homme ou femme, il faut faire attention. Ce n’est pas une question de genre, mais de contexte local », nuance Louise, qui explique que les agressions ou les vols peuvent toucher « n’importe qui ».
The Sorority : ne plus jamais se sentir seule en voyage
Pensée initialement comme un réseau d’entraide entre femmes, mais utile aussi pour les hommes, The Sorority est une application gratuite, créée par la française Priscillia Routier-Trillard, qui permet d’agir vite en cas de danger ou d’inconfort. En un clic, vous pouvez lancer une alerte et l’application localise les 50 utilisateurs les plus proches, sans limite géographique. En moins d’une minute, une dizaine de contacts sont établis, par message ou appel téléphonique. L’objectif est de créer un lien humain immédiat pour écouter, rassurer ou prévenir les autorités si vous le demandez. Une application indispensable, surtout lorsque l’on voyage loin, dans des environnements parfois sensibles et imprévisibles.
« Nous choisissions bien nos hébergements, mais pas plus qu’un homme solo aurait dû le faire »
Elles soulignent que la prudence faisait partie du quotidien, sans tomber dans la paranoïa. « Nous faisions attention, comme tout touriste raisonnable le ferait. Nous évitions certains quartiers la nuit, nous choisissions bien nos hébergements, mais pas plus qu’un homme solo aurait dû le faire », explique Margaux. « En Indonésie surtout, beaucoup de monde semblait surpris lorsqu’ils apprenaient que nous voyagions sans homme », se souvient-elle. En près de huit mois dans trois pays différents, Margaux et Louise n’ont alors pas rencontré le moindre problème sexiste. Au contraire, Margaux affirme que « les voyageurs et les locaux sont souvent plus gentils et attentionnés avec nous qu’avec un groupe d’hommes ».

Intox : voyager en sac au dos, c’est pas cher
Voyager en tant que backpackeuses ou en vanlife est bien souvent moins cher que les types de voyages plus classiques, mais ce n’est pas pour autant donné. En Nouvelle-Zélande, Margaux et Louise ont très vite compris que pour rester plusieurs mois, il fallait travailler. « Après l’achat des billets d’avion, j’ai acheté une voiture aménagée pour découvrir l’île du Nord. Mais pour l’acheter, financer l’essence, la nourriture et les campings, j’ai travaillé deux mois dans les champs de kiwis, quasiment sept jours sur sept. C’était super dur physiquement, mais obligatoire pour pouvoir être autonomes », raconte Margaux.
Les deux femmes estiment alors leur budget moyen mensuel à « environ 1.000 euros. Mais pour certaines personnes que nous rencontrons, c’est parfois plus ». Si en Asie du Sud-Est les prix sont plus abordables, le budget reste un sujet sensible. « Nous dépensons moins, mais à force d’enchaîner les transports, les hébergements, les visites et les restos, nous pouvons vite perdre le contrôle », souligne Louise.

« Nous ne pouvons pas dire que nous avons voyagé écolo »
Info : voyager, même en backpacking, est polluant
Le backpacking a longtemps été perçu comme une forme de voyage plus responsable que le tourisme classique. Pourtant, l’impact environnemental d’un périple en sac à dos, souvent ponctué de vols intercontinentaux et de déplacements motorisés, interroge de plus en plus. Margaux et Louise, parties près de huit mois entre la Nouvelle-Zélande, le Vietnam et l'Indonésie, assument que ce mode de voyage « est un peu contradictoire ». Elles expliquent notamment que si le but était de « vivre proches de la nature », elles possédaient chacune « un pick-up qui consommait près de 13 litres aux 100 kilomètres » en Nouvelle Zélande.
Le bilan est même pire côté avion, avec six vols pris au total, dont un aller-retour Europe-Asie et plusieurs trajets internes. « Nous avons essayé de regrouper nos trajets, mais parfois il n’y avait pas d’alternative réaliste sans avion. Et puis, nous ne voulions pas nous priver », confesse Margaux. Mais les deux jeunes femmes affirment avoir tenté d’adopter des gestes plus responsables au fil du voyage en achetant des gourdes réutilisables, en limitant l’utilisation de plastiques ou en consommant local. « Le backpack nous apprend à vivre avec peu, et ça, c’est un déclic pour consommer autrement », ajoute Margaux, bien consciente de ses contradictions. « Nous ne pouvons pas dire que nous avons voyagé écolo. Nous avons certainement consommé plus en un an qu’un Français sur plusieurs années », avoue-t-elle.
Les 5 conseils pour bien préparer sa vie nomade

Préparer l’imprévu en se signalant auprès du consulat
Lorsque l’on part en voyage, surtout pour une longue durée ou dans des zones éloignées, l’on pense souvent à la logistique, au budget, à l’itinéraire, mais rarement à se signaler auprès des autorités françaises. Pourtant, deux services gratuits peuvent vous venir en aide en cas de problème. Le Fil d’Ariane, proposé par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, permet d’indiquer les dates et lieux de séjour à l’étranger. En cas de catastrophe naturelle, crise sanitaire, attentat ou autre situation d’urgence, l’ambassade ou le consulat peut ainsi localiser et contacter rapidement pour informer ou porter assistance. Il est aussi possible de s’inscrire au registre des Français établis hors de France si le séjour dure plus de six mois, afin de faciliter certaines démarches comme le renouvellement de papiers, le vote à distance, ou l’accès à l’aide consulaire en cas d’imprévu.
Pourquoi faut-il absolument vous inscrire sur le registre des Français de l'étranger ?
Si les conseils et l’expérience de Margaux et Louise peuvent être d’une grande aide pour de futurs backpackers, ils ne sont pas universels. Loin de vouloir dresser un portrait figé du backpacking, Margaux et Louise partagent avant tout leur réalité, avec ses joies, ses limites et ses contradictions. « Nous pouvons raconter ce que l’on veut mais un autre backpacker peut dire tout le contraire, en ayant voyagé dans les mêmes endroits », glisse Margaux. Car au fond, il n’y a pas de mode d’emploi du bon backpacker, il s’agit avant tout d’une expérience personnelle, qui ne se juge qu’en la vivant.
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