Des étudiants cambodgiens et étrangers analysent les moyens de mettre en œuvre une nouvelle technique d'économie d'eau qui peut permettre aux agriculteurs de cultiver du riz pendant la saison sèche, lorsque cette ressource se fait rare. Les recherches ont débuté en 2020 et sont menées dans le district de Santuk de la province de Kampong Thom par l'Institut cambodgien de recherche et de développement agricole.
L’AWD, une nouvelle technique d’irrigation prometteuse
Les étudiants se sont concentrés sur une technique appelée "Alternate wetting and drying (AWD)" (Alternance d'humidification et de séchage), déjà utilisée dans d'autres pays d'Asie du Sud-Est comme les Philippines.
Elle consiste à alterner des périodes d'inondation et des périodes de sécheresse en surface afin d'économiser un maximum d'eau dans le processus de culture du riz.
Selon les principes de l'AWD, les agriculteurs n'inondent plus leurs champs pendant une période prolongée. Au lieu de cela, ils recouvrent leurs cultures d'eau une fois tous les cinq jours et attendent que l'eau descende de 15 centimètres sous la surface avant de l'arroser à nouveau.
Grâce à plusieurs tuyaux de 30 centimètres - en PVC ou en bambou - plantés dans la rizière, l'humidité du sol est toujours contrôlée et maintenue, afin de garantir une hydratation suffisante du riz pour lui permettre de pousser.
Si elle est appliquée correctement, cette technique peut réduire la consommation d'eau de 25 à 30 % par rapport à l'inondation permanente des rizières, qui reste la technique la plus utilisée dans de nombreux pays producteurs de riz.
Au Cambodge, cette méthode agricole pourrait ouvrir la voie à une production de riz à plus grande échelle pendant la saison sèche, qui, aujourd’hui, reste faible par rapport aux cultures de la saison des pluies. Elle peut également devenir un nouveau moyen pour les agriculteurs d'améliorer leurs moyens de subsistance.
Des résultats encourageants
Outre l'alternance de cycles d'inondations et de sécheresses superficielles, les étudiants utilisent du charbon de bois ou des cosses brûlées comme couverture sur le sol pour en préserver l'humidité. Ils ont également essayé d'utiliser principalement des engrais naturels afin d'augmenter les rendements tout en empêchant les produits chimiques de pénétrer profondément dans le sol.
D'après les résultats préliminaires, la technique a permis de réduire la consommation d'eau de 24 à 30 % dans les zones étudiées par rapport à l'irrigation traditionnelle, a indiqué Ket Pinnara, professeure à la faculté d'hydrologie de l'Institut de technologie du Cambodge et cheffe du projet de recherche.
L’expérimentation sera achevée avant la fin de l'année 2023 et, si les résultats finaux sont concluants, le projet sera ensuite mis en œuvre dans d'autres provinces et régions où l'eau fait défaut, a déclaré Lai Chenda, une doctorante participant à l'étude.
Elle ajoute que les première et deuxième phases de l’étude ont montré que certaines variétés de riz étaient moins fructueuses avec la technique AWD que celles plantées selon les méthodes traditionnelles.
Néanmoins, d'autres variétés comme OM 54, OM 51, Phka Rumduol et Sen Kraob donnent des rendements plus élevés grâce aux techniques d'économie d'eau.
Vers une agriculture assistée par la technologie
Pour mieux suivre leur étude, les chercheurs ont utilisé des drones pour collecter des données sur l'humidité du sol et la vitesse de croissance du riz, en la comparant aux pratiques de culture traditionnelles.
Ils ont également créé une application permettant aux agriculteurs d'entrer des données sur le type de sol et les variétés de riz qu'ils ont planté. Les fonctions spéciales de l'application les informeront du moment où ils doivent arroser leurs champs ou appliquer des engrais - idéalement organiques.
Le développement de l'agriculture assistée par la technologie dans les provinces du pays pourrait contribuer à maintenir la souveraineté alimentaire du Cambodge, alors que l'arrivée de la saison sèche se traduit généralement par une baisse de la production de riz dans le pays.
Cela peut également permettre de réduire les coûts de production. Actuellement, lorsque l'eau manque, les agriculteurs doivent souvent payer pour transporter l'eau jusqu'à leurs champs ou acheter de l'essence pour pomper l'eau du sol. La recherche de nouvelles techniques agricoles peut donc aussi être bénéfique pour leur portefeuille.
"C'est une bonne chose pour ceux qui vivent dans des régions où l'eau est rare", a déclaré la jeune doctorante Lai Chenda, ajoutant que la mise en place de cette nouvelle technique ne nécessite pas de gros investissements de la part des agriculteurs.
L'expérimentation est le 20e sous-projet d'un ensemble plus vaste d'études portant sur les techniques d'irrigation économes en eau. Outre les chercheurs cambodgiens, six étudiants en master de l'Université de Liège-AgroBioTech en Belgique y participent.
Chhum Chantha
Écrite à l'origine en khmer pour ThmeyThmey, cette histoire a été traduite par Torn Chanritheara pour Cambodianess.
Avec l'aimable autorisation de Cambodianess, qui a permis de traduire cet article et ainsi de le rendre accessible au lectorat francophone.
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