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BUCAREST CENTENAIRE - Le palais Cotroceni, un conte de fées

L’histoire du domaine de Cotroceni semble suivre une vieille tradition nationale. Il remonte à une époque aujourd’hui révolue, lorsque la Valachie se trouvait encore sous le règne du prince Șerban Vodă Cantacuzino. Le monastère, dédié à l’Assomption de la Vierge, en constituait la pierre angulaire. Sur ordre du roi Carol Ier, l’architecte de la Cour royale, Paul Gottereau, érigea autour de ce sanctuaire un palais princier monumental. Même si plus d’un siècle s’est écoulé depuis la Grande Union de 1918, le Palais Cotroceni demeure la résidence des dirigeants de la Roumanie unifiée, qu’ils soient monarques ou présidents.

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Wikimedia / Alexandru.Kocsis
Écrit par Bucarest/Centenaire
Publié le 4 novembre 2025, mis à jour le 5 novembre 2025

Sous la coupole de l’église fondée par le prince Șerban Cantacuzino resplendissait l’or de l’Empire byzantin. Les arabesques, une douzaine de colonnes de pierre et les célèbres icônes du peintre Pârvu Mutu composaient un ensemble d’une rare harmonie. Autour du sanctuaire s’élevaient les cellules des moines, le cabinet du prieur et le clocher. L’ensemble dominait alors la colline de Cotroceni, veillant sur la cour seigneuriale installée dans la vallée. Plus tard, le domaine passa entre les mains du voïévode Constantin Brâncoveanu, qui sut en faire un haut lieu artistique et culturel. Transmis de génération en génération, il entra finalement dans le patrimoine de l’État peu après l’Union des Principautés roumaines, en 1859.

Le peuple roumain, et plus encore les habitants de Bucarest, doivent au roi Carol Ier plusieurs joyaux architecturaux, dont le Palais Cotroceni. Les anciennes demeures seigneuriales furent démolies pour faire place à la future résidence du prince héritier Ferdinand et de la princesse Marie. Les travaux commencèrent dans les dernières années du XIXe siècle, d’après les plans de l’architecte français Paul Gottereau, adepte du langage néoclassique. Contre toute attente, le Palais Cotroceni se distingue par un éclectisme raffiné, inspiré des modèles de l’Europe occidentale. Ce n’est qu’après la Première Guerre mondiale que s’y imposèrent des éléments du style néo-roumain : l’architecte Grigore Cerchez ajouta alors, dans l’aile nord, un porche et deux terrasses évoquant le vieux style brâncovenesc.

Chaque pièce du palais semble imprégnée de la personnalité de la jeune princesse Marie. Elle confiera plus tard, dans ses mémoires, qu’elle rêvait depuis l’enfance de créer des résidences idéales, des « icônes fières de son âme ». Dans la biographie que lui consacre l’écrivaine américaine Hannah Pakula, le Palais Cotroceni apparaît comme un conte oriental teinté de modernisme. Qu’il s’agisse d’inspirations byzantines, Renaissance ou Art nouveau, le cadre domestique de la reine Marie restait toujours théâtral. Elle aimait les plafonds à caissons, les murs aux reflets dorés et aux tonalités chaudes. Sculptures, bossages et chapiteaux reproduisaient des motifs végétaux, reflet de son amour profond pour la nature. Partout foisonnaient les fleurs : vases sur les tables, jardinières massives au sol. Les meubles dorés de style Louis XVI étaient réalisés en bois de tilleul, d’orme ou d’ébène ; s’y ajoutaient statuettes de jade, cheminées de marbre, peaux d’animaux, oreillers de soie brodés à la main, chandeliers de cristal et tableaux encadrés de métaux précieux.

Parcourir le palais d’un bout à l’autre, c’est comme lire un testament d’amour et de beauté. Avant sa mort, la reine Marie confiait au peuple roumain :


« J’ai embelli les lieux où il m’a été donné de vivre.
Si toutes ces belles choses te rappellent un peu de moi,
alors je serai pleinement récompensée pour tout l’amour que je t’ai donné,
car la beauté a été mon credo. »

Ana-Maria Roșca

 

Article réalisé dans le cadre du Programme Culturel București - Centenar avec le soutien de Primăriei Municipiului București à travers Administrația Monumentelor și Patrimoniului Turistic 

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