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Restructuration ou procédure collective

Les entreprises roumaines entre défis du marché et solutions de survie.

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Écrit par Juridique
Publié le 18 septembre 2024, mis à jour le 19 septembre 2024

L'économie roumaine est confrontée à des défis majeurs, d’origine aussi bien interne qu’externe : instabilité législative, pénurie de main-d'œuvre, inflation, manque de compétitivité et accroissement des écarts entre les entreprises, en raison d'un accès inégal aux ressources d'innovation et de développement technologique. Dans ce contexte, de nombreuses entreprises roumaines ressentent une pression financière de plus en plus forte, les obligeant à réévaluer leur mode de fonctionnement. Dans les cas les plus extrêmes, cela peut aussi les placer face à un choix fondamental : restructuration ou procédure collective.

La restructuration peut prendre la forme d'un accord de restructuration ou d'un concordat préventif. Ces solutions offrent une chance de redressement, via la réorganisation des dettes et l’optimisation des opérations, aux entreprises qui ne sont pas encore en état d'insolvabilité, mais qui ont besoin d’un effort financier et managérial substantiel.

La réorganisation, qui implique l'entrée de l'entreprise en procédure collective, est une solution plus radicale, nécessitant des compromis significatifs, tels que la perte du contrôle sur l'entreprise, l’atteinte à la réputation et parfois même la faillite. Pourtant, cette option reste malheureusement bien plus courante.

Sont détaillés ci-après quelques éléments clés de ces procédures, selon la Loi no 85/2014 relative à l'insolvabilité et à la prévention de l'insolvabilité.

La restructuration pour éviter la procédure collective

Selon la loi no 85/2014, les entreprises en difficulté financière peuvent recourir à la restructuration par deux procédures : l'accord de restructuration et le concordat préventif, que le législateur désigne comme des « procédures de prévention de l'insolvabilité ».

Que ce soit par l'accord de restructuration ou par le concordat préventif, l’entreprise soumet à l’approbation des créanciers un plan de restructuration pour éviter une future procédure collective. Ainsi, bien qu’elle puisse encore honorer ses obligations actuelles, elle risque de ne plus le pouvoir à l'avenir sans des actions correctives.

Dans le cadre de cette procédure, le débiteur désigne un administrateur de restructuration / concordataire, choisi parmi les praticiens agréés en la matière.

L’administrateur de restructuration / le concordataire agit pour :

  • Vérifier et constater l’état des difficultés de la société ou élaborer le rapport sur l’état des difficultés de celle-ci, selon le cas :
  • Rédiger ou selon le cas assister le débiteur dans l’élaboration du plan ;
  • Assister la société ou, selon le cas, négocier le plan de restructuration et prendre des mesures pour résoudre à l’amiable tout litige entre le débiteur et les créanciers, ou entre les créanciers ;
  • Surveiller l'exécution des obligations du débiteur dans le cadre du plan de restructuration.

L'accord / plan de restructuration est voté sous certaines conditions par les créanciers.

Il présente la composition du patrimoine du débiteur (actifs, passifs et leur valeur) ainsi qu'une analyse de sa situation économique, incluant les causes des difficultés rencontrées. Le plan liste les créances, en distinguant celles affectées par le plan, avec le degré de remboursement prévu, et celles non-affectées, avec les raisons de leur exclusion. Il traite également les créances en litige, sans que cela signifie une reconnaissance des droits litigieux.

Un exposé des motifs, validé par l’administrateur / le concordataire, doit démontrer comment le plan prévient l'insolvabilité et assure la viabilité de l’entreprise.

Les mesures de restructuration proposées peuvent inclure la réorganisation des activités, la modification des actifs ou passifs, la valorisation des actifs, la fusion, la scission, ou encore la modification du capital social par augmentation ou conversion de créances en actions.

Le plan doit préciser les modalités de consultation des représentants des salariés et l’impact sur l’emploi (licenciements, suspension des contrats, réduction du temps de travail). Il doit également inclure, entre autres, un budget prévisionnel, les flux financiers estimés, les financements nécessaires, une simulation des distributions aux créanciers affectés en cas de faillite et un programme de paiement des créances en fonction des flux financiers et de la durée du plan.

Plusieurs différences majeures existent entre les deux procédures :

  • Dans le cas du concordat, le juge-commissaire joue un rôle plus important, se prononçant sur la demande d'ouverture de la procédure elle-même. En revanche, pour l'accord de restructuration, après le vote des créanciers, le juge ne fait que le confirmer à travers une procédure gracieuse, sans convocation des parties.
  • Dans le cas du concordat, à compter de la date d'ouverture de la procédure, en principe, toutes les procédures d’exécution forcée contre l’entreprise débitrice sont suspendues de plein droit ou ne peuvent être débutées, quelle que soit la nature de la créance, pour une période de 4 mois. Pendant la durée de cette suspension, la prescription du droit de demander l'exécution forcée est également suspendue.
  • Seul le débiteur peut démarrer la procédure de restructuration tandis que pour concordat, la demande d’ouverture de cette procédure peut être introduite à la fois par le débiteur et tout autre créancier, sous certaines conditions ;
  • Après l'ouverture de la procédure de concordat, il est interdit de résilier les contrats essentiels avec l’entreprise débitrice ou de refuser leur exécution en raison du non-paiement des montants dus. En revanche, cette interdiction n’existe pas dans le cadre d’un accord de restructuration ;
  • Toujours dans le cas du concordat, pendant la période de suspension des exécutions forcées, le cours des intérêts, des pénalités de retard et de tout autre frais lié aux créances affectées est suspendu de plein droit, jusqu'à la date de l'homologation du plan.
  • La loi ne prévoit pas de durée maximale pour l'accord de restructuration, mais impose une obligation de supervision de la mise en œuvre de l'accord par l'administrateur pendant une période de 3 ans. En revanche, dans le cas du concordat, la durée maximale pour la mise en œuvre des mesures prévues dans le plan de restructuration est de 48 mois à compter de son homologation par décision exécutoire, avec une possibilité de prolongation de 12 mois. Au cours de la première année, il est obligatoire de payer au moins 10 % de la valeur des créances affectées par le concordat.

Par conséquent, comparée au concordat, la procédure de restructuration est plus simple, plus permissive et moins surveillée et contrôlée par l'administrateur de la restructuration et le juge-commissaire. Cependant, le concordat offre en contrepartie une série d'avantages temporaires, parfois essentiels à la survie de l'entreprise (par exemple, la suspension temporaire des exécutions forcées à compter de l'ouverture de la procédure de concordat).

La procédure collective préférée à la restructuration, selon les statistiques

Selon les statistiques, 6 650 entreprises ont fait appel en 2023 à une procédure collective (les principales causes étant le manque de liquidités ou la décapitalisation de l'entreprise par les actionnaires ou associés à travers le retrait répété de fonds), tandis que 90 ont opté pour une restructuration. La majorité des entreprises provenaient des secteurs du commerce, de la construction et de la production.

La procédure collective est une procédure légale destinée aux entreprises qui ne peuvent plus régler leurs dettes échues. Réglementée par la Loi n° 85/2014, elle est déclenchée à la demande de l'entreprise ou des créanciers.

Une fois la procédure ouverte, un administrateur judiciaire (personne physique ou morale ayant la qualité de praticien en insolvabilité) est nommé par l'assemblée des créanciers pour superviser , soit la réorganisation de l'entreprise (sur la base d'un plan approuvé par les créanciers et le tribunal), soit la liquidation des actifs de la société en vue de la faillite. Au cours de ce processus, les actions des créanciers sont suspendues, offrant ainsi à l'entreprise une protection temporaire.

Cette procédure profite aux entreprises en grave difficulté financière, leur offrant une protection légale contre les actions des créanciers et une possibilité de négocier une diminution des dettes. De plus, si la réorganisation judiciaire n'est pas viable, la procédure collective permet une liquidation ordonnée des actifs, maximisant ainsi le recouvrement par les créanciers.

Il existe cependant aussi des risques qui doivent être connus. Le principal risque est la perte du contrôle sur l’entreprise, car c’est l’administrateur judiciaire et l’assemblée des créanciers qui prennent les décisions. De plus, la procédure collective entraîne une stigmatisation qui peut affecter les relations avec les partenaires et les employés. Si la réorganisation échoue, l'entreprise peut être liquidée, ce qui entraîne la perte totale des actifs et la cessation d'activité.

  1. Les conditions du déclenchement d’une procédure collective

La procédure collective peut être déclenchée si les dettes du débiteur dépassent le seuil de 50 000 lei. Si elle est demandée par les employés, le seuil pour le déclenchement de la procédure est de 6 salaires moyens bruts par employé.

Le débiteur en état d'insolvabilité est obligé de soumettre une demande au tribunal dans un délai maximum de 30 jours après la survenue de l'état d'insolvabilité. La procédure peut également être ouverte à la demande d'un créancier.

    1. La notification des créditeurs

La décision concernant l'ouverture de la procédure doit être publiée dans le Bulletin des Procédures collectives, ce qui constitue la principale mesure de notification de toutes les parties intéressées (créanciers, débiteurs, tiers) concernant l'état d'insolvabilité.

L'administrateur judiciaire (ou le liquidateur judiciaire) notifie individuellement les créanciers connus de l'ouverture de la procédure collective, en indiquant le délai pour l'enregistrement des créances, la date de la première réunion de l'assemblée des créanciers et d'autres détails pertinents.

    1. Le plan de réorganisation

Élaboré par l'administrateur judiciaire[1], le plan doit proposer des mesures concrètes pour le redressement financier de l'entreprise, telles que la restructuration des dettes, la vente d'actifs non essentiels, la renégociation des contrats ou même la réduction du personnel (par des licenciements collectifs, suppression de postes, etc.). Le plan doit être approuvé par l'assemblée des créanciers.

Une partie importante précédant l'élaboration de ce plan est l'évaluation correcte et l'inventaire des dettes de l'entreprise. À l'exception des employés, dont les créances seront enregistrées par l'administrateur judiciaire dans les registres comptables, tous les autres créanciers dont les créances sont antérieures à la date d'ouverture de la procédure devront déposer une demande d'admission des créances dans le délai fixé par la décision d'ouverture de la procédure.

  1. Avantages et défis de la procédure de réorganisation

La réorganisation offre de nombreux avantages. Le premier et le plus évident est qu’elle permet à l’entreprise en difficulté de continuer son activité sous la protection du tribunal. Les entreprises bénéficient ainsi une période de répit, étant protégées contre les procédures d’exécution forcée.

Un autre avantage important est la flexibilité du plan de réorganisation. L'entreprise peut proposer des mesures spécifiques adaptées aux besoins particuliers, qu'il s'agisse de refinancer des dettes, de renégocier des contrats avec des fournisseurs, ou de réduire les coûts opérationnels. De plus, le plan de réorganisation peut inclure l’arrivée de nouveaux investisseurs, la vente d'actifs non rentables, ou même le changement de la structure de direction pour améliorer la gestion de l'entreprise.

Bien que la réorganisation offre des avantages significatifs, elle n'est pas sans défis. L'une des plus grandes difficultés est liée aux ressources nécessaires pour mettre en œuvre un plan de réorganisation efficace. Cela inclut non seulement des ressources financières, mais aussi du temps, de l'expérience managériale et juridique, ainsi que la capacité à gérer les relations avec les créanciers et les employés.

Le processus de réorganisation peut être complexe et long, imposant une coordination étroite entre l'entreprise, l'administrateur judiciaire, les créanciers et le tribunal.

L'impact sur les employés est un autre défi significatif. Les réductions de personnel ou les modifications dans la structure organisationnelle peuvent entraîner une baisse du moral et de la productivité, ce qui peut nuire aux efforts de redressement. De plus, la crédibilité de l'entreprise sur le marché peut être affectée, et les relations avec les partenaires commerciaux peuvent en pâtir, ce qui peut compliquer davantage le processus de réorganisation.

Une fois que la décision d'ouverture de la procédure est définitive, tous les actes et correspondances émis par le débiteur, l'administrateur judiciaire ou le liquidateur judiciaire doivent obligatoirement mentionner de manière visible "în insolvență", "in insolvency", "en procédure collective" en roumain, anglais et français.

  1. Les facteurs qui influencent le choix

Les procédures de prévention de l'insolvabilité s'appliquent au débiteur avant qu'il n'entre en procédure collective afin de l'éviter, tandis que la procédure de réorganisation s'applique dans le cas où une procédure collective est déjà ouverte.

Les procédures de prévention de l'insolvabilité impliquent principalement la négociation avec les créanciers, la suspension temporaire éventuelle des poursuites, de la prescription extinctive et des intérêts, sans perdre le contrôle sur la société.

Dans le cadre de la réorganisation, une société déjà en insolvabilité a la possibilité de survivre en adoptant, dans un environnement contrôlé et réglementé, des mesures pour protéger ses actifs et maximiser leur valeur, réduire les dettes, protéger les emplois des salariés, entre autres. Cependant, si le plan de réorganisation échoue, il y a un risque de faillite de la société.

Ces procédures visent à donner une chance de survie à une société en difficulté financière et à garantir le paiement des créanciers dans la mesure du possible. En général, la plupart des sociétés préfèrent la procédure de réorganisation, malgré les risques qu'elle comporte, en partant du principe que les poursuites seront suspendues. Cependant, cela n'implique pas automatiquement la sauvegarde de la société.

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Nous espérons que ces informations vous ont été utiles !

 

[1] L'administrateur judiciaire pourra désigner, pour accomplir sa mission, des professionnels spécialisés tels que des avocats, des experts-comptables, des évaluateurs agréés ou d'autres spécialistes.

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Publié le 19 septembre 2024, mis à jour le 19 septembre 2024

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