June Fujiwara, autrice du livre « Les secrets du savoir-vivre nippon », a accepté de répondre à nos questions sur son ouvrage et sur sa vision du savoir-vivre en France comme au Japon.
La Japonaise, née à Tokyo, est tombée amoureuse de la France et vit à Paris depuis 1998. Après 17 ans de carrière dans l’équipe de communication chez Louis Vuitton, elle décide de réaliser son rêve de jeunesse : celui d’écrire en français ! « Les secrets du savoir-vivre nippon » est son premier livre, publié fin 2021.
Dans le livre, on apprend que le savoir-vivre nippon suit quatre principes :
le Mujō (éloge de l’impermanence)
le Wa (quête de l’harmonie)
le Wabi sabi (beauté du dépouillement)
et l’Okiyome (le rituel de purification)
Est-ce quelque chose que l’on apprend dans l’enfance ? Que l’on continue de pratiquer et d’apprendre tout au long de sa vie ?
Si j’ai écrit ce livre, c’est parce qu’après 20 ans de vie parisienne, je me suis finalement rendu compte que quelque chose en moi était resté irréductiblement japonais. J’ai voulu comprendre quelles sont les valeurs japonaises qui dictent, encore aujourd’hui, ma conduite, mes réflexions, mon attitude au quotidien… Pour ce faire, je me suis appuyée sur ces quatre notions clés, qui me sont chères, et qui, selon moi, forment le socle de l’art de vivre à la japonaise. C’est une interprétation purement personnelle ; ils représentent la suite logique de mes pensées.
Pour vous qui vivez en France depuis longtemps, pensez-vous que le savoir-vivre français et le savoir-vivre nippon sont compatibles ?
Le Japon a longtemps représenté « l’autre » pour la France et a exercé une sorte de fascination chez les Français. Cette fascination est réciproque et les Japonais sont tout aussi attirés par la France. Alors pourquoi ? Je pense que c’est parce qu’au fond, nous partageons un certain goût pour le raffinement, une sensibilité esthétique et un rapport particulier au temps : la France comme le Japon sait respecter l’héritage tout en le propulsant vers l’avenir. D’où cet attrait mutuel et croissant entre nos deux pays. Donc oui, les arts de vivre français et japonais sont plus que compatibles. Je connais nombre de Français qui sont plus « japonais » que moi dans leur rapport au monde et dans leur comportement au quotidien.
D’où vous est venue l’idée de ce livre ? Pourquoi l’avez-vous écrit ?
J’ai écrit ce livre pour deux raisons. La première était d’analyser le savoir-vivre japonais cultivé au Japon depuis des millénaires et qui dicte ma conduite. C’est ce que j’ai appelé de la « japonitude ». C’est une posture qui est évolutive, qui se transmet. C’est une attitude qui s’adopte également, quelle que soit l’origine culturelle ou encore la langue pratiquée par la personne.
La deuxième raison était de partager ma réflexion avec le plus grand nombre de Français possible. J’ai volontairement écrit ce livre de manière simple, en partant de mon vécu, car je voulais qu’avant tout qu’il soit lisible et accessible à tous. J’aimerais que les lecteurs puissent puiser dedans et adopter ce que bon leur semble : d’où le sous-titre « Adoptez la japonitude » ! Je suis convaincue que dans le monde d’aujourd’hui, il est plus qu’important d’ouvrir les esprits et de faire l’effort de comprendre « l’autre ». Les échanges culturels réciproques ne peuvent que nous enrichir.
Avez-vous écrit le livre en japonais ou français ? Est-ce que la langue utilisée influence votre façon de penser lorsque vous écrivez ?
Je l’ai écrit directement en français. J’ai nourri le rêve d’écrire en français depuis que j’ai appris cette belle langue. Ayant vécue à Londres dans mon enfance, je suis trilingue (anglais, français, japonais) et je nourris le projet d’écrire encore des livres en français, mais pourquoi pas aussi en anglais et en japonais. La langue utilisée n’influence pas ma façon de penser, elle structure plutôt ma pensée en l’adaptant aux cibles ; aux lecteurs visés.
Avez-vous de nouveaux projets en cours ?
J’ai envie d’écrire sur les notions esthétiques de la beauté japonaise. Ce sera mon prochain livre ! Je donne aussi pas mal de conférences en ce moment sur la « japonitude ». Ayant rencontré tellement de Français passionnés par le Japon dans divers domaines, j’ai le projet de leur en faire parler, de les interviewer, d’animer des conversations… Aujourd’hui les réseaux sociaux fournissent de multiples opportunités de tisser des liens avec des gens passionnés par le même sujet et j’ai envie de lancer des projets digitaux en parallèle de mes livres.
Je suis tout aussi amoureuse de la France qu’il y a 20 ans lorsque je suis arrivée pour la première fois à Paris. Quand on est à l’intérieur, on cultive un point de vue négatif, ce qui vaut pour les Japonais qui critiquent le Japon et les Français qui critiquent la France. Étant à cheval entre les deux pays, j’ai pu, je pense cultiver un point de vue externe qui me permet de mieux apprécier les qualités de chacun que de pointer le doigt sur les défauts. Étant ni journaliste ni chercheur, j’assume complètement mon point de vue et souhaite que les Français puissent, en lisant mon livre, adopter le meilleur du Japon !
Toutes les photos de l’article sont issues du compte Instagram @junettejapon