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Stéphanie Crohin - Ambassadrice des Sento

Stéphanie Crohin sentoStéphanie Crohin sento
Écrit par Steen
Publié le 26 février 2021, mis à jour le 28 février 2021

Rencontre avec Stéphanie Crohin, Française expatriée au Japon, autrice, photographe et ambassadrice des sento.

Amoureuse du bain japonais Stéphanie Crohin ? Entre publication de livres et voyages à travers le monde pour promouvoir ses bienfaits, la Française fait désormais autorité sur le sujet. Merci à elle d’avoir répondu à nos questions malgré un emploi du temps bien chargé.

D’où vous vient cet amour du sento ?

C’est à l’occasion d’un échange universitaire en 2008 qu’une amie m’a invitée à découvrir le sento. Toutes les barrières tombent très vite, même pour les plus pudiques. Les sento sont des endroits très bienveillants où le corps n'est pas sexualisé et, après cinq minutes on ne pense plus à sa nudité. Dès la première visite, je suis tombée sous le charme : les rituels de bains ont un côté très relaxant. Aller au sento c’est s’offrir un vrai moment pour soi. 
À l’époque, même sans parler japonais, je me suis rendu compte de l’aspect « petite communauté » des bains de quartier. On se salue, on discute... c’est un lieu où les gens sont chaleureux et détendus. On vient là pour oublier ses soucis quotidiens, c’est très apaisant. L’aspect culturel me plait également beaucoup. En effet, l’art est très présent dans les sento, que cela soit sous forme de mosaïques, de peintures sur les murs ou bien dans l’architecture même du bâtiment.  
Quand je reviens au Japon quelques années plus tard, je travaille en entreprise. À cette époque, c’est ce moment de détente au sento qui me permet de tenir le coup face à un quotidien pas toujours facile. 

stéphanie cronin

La culture des sento ne disparaitra pas, car beaucoup de gens en ont besoin


En quoi consiste votre travail de promotion du sento ?

En 2015 j’ai été nommée « ambassadrice des sento ». C’est un titre que l’on m’a offert pour me remercier de mon travail de promotion des sento et de leur culture. En effet j’essaye de les faire connaitre à l’intérieur comme à l’extérieur du Japon. C’est un titre honorifique et je ne suis pas payée pour ce travail.
En 2016, lorsque j'ai quitté mon entreprise pour me consacrer à l’univers du bain japonais et à sa reconnaissance, je me suis aussitôt dédiée à l’écriture d’un livre sur l’art des sento ("sento ha chiisana bijjutssukan") publié en 2017. Par la suite j’ai également écrit "Tokyo sento meguri", publié en 2018 et "Sento : l'art des bains japonais" en 2020, mon premier livre en français. 
Plus qu’ambassadrice, je me présente souvent comme une « sento journaliste ». Mes initiatives ont été très médiatisées et je suis régulièrement amenée à faire des conférences en université ou dans des entreprises. J’essaye de redonner un maximum de visibilité à des sento parfois oubliés ou peu connus. Les informations en anglais ou en français à ce sujet étaient quasi inexistantes auparavant. Encore aujourd’hui certains sento sont très mal présentés (même en japonais), surtout les bains en région !
Depuis 2014 je suis également membre des comités des bains de la mairie de Tokyo. Notre travail est de réévaluer chaque année le prix des sento en fonction de nombreux critères.
 


Quels sont les enjeux pour les sento en 2021 ? Ne sont-ils pas menacés
de disparition ?

La culture des sento en elle-même était en déclin depuis longtemps. Il y a 40 ou 50 ans, 2700 sento existaient à Tokyo, aujourd'hui il y en reste environ 500. C’est un déchirement de voir tous ces sento fermer leurs portes. Chacun d'eux possède une histoire riche, liée à celle de la famille qui le dirige. 
Cependant, depuis 2017/2018, alors que les jeunes ne se rendaient plus au sento depuis longtemps, je vois de nouveau des familles et des couples aller au bain. Un renouveau qui ne suffit malheureusement pas à empêcher les fermetures liées au covid ! 


J’ai bon espoir, depuis que j’ai commencé à m’intéresser à l’univers des bains, je remarque un net changement de mentalité. On peut dire que le travail de reconnaissance des sento commence à porter ses fruits. Chaque semaine on me sollicite pour des tournages, pour des magazines ou différents évènements, c’est très positif. J’ai même désormais quelques collègues japonais œuvrant eux aussi pour promouvoir les sento.
Depuis 5 ans, je travaille moi même régulièrement à l’accueil d’un sento. Cela me tient à cœur car cela m'aide à comprendre le fonctionnement des bains de l’intérieur. Grâce à cette expérience, je me rends compte que la culture des sento ne disparaitra pas, car beaucoup de gens en ont besoin ! D’ailleurs une étude que j’ai lue tendrait à prouver que les gens qui prennent des bains sont plus heureux. Une raison de plus pour cultiver cet art de vivre.

stéphanie cronin
L'entrée des bains japonais de Kobe


Est-il possible d’aller au sento lorsqu’on est tatoué ?

Les sento ne sont pas interdits aux personnes tatouées ! Sur plus de 1000 sento visités, je n’en ai rencontré que 2 ou 3 interdisant l’accès aux personnes tatouées.  Les règles des sento sont très claires : pas de discrimination ! D’ailleurs il n’est pas rare de voir s’y rendre des japonais couverts de tatouages. Bien sûr, il en va autrement pour les super sento ou pour certains onsens. C’est d’ailleurs ce qui engendre parfois des incompréhensions.
Énormément de sites internet et de livres étrangers stipulent pourtant toujours le contraire. C’est une méconnaissance qui porte préjudice aux sento, privant les propriétaires de la visite de nombreux touristes. Elle porte aussi préjudice aux touristes eux-mêmes, privés de cette découverte et passant à côté d’un véritable moment de bien être.

 

Stéphanie Crohin tiendra une conférence sur les sento les vendredi 12 et samedi 13 mars, uniquement sur réservation (2500 yens) par email !
Pour la contacter et réserver vos places, envoyez-lui un mail.


Retrouvez son dernier livre sur le site de Kinokuniya et allez jeter un œil à son compte instagram sur lequel elle poste très régulièrement de magnifiques photos de sento. (@_stephaniemelanie_)

Photos de l'article par Stéphanie Crohin
Portrait de Stéphanie en couverture  par @jordymeow.


 

 

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