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Équateur : les coutumes du Nouvel An

Viudas, monigotes, diablada… Les célébrations traditionnelles ne manquent pas en Équateur pour marquer la fin de l’Año Viejo - littéralement, la vieille année. On ne peut manquer de s’enthousiasmer face à des coutumes variant parfois selon les régions et leurs traditions. Ce qui est sûr, c’est que les Équatorien·nes savent faire la fête !

Fête du Nouvel An En Équateur : la Diablada de PíllaroFête du Nouvel An En Équateur : la Diablada de Píllaro
Écrit par Ida Gourlaouen
Publié le 18 janvier 2024, mis à jour le 30 janvier 2024

 

Les monigotes : une tradition étonnante du Nouvel An en Équateur

La plus connue de ces coutumes est celle des monigotes, en français “marionnettes” ou “pantins”. Il s’agit de personnages faits en papier mâché, en carton, en paille et autres matériaux inflammables que l’on peut rencontrer au hasard d’une balade le jour du réveillon, à travers tout le pays.

Vers minuit, ces poupées représentant parfois des personnages de fiction ou des célébrités sont incinérées dans un grand feu de joie symbolisant la purification des maux de l’année passée. L’année nouvelle est ainsi prête à se régénérer des cendres de l’ancienne. 

 

Monigote au Nouvel An en Équateur
Monigote le 31 décembre 2023 sur l’île San Cristobal aux Galapagos

 

Souvent, la combustion des monigotes s’accompagne de la lecture d’un testament où sont énumérés travers des responsables politiques ou critiques contre la société. Le testament est aussi destiné aux flammes !

Si plusieurs origines sont attribuées à cette coutume, la plus connue réside dans la terrible fièvre jaune ayant ravagé la ville côtière de Guayaquil en 1895. Celle-ci aurait poussé la population à brûler en fin d’année les affaires personnelles des défunts pour des raisons sanitaires, mais aussi dans l’idée d’alléger l’année à venir de toute la tristesse et des larmes passées. 

 

Les viudas du Nouvel An équatorien

Si vous célébrez le Nouvel An en Équateur, il ne faudra pas non plus vous étonner de rencontrer des hommes déguisés en femmes venir mendier quelques pièces auprès de vous dans la journée ou en soirée…

Elles représentent des “viudas”, ces veuves qui, portant parfois un faux bébé dans leurs bras, viennent pleurer la mort de leur vieux (symbolisant une fois de plus la fin de l’an passé). Mais elles peuvent aussi s’amuser à se vêtir de parures colorées à outrance, ainsi qu’à prendre des poses maniérées et séductrices ! L’argent récolté est d’ailleurs destiné à financer les frasques de la soirée à venir... 

 

La Diablada de Píllaro : une fête unique pour bien commencer l'année en Équateur

La Diablada de Píllaro, également connue sous le nom de Fiesta de los inocentes (Fête des innocents), est une célébration qui a lieu tous les ans entre le 1er et le 6 janvier dans le petit village de Píllaro, au sein de la région de Tungurahua, au centre du pays. Avec environ 20000 visiteurs chaque année, la Diablada a été inscrite au Patrimoine culturel immatériel de l’Équateur en 2009. 

 

Bien marquer le début de l’année

Au cours de ces célébrations, les gens dansent, boivent et défilent déguisés en diables, en guarichas (hommes vêtus comme des femmes) ou encore en bailarines de línea (danseurs en couple). Sur des musiques traditionnelles équatoriennes comme le san juanito, chacun·e peut admirer les costumes et les masques souvent confectionnés avec soin plusieurs semaines avant l’événement.

Attention, la légende raconte que les participants aux défilés sont contraints de prendre part à la fête sept années consécutives durant, sous peine d’attirer le mauvais sort du diable…

 

Diable à la Diablada de Píllaro en Équateur

 

Les origines de la Diablada

Les origines de la fête, assez floues, s’inscrivent dans la lignée de diverses histoires. La tradition la plus communément évoquée est celle de la résistance autochtone à l’époque coloniale. Cette fête représenterait donc la contestation des communautés locales contre la religion catholique et l’occupation espagnole à partir du XVIe siècle : en se déguisant en diables à l’occasion de célébrations, ces peuples tournaient en ridicule les prédications sacerdotales et s’élevaient contre l'oppression et l’exploitation infligées par les occupants.

Une autre légende populaire raconte également que les habitants d’un quartier du village de Píllaro qui avaient voulu courtiser les femmes d’un quartier voisin furent chassés par les pères et les frères de ces dernières grâce à leurs masques et leurs cornes semblables aux attraits du diable. 

 

Le défilé de la Diablada de Píllaro

 

Aujourd’hui, ce sont les diables qui affichent pour certains des messages taquins ou provocateurs, comme celui-ci : “Si votre fille souffre et pleure, c’est à cause de ce diable, monsieur”. 

 

La Diablada 2024

En ce début d’année 2024, le samedi 6 janvier marque la fin des célébrations. Dans la lumière chaude de fin d’après-midi, des baraques fumantes proposent de quoi manger : bananes plantains frites, hornado (rôti de porc), pato al horno (canard au four), arepas, churros accompagnés de dulce de leche ou de ketchup-mayonnaise… 

 

La Diablada de Píllaro 2024

 

La foule est dense et étouffante. Nombreux sont les fêtards qui offrent à boire à tout va dans la rue :  liqueurs, alcools forts et traditionnel canelazo (à base de cannelle et d’alcool dérivé de canne à sucre). La nuit tombée, des enceintes passent à fond du reggaeton ; des gens crient au micro “Que viva Ecuador, que viva !” ou “Que viva Píllaro !”

La fête se termine cependant aux alentours de 21h dans les gaz lacrymogènes. Les policiers sont venus en nombre disperser à coups de matraque la foule ivre mais loin d’être incontrôlable ou violente. Un Équatorien m’explique que c’est probablement du fait de la politique du nouveau président Noboa, qui s’est notamment fait élire sur un programme sécuritaire plaçant en son cœur les pouvoirs régaliens de l’armée et de la police. Les “gringos” (désignant dans son acception générale tout étranger et plus largement toute personne blanche) sont cependant en général épargnés par les violences policières.

 

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