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Racisme et discrimination, la Française Ingrid Jean-Baptiste témoigne

Racisme noir états unis ingrid jean baptisteRacisme noir états unis ingrid jean baptiste
Ingrid Jean-Baptiste ©️Sonia Jean-Baptiste
Écrit par Rachel Brunet
Publié le 9 juin 2020, mis à jour le 10 juin 2020

L’interview d’Ingrid Jean-Baptiste a été réalisée dans le cadre d’un projet éditorial intitulé « Black Lives Matter » porté par Le Petit Journal New York. En hommage à George Floyd - et à toutes les victimes de crimes racistes -, notre édition dénonce cette oppression et discrimination en donnant la parole à ceux qui la subissent et à ceux qui la combattent.

Aujourd’hui, Ingrid Jean-Baptiste, fondatrice du Chelsea Film Festival livre son regard de femme noire expatriée sur le racisme et la discrimination.

 

Racisme noir états unis ingrid jean baptiste

Ingrid Jean-Baptiste ©️Sonia Jean-Baptiste 

 

Le Petit Journal New York : Pouvez-vous nous raconter où vous êtes née, où vous avez grandi ?

Ingrid Jean-Baptiste : Je suis née et j’ai grandi à Paris.

 

Votre premier rapport au racisme, votre premier souvenir ?

Le racisme est un comportement très subtile et complexe. Ce n'est pas forcément si simple à expliquer, c'est pourquoi les discriminations sont si peu réprimandées par la loi en France, et même aux États-Unis. Dès la fin de mes études, l'entrée dans le monde du travail à Paris m'a confrontée au racisme, de part mon nom de famille, que j'ai dû changer afin d'ouvrir mes opportunités. Depuis l'âge de 12 ans, l'Amérique semblait pour moi une possibilité d'émancipation professionnelle, ce qui s'est avéré être juste, malgré les événements actuels.

 

Vous êtes une Française installée à New York et mariée avec un Américain. Est-ce que vous ressentez le racisme et la discrimination de part et d’autre de l’Atlantique ? Est-ce que vous pensez que c’est la même forme de racisme ?

Le racisme est malheureusement présent dans le monde entier, que ce soit ici aux États-Unis ou en Europe. En tant que femme noire dans le cinéma, il est très difficile de faire sa place. C'est encore un milieu très élitiste. Aux États-Unis, le racisme se présente sous une autre forme, c'est beaucoup plus complexe, et encré dans le système depuis des générations.

 

Est-ce qu’en tant que femme, vous vous sentez plus protégée du racisme qu’un homme ?

Sûrement, même si il est difficile de se mettre dans la peau de quelqu'un d'autre, encore plus dans la peau d'un homme. Compte tenu les faits actuels, et ce qu'il se passe depuis des années à l'encontre des hommes noirs aux États-Unis, je crois être privilégiée.

 

Est-ce que vous-même avez été la cible de propos racistes ou discriminatoires, en France ou ici ?

A plusieurs reprises, j'ai constaté un racisme provenant de plusieurs personnes au sein des Services Culturels de l'Ambassade de France à New York, ce que j'ai signalé il y a deux ans. En France, à maintes reprises, on vous suit dans les magasins en pensant que vous êtes une pickpocket. À l'aéroport, la sécurité vous pose des questions indiscrètes en compagnie de votre mari, alors qu'on ne demande quasiment rien à votre mari. Dans le monde de la mode, on vous dit : « Tu n'auras aucune chance de devenir mannequin avec ta couleur de peau, tu es trop claire de peau ». Quand vous cherchez du travail, de part votre nom de famille, on ne vous invite pas à passer un entretien, alors que j'ai fait Hypokhâgne et la Sorbonne. J'ai par ailleurs décidé de changer mon nom de famille par la suite, pour ouvrir mes chances de trouver du travail. La discrimination est très présente dans le milieu professionnel. The list goes on and on...

 

Vous avez dit il y a peu « Chelsea Film Festival est une petite entreprise fondée par deux femmes noires ». Aux États-Unis, vous entrez dans deux « cases » de minorités, celle de votre couleur de peau et celle liée au fait que vous êtes une femme ? Est-ce que cela vous donne encore plus la hargne ? Et est-ce que pour développer votre Festival du film, vous pensez devoir doubler d’énergie par rapport à si vous étiez un homme blanc ?

Faire sa place en tant que femme noire dans le milieu du cinéma est très compliqué, même après 8 ans en tant que fondatrice d'une entreprise, je continue à me battre. En tant que femme, on doit toujours se justifier sur la qualité de notre travail et les résultats. C'est un perpétuel combat. J'ai la chance de travailler avec ma maman, qui est la co-fondatrice du festival, elle est me donne ce courage de continuer tous les jours.

 

Est-ce que justement, le Chelsea Film Festival est un outil pour dénoncer le racisme, la discrimination et les inégalités ?

Le Chelsea Film Festival a été fondé en 2013 pour faire un pont entre les cultures. En effet, le cinéma nous permet de transmettre de nombreux messages de paix et de tolérance. J'espère apporter un autre regard sur le monde avec notre plateforme.

 

Quel regard portez-vous sur cette Amérique d’aujourd’hui ?

Je suis très attristée par les événements, cette situation est très lourde à porter, d'autant plus que nous sommes encore affectés par la crise sanitaire depuis plus de trois mois. Je suis pour la Justice et l'égalité entre les Hommes. Il semble que les choses commencent progressivement à changer dans différents États, ce combat n'est pas en vain, ça donne chaud au coeur.

 

Quel message avez-vous envie de passer aux personnes qui font, en 2020, une distinction des couleurs de peau ?

Black Lives Matter.

 

 

Ingrid Jean-Baptiste a lancé fin mars, "Chelsea Film Festival Talks TV Series" une série de talks hebdomadaires sur zoom. Il y est question de cinéma, de séries et des acteurs sont au rendez-vous. Ce vendredi 12 juin, en compagnie d’Emma Bell, le 7e épisode sera dédié au mouvement Black Lives Matter. Parmi les acteurs invités, Abigail Hawk, Gigi Gorgeous, Laura Gómez, Lina Bradford, Paul Haggis, Tobias Truvillion, Wilson Morales... Ensemble, ils parleront racisme et discrimination.

 

"Chelsea Film Festival Talks TV Series", épisode 7

Vendredi 12 juin 2020 à 12h (EST)

Pour RSVP

 

Black Lives Matter

 

Rest In Power !

 

Black lives matter

 

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