Lorsqu’on évoque Stendhal et son œuvre, il est courant de les associer à l’Italie et encore davantage à Milan, source romanesque intarissable et irremplaçable. Un pays qui a fait vibrer son cœur.
Les expériences amoureuses de Stendhal l’ont conduit à écrire les plus beaux romans du XIXème siècle, parmi les plus célèbres et portés à l’écran, Le rouge et le noir, La chartreuse de Parme, Lucien Leuwen.
L’écrivain pensait que peu de gens pouvaient ressentir ce sentiment si singulier. Lui-même a vécu des amours contrariés, non réciproques et douloureux. C’est sans doute pourquoi dans son essai : De l’amour, il souligne que l’amour est la faiblesse des âmes fortes et que peu de lecteurs peuvent comprendre la passion amoureuse. Alors de façon élitiste, il s’adresse aux lecteurs qu’il qualifie d’”âmes sensibles”, c’est-à-dire à ceux qui ont été au moins une fois, malheureux durant six mois par amour et capables de comprendre cette passion.
La vie milanaise passionnée de Stendhal
Lorsqu’on évoque Stendhal et son œuvre, il est courant de les associer toujours à l’Italie et encore davantage à Milan. L’auteur du “Rouge et du Noir “ n’est-il pas considéré en effet, comme le plus Milanais des Français au point qu’il ait souhaité que soit inscrit sur sa tombe : “Henri Beyle le Milanais”? L’Italie devient alors pour lui une source romanesque intarissable et irremplaçable.
Stendhal est arrivé à Milan pour la première fois en 1800 où il est sous-lieutenant au 6ème Régiment de dragons. L’émerveillement est total: “Cette ville devint pour moi le plus beau lieu de la terre. Je ne sens pas du tout le charme de ma patrie, j’ai pour le lieu où je suis né, une répugnance qui va jusqu’au dégoût physique. Milan a été pour moi de 1800 à 1821 le lieu où j’ai constamment désiré habiter. J’y ai passé quelques mois de 1800, ce fut le plus beau temps de ma vie. J’y reviens tant que je pus en 1801 et 1802 étant en garnison à Brescia et à Bergame, et enfin j’y ai habité par choix de 1815 à 1821”.
L’expérience de cette ville lombarde détermine pour Stendhal un jugement sur la qualité des arts, de la danse, de l’opéra et de la littérature. Milan, c’est d’abord le théâtre de la Scala “ce premier théâtre du monde”, lieu des pratiques sociales qui apparaît comme l’emblème d’une cour raffinée, régie par des rites discrets et aristocratiques. Les rencontres dans les loges révèlent tout un monde, fait d’aimable élégance.
Henri Beyle est né à Grenoble en 1783. Son père est avocat au Parlement de Grenoble. Il n’a pas 17 ans lorsqu’il perd sa mère à laquelle il vouait une véritable adoration : “J'étais amoureux de ma mère (...) Je voulais couvrir ma mère de baisers et qu’il n’y ait pas de vêtements. Elle m’aimait à la passion et m’embrassait souvent. J’abhorrais mon père quand il venait interrompre nos baisers”.
Des expériences amoureuses douloureuses
En commençant par l’amour presque incestueux qu’il éprouve pour sa mère, il ne cessera tout au long de sa vie de multiplier les conquêtes féminines sans jamais cesser de souffrir des ruptures successives. Stendhal est timide, mais c’est un amant possessif, et aussi un amoureux platonique.
Stendhal rencontre avec le théâtre et l’opéra Virginie Kubly, une comédienne dont il s’éprend. Il ressent pour elle ses premiers émois amoureux. En 1804, il rejoint à Marseille Mélanie Guilbert, une jeune actrice avec laquelle il vivra en couple durant un an, mais dont il se lassera.
Mais c’est avec Angela Pietragura, sa maîtresse à Milan, une femme brune et voluptueuse qu’il connaître une liaison mouvementée faite de séparations et de réconciliations. A la dernière rupture, Stendhal envisage même le suicide.
Par la suite, l'auteur De La Chartreuse de Parme ressentira un amour idéalisé pour sa cousine Adèle Rebuffel mais aussi un amour charnel pour la mère de celle-ci.
Ses amours ne seront pas toujours réciproques comme ce fut le cas pour Victorine Mounier, de Wilhelmine von Griesheim et d’Alexandrine Daru, des expériences très douloureuses pour l’écrivain.
Pourtant, un coup de foudre réciproque semble unir de façon passionnée de 1819 à 1821 Matilde Dembowski à Stendhal. Tous deux font l’expérience de la "cristallisation”, c’est-à-dire du phénomène qu’il décrit dans son essai : de l’adoration et l’invention de qualités imaginaires à propos de l’être élu par le cœur. Stendhal éprouve une passion dévorante pour Matilde, mais elle est refroidie par une lettre que sa cousine lui adresse dans laquelle Stendhal est présenté comme “un homme à femmes”. A partir de cette expérience douloureuse, va naître le célèbre essai : “De l’amour” (paru en 1822).
D’autres amours vont, soit guérir l’auteur de la passion pour Matilde comme ce fut le cas avec Clémentine Curial et avec l’amour torride d’Alberthe de Rubempré, soit le consoler dans sa vieillesse comme le fera la dévouée Giulia Rinieri, "sa dernière romance" à Rome.
Ces expériences amoureuses sont le ferment qui inspirera son œuvre. Si “De l’amour” est une suite d’anecdotes mais aussi un essai de science analytique qui pourrait être intitulé “la physiologie de l’amour”, l’auteur explique les diverses étapes du sentiment qui se succèdent. L’amour est comme “la voie lactée, un amas brillant formé de milliers de petites étoiles”. Cet essai fut commencé à Milan à la suite de bals masqués du carnaval de 1820 et pourrait être le credo "L’amour est la faiblesse des âmes fortes.”