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Histoire du chocolat, ramené d'Amérique par les Espagnols et qui a conquis l'Europe

Rapporté en Espagne par Hernan Cortés en 1524, ce breuvage amer est au départ peu apprécié. Mélangé ensuite au sucre, le chocolat devient la boisson à la mode que la jeune princesse espagnole Anne d'Autriche introduira à la cour de France après son mariage avec Louis XIII.

Hernan Cortes rencontre l'empereur azteque Moctezuma IIHernan Cortes rencontre l'empereur azteque Moctezuma II
Hernan Cortés rencontre l'empereur aztèque Moctezuma II, grand amateur de chocolat (il en buvait plus de 50 par jour! / Domaine public
Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 19 mars 2024, mis à jour le 21 mars 2024

En 1502, Christophe Colomb reçoit en offrande des sacs de cacao qu'il prend pour des amandes, et n'en fait aucun cas. Il faut dire que les conquistadores trouvaient la boisson peu appétissante, tant du point de vue de l'apparence (une eau brunâtre mousseuse) que du goût (amer et piquant). Jusqu'à ce qu'Hernán Cortés, qui en a vu le potentiel, en ramène une première cargaison en 1524 pour la présenter à Charles Quint.

 

Femme azteque preparant le chocolat
Femme aztèque preparant le chocolat/Domaine public

 

Chocolat vient de l'aztèque xocolatl

Le xocolatl, mot issu de la langue aztèque, qui voulait dire "eau amère" était particulièrement important pour les sociétés Mayas et Aztèques. Les Mayas ont laissé les premières références écrites de l'histoire sur la préparation et consommation du chocolat dans le Codex de Madrid, conservé au Musée d'Amérique. On y apprend que les fèves de cacao étaient réduites en poudre et des graines de piment ou du maïs y étaient également ajoutés. La poudre obtenue était mélangée à de l'eau froide et remuée jusqu'à ce que la mousse monte.

 

preparation chocolat par Maya
Les premières références écrites de l'histoire sur la préparation et consommation du chocolat nous viennent des Mayas (Codex de Madrid, Musée d'Amérique)

 

Le chocolat, une boisson... divine!

Mais les Aztèques admiraient encore plus le chocolat, puisqu'ils croyaient que le cacao avait été apporté sur terre par Quetzalcoatl, le dieu de la sagesse. Contrairement aux Mayas, dans le monde aztèque, ce sont les classes supérieures qui y avaient droit, même si les classes inférieures en buvaient à l'occasion de célébrations. Le cacao était d'ailleurs si précieux que ses graines, qui ressemblent un peu à des amandes, faisaient partie du système monétaire et valaient plus que l'or.

 

Representation des feves de cacao comme monnaie
Représentation des fèves de cacao comme monnaie - Musée du chocolat de Barcelona/CC BY 3.0

 

Afin de mieux comprendre les échanges effectués dans la société aztèque, les Espagnols avaient établi des tables d'équivalence. C'est ainsi que le chroniqueur de l'époque Pedro Mártir de Anglería explique par exemple dans son livre Decadas del Nuevo Mundo (Les décennies du nouveau monde) qu'"un lièvre payé en cacao coûtait le même prix que les services d'une prostituée!"

Arbre du cacao chez les Aztèques
Arbre du cacao chez les Aztèques/ Codex de Tudela. Musée d'Amérique, Madrid.

 

Avant que le chocolat chaud no conquiert l'Espagne et l'Europe, il a d'abord fallu une idée géniale, qui serait venue d'un moine: ajouter du sucre, pour en adoucir le goût. C'est ainsi que le chocolat, tel que nous le connaissons, a été fabriqué pour la première fois dans le monastère de Piedra, situé dans la province de Saragosse. Avec le temps, ce sont les moines cisterciens qui ont acquis une plus grande renommée en tant que chocolatiers. L'art de la fabrication du cacao a d'ailleurs été gardé secret par les Espagnols pendant près de cent ans.

Boire du chocolat, péché mortel?

A noter cependant que tous les moines n'étaient pas favorables à la consommation de ce chocolat. Et comme cette boisson était également consommée pendant les périodes de jeûne, un débat s'est rapidement engagé entre les partisans et les adversaires de cette habitude. C'est au XVIIe siècle que la question trouve sa réponse. L'église finit par déclarer en 1636: "Liquidum non frangit jejunum" (le liquide ne viole pas le jeûne). Autrement dit, boire du chocolat n'était pas péché mortel.

Question morale -si le chocolat brise ou non le jeûne de l'église, Madrid, 1636
Question morale: Le chocolat brise-t-il le jeûne? Madrid, 1636

 

Deux siècles après la découverte du cacao, le chocolat a définitivement conquis l'Espagne qui en consomme plus de cinq tonnes par an. L'aristocratie et la cour en raffolent et il est présenté dans les boutiques des confiseurs comme "la boisson qui vient des Indes". L'habitude de boire du chocolat était si répandue que même les dames de la noblesse s'en faisaient servir au milieu des longs sermons ecclésiastiques.

Le chocolat arrive en France dans les malles d'Anne d'Autriche

Au XVIIe siècle, Anne d'Autriche, fille du roi Philippe III d'Espagne, épouse Louis XIII et devient reine de France. Avec elle, débarque le chocolat à la cour de France. Marie-Thérèse d'Autriche, fille de Philippe IV et épouse de Louis XIV, renforce cette pratique en buvant régulièrement du chocolat dans son nouveau pays, une mode qui s'est ensuite répandue sur tout le continent.

 

La Tasse de chocolat, portrait de la famille du duc de Penthièvre par Jean-Baptiste Charpentier Château de Versailles
La Tasse de chocolat, portrait de la famille du duc de Penthièvre par Jean-Baptiste Charpentier /Musée du Château de Versailles

 

Le chocolat, introduit en Europe par l'Espagne, lui échappait et connaitrait ses heures de gloires dans d'autres pays voisins, en particulier dans les Flandres, anciens territoires espagnols au temps de Charles Quint. C'est ainsi qu'à la différence de l'Espagne, le chocolat belge connait une renommée mondiale.

 

tasse de chocolat épais

 

En revanche, ce qui est resté ancré dans les traditions en Espagne, c'est le fait que le chocolat est servi avec une épaisseur considérable, une spécialité très appréciée des touristes. À déguster sans modération!