Jeudi dernier, l'association d'amitié hispano-française Mujeres Avenir a organisé une conférence portant sur l'occultation des femmes artistes dans l'histoire. Cette conférence a réuni à la tribune Violeta Andreu, artiste multidisciplinaire, commissaire et coordinatrice d'expositions ; Concha Mayordomo, artiste visuelle et militante féministe ; et Mareta Espinosa, artiste et gestionnaire culturelle.
Pour Rebeca Avila, présidente de Mujeres Avenir, il est essentiel de faire valoir "le rôle fondamental tenu par les femmes artistes au cours des siècles, tant dans le monde de la peinture que dans la société en général, en dépit des barrières imposées par les structures patriarcales". Ce message fort a été au cœur des discussions tout au long de la conférence. De fait, l’activisme de nombreux artistes réclame une plus grande présence et visibilité des femmes dans toutes les disciplines. Ce combat vise non seulement à changer le présent et l'avenir des créatrices, mais aussi à réécrire le passé, puisque l'histoire de l'art, de la littérature et du cinéma s'est largement construite sur l'exclusion systématique de la production artistique féminine.
Les intervenantes ont illustré la présence et la puissance du travail des femmes artistes, du Moyen-Âge à l'époque moderne. Concha Mayordomo a souligné les contraintes historiques auxquelles les femmes étaient confrontées, avec pour seules alternatives, souvent, le mariage ou le couvent. Certaines figures exceptionnelles ont cependant marqué l'histoire, comme Matilde de Flandes au 11e siècle et Marie Louise Élisabeth Vigée Lebrun, portraitiste de Marie-Antoinette. Hélas, la plupart des femmes artistes sont restées méconnues ou cachées derrière des figures masculines, parfois menant des vies tragiques à l'instar de Camille Claudel.
Dans l'art contemporain, des artistes comme Louise Bourgeois et Sophie Calle ont apporté un discours ouvertement féministe, remettant en question le regard masculin dominant. Niki de Saint Phalle, avec ses sculptures monumentales, a aussi bousculé les conventions en occupant l'espace public dominé par les hommes.
Violeta Andreu, auteure d'un livre sur le lien entre féminisme et foyer dans la création artistique de 1970 à nos jours, a expliqué lors de la conférence les points d'achoppement entre ces concepts. "La maison reste le lieu où la femme est la plus soumise à la violence de genre", a-t-elle rappelé, tout en évoquant l'isolement et l'aliénation, thèmes explorés par Louise Bourgeois dans sa série "Femme Maison".
Mareta Espinosa a averti que les exemples d'artistes féminines célèbres ne doivent pas masquer la réalité d'un monde de l'art encore largement dominé par la gent masculine. Dans les galeries espagnoles, 70% des artistes exposés sont des hommes, reflétant un déséquilibre persistant. Espinosa a salué les FRAC français (Fonds régionaux d'art contemporain) comme un modèle à suivre pour leur promotion de la parité et du talent des jeunes artistes.
La présidente fondatrice de Mujeres Avenir, Maria Luisa de Contes, a clôt les débats en soulignant les parallèles entre les défis rencontrés par les femmes dans le monde de l'art et ceux dans le monde de l'entreprise. "Notre association est majoritairement constituée de cadres dirigeantes de haut niveau", a-t-elle noté, "mais dans l'entreprise ou dans le monde de l'art, nos combats sont finalement les mêmes".