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Une vague anti-touristes déferle sur les Canaries

Une manifestation sous le slogan "Les îles Canaries ont une limite" a été convoquée dans toutes les îles le samedi 20 avril. De nombreuses associations se sont joints à ce mouvement qui se veut "le plus grand de l'histoire".

Plage de maspalomas, Gran Canarias Plage de maspalomas, Gran Canarias
pxhere
Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 10 avril 2024, mis à jour le 13 septembre 2024

Les graffitis anti-tourisme se multiplient ces dernières semaines près des stations balnéaires, avec des messages de bienvenue du style "Touristes, rentrez chez vous" ou "Trop de guiris". Guiri est un mot d'argot espagnol désignant un étranger, utilisé de façon péjorative. Une autre affiche placardée sur les murs dénonce: "Les habitants sont forcés de déménager et VOUS en êtes responsables... nomades numériques, vous n'êtes PAS les bienvenus ici".

 

Il faut bien avouer qu'il y a un avant et un après Covid aux Canaries. Avec la pandémie, une cohorte de nomades numériques a débarqué sur les îles, dont beaucoup de Canariens ont -il convient de le rappeler- su profiter. Certains touristes étrangers ont commencé à "contre-attaquer", comme c'est le cas d'un message en anglais griffonné à côté de l'un des slogans: "Allez vous faire foutre, nous payons vos salaires!" En définitive, bonne ambiance assurée.

 

affiche anti touriste Canaries

 

Une telle vague, pour ne pas dire un tsunami, anti-touriste est assez nouveau sur l'archipel. Certes, le tourisme de masse sur les îles provoque parfois des inconvénients aux habitants, mais c'est bien la première fois qu'une manifestation de la sorte est organisée avec autant de soutien de toute part. En fait, difficile de ne pas être d'accord avec les messages de toute sorte qui appellent à manifester: l'impossibilité d'accéder au logement, la congestion des services de santé, le secteur de l'éducation, l'effondrement du système de gestion des déchets, le manque d'eau pour la consommation et le secteur agricole, la perte de qualité de vie, les transports publics déficients, la surpopulation des zones protégées affectées par de multiples infractions environnementales, ou la perte de biodiversité. Le problème, c'est que le touriste en fait les frais et est devenu le bouc-émissaire de tous les maux qui touchent les Îles Canaries.

 

Affiche manifestation 20 avril Canaries Salvar la tejita

 

La plupart des organisateurs qui appellent à la mobilisation sont des groupes environnementaux, de l'Asociación Tinerfeña de Amigos de la Naturaleza (ATAN), pionnière en la matière, à la fédération écologiste Ben Magec, en passant par Salvar La Tejita ou la Fundación Telesforo Bravo-Juan Coello. Ils disent "oui au tourisme, mais avec le contrôle et la garantie des services publics, du logement, de la santé, de l'eau et du respect".

 

Chaîne humaine et grève de la faim, prélude aux mobilisations du 20 avril

Une autre association, qui lutte contre l'implantation de deux complexes hôteliers à Tenerife, a même décidé d'aller encore plus loin avant la grande manifestation du 20 avril. C'est ainsi que plusieurs militants du groupe "Canarias se agota" (les Canaries s'épuisent) ont commencé une grève de la faim illimitée pour protester contre ce tourisme de masse qui a envahi leurs îles. "Pas de retour en arrière. Pas de concession. Les Canaries sont épuisées et notre patience aussi" dénoncent-ils sur les réseaux sociaux. Ils veulent aussi former une chaine humaine, tout un symbole pour montrer l'unité des Canariens face au gouvernement de l'archipel qui ne les écoute pas.

 

 

Non au tourisme de masse

Quant aux organisateurs de la manifestations, ils expliquent que le taux de croissance actuel de l'industrie touristique en termes de consommation de terres, de territoires et d'eau rend le modèle économique insoutenable pour l'avenir. Ils rappellent à cet égard que l'archipel compte 2,2 millions d'habitants et accueille 16 millions de touristes par an, record après record. Les manifestants défileront pour "la conservation des espaces naturels, un moratoire touristique et une réglementation plus stricte pour les étrangers qui achètent des biens immobiliers".

tourismophobie barcelone
La tourismophobie est beaucoup plus présente à Barcelone

 

Ils considèrent en effet qu'une activité qui représente 35,5% du produit intérieur brut de l'archipel n'a pas d'impact sur l'amélioration de la qualité de vie des habitants des îles, bien au contraire. Attention toutefois de ne pas tuer la poule aux œufs d'or…

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