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“Living with Covid” : Boris Johnson acte la fin des restrictions en Angleterre

Boris Johnson en réunionBoris Johnson en réunion
Boris Johnson - Simon Dawson
Écrit par Léonie Bayon
Publié le 22 février 2022, mis à jour le 22 février 2022

Le Premier ministre britannique a annoncé hier que toutes les restrictions liées au coronavirus prendront fin jeudi en Angleterre. Une première dans le monde.

 

Boris Johnson a présenté hier son « Living with Covid plan » visant à apprendre à vivre avec le virus. Il s’agit d’un véritable tournant dans la politique sanitaire britannique, que Johnson a qualifié de « moment de fierté », alors que le pays enregistre encore 40 000 nouveaux cas quotidiens.

 

Fin de l’isolation obligatoire et des tests gratuits

Le Premier ministre a annoncé hier qu’à partir de jeudi, l’isolement de sept jours en cas de test positif ne serait plus légalement obligatoire. Les Britanniques seront seulement « incités » à s’isoler, sans pour autant y être contraints. Cette méthode en appelle à « la responsabilité de chacun » selon BoJo, qui estime que l’Angleterre a désormais atteint « des niveaux d’immunité suffisants pour passer de la protection des personnes au moyen d’interventions gouvernementales, à une approche basée sur les vaccins et les traitements en guise de défense de première ligne. »

 

D’autre part, les tests PCR et antigéniques, jusqu’alors gratuits, cesseront d’être pris en charge à partir du 1er avril, à l’exception des personnes âgées et à risque. Le passe sanitaire cessera lui aussi d’être obligatoire à partir du 1er avril mais restera nécessaire pour les voyages.

 

Boris Johnson a justifié sa décision au Parlement par le « lourd tribut » économique payé depuis le début de la crise sanitaire, affirmant que les Britanniques « ne doivent pas en payer le prix plus longtemps » et qu’ils « doivent retrouver leurs libertés ». Sa stratégie, si la situation ne se dégrade pas lourdement, reposera désormais uniquement sur les traitements antiviraux et les campagnes de vaccination, facilitant les doses de rappel. La quatrième dose de vaccin va d’ailleurs être bientôt déployée au Royaume-Uni pour les personnes vulnérables et les personnes âgées de plus de 75 ans.

 

Une fin des restrictions attendue ?

Une partie de la population semble accueillir la nouvelle à bras ouverts, signe d’une lassitude grandissante face aux restrictions mises en place depuis deux ans maintenant. Juliet, étudiante londonienne, se réjouit de « pouvoir retrouver une vie à peu près normale, même si ça ne veut pas dire qu’on ne doit plus faire attention ». Chris Witty, le Médecin-chef pour l’Angleterre appelle d’ailleurs la population à rester prudente et à continuer d’adopter les gestes de précautions, comme le port du masque et l’isolement en cas de test positif.

 

Mais les réserves sont aussi nombreuses depuis les annonces d’hier. Depuis le « Partygate », Boris Johnson semble avoir perdu la confiance de la population britannique, dont beaucoup s’insurgent face à la levée des restrictions sur les réseaux sociaux.

"Il n'y a pas de doute : la levée des dernières restrictions par Boris Johnson est prématurée et injuste"

 

"Peut-on être clair ? Ce n'est pas "vivre avec le Covid". Cela entrainera la mort d'autres patients fragiles et immunodéprimés. Je m'occupe de ces patients triplement vaccinés mais qui meurent en réanimation à 30 ou 40 ans? Les vies ne comptent-elles vraiment pas ?"

 

«  Moins on en sait, mieux on se porte » : l’opposition et les scientifiques divisés

La communauté scientifique, elle, est partagée face à ces décisions. Certains comprennent la décision de Boris Johnson et la nécessité d’alléger les restrictions maintenant que le pic de la vague Omicron a été dépassé. Mais cette décision de mettre fin brutalement aux tests systématiques en cas de symptômes provoque des inquiétudes.

 

Christina Pagel, professeur à l’University College London, rappelle qu’il risque d’être très difficile d’en appeler à la responsabilité de chacun tout en supprimant la possibilité de pouvoir faire un test. Elle rappelle aussi que l'Angleterre n’a pas « les infrastructures dont (elle aurait) besoin » au cas où les cas venaient à flamber à nouveau si les gestes barrières étaient abandonnés. A savoir si la responsabilité individuelle suffira à contenir les cas. Christina Pagel avertit que la vague Omicron n’est pas encore terminée et que le risque demeure de voir la situation « empirer ». Laisser circuler le virus représenterait aussi un risque pour les potentielles nouvelles victimes du covid long qui pourraient se multiplier. Pour elle, le gouvernement conservateur va devoir présenter un plan plus complet afin de connaitre les modalités précises du projet, notamment comment la NHS et le système éducatif seront soutenus, car elle juge que le plan « ne doit pas seulement s’arrêter à la fin des restrictions ».

 

Au sein même du gouvernement, le sujet est cause de tensions. Le Secrétaire d’Etat à la Santé, Sajid Javid, plaidait pour le maintien des tests gratuits dans certains secteurs. Mais le ministre de l’Économie, Rishi Sunak, a refusé et a finalement gagné la bataille. Le programme aura en effet coûté un total de 17,7 milliards de livres depuis le début de la pandémie, d’où le refus catégorique de Rishi Sunak de débourser davantage.

 

Le chef du Parti travailliste, Keir Starmer, a quant à lui déploré à la Chambre des Communes une « approche irresponsable » qui partirait du principe que « moins on en sait, mieux on se porte » même s’il admet qu’il faille « passer à autre chose ». Le parti travailliste a fait part de ses inquiétudes quant à l’augmentation des inégalités face aux tests payants, rappelant que ce seront les plus pauvres qui souffriront le plus de ces décisions, alors même que les foyers les plus modestes subissent déjà l’inflation de plein fouet.