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Une découverte britannique et une malédiction vieille de 99 ans

Le buste de toutankhamonLe buste de toutankhamon
Valccrn - Unsplash
Écrit par Maud Finance
Publié le 7 avril 2021, mis à jour le 8 avril 2021

Samedi 3 avril 2021, un cortège funéraire bien particulier défilait dans les rue du Caire, transportant sur des chars dorés 22 momies royales. L’objet de cette Walking Dead revisitée était de transporter les dépouilles pharaoniques du Musée Archéologique de la place Tahrir du Caire, vers le Nouveau Musée de la civilisation égyptienne. A bord du convoi, la célèbre reine Hatchepsout, décédée en 1458 avant Jésus Christ et le grandiose Ramsès II, dont le tombeau fut découvert en 1881.

Cet événement, très médiatisé en Egypte, a enflammé la toile notamment sur Twitter, où le hashtag en arabe #lamaledictiondespharaons fit renaître le mythe ayant vu le jour dans les années 1920, à la suite de la découverte de la chambre funéraire de Toutankhamon par Howard Carter, archéologue et égyptologue britannique. La rédaction vous propose dans ce cadre, de revenir sur cette fatalité romanesque, datant d’il y a presque un siècle.

 

Une découverte sans précédent

Le 4 novembre 1922, l’archéologue Howard Carter se tenait devant une porte ornée d’un sceau de la nécropole royale, dans la Vallée des Rois égyptienne. A ce moment précis, il ne sait pas encore que sa prochaine découverte deviendra la plus impressionnante, la plus majestueuse et la plus célèbre de toute l’Histoire contemporaine. 

sceau necropole royale
Le sceau de la nécropole royale en 1922, intact depuis 3000 ans

 

« D’abord, je ne vis rien. L’air chaud qui s’échappait de la chambre faisait clignoter la flamme de la bougie. Puis, à mesure que mes yeux s’accoutumaient à l’obscurité, des formes se dessinèrent lentement : d’étranges animaux, des statues, et partout le scintillement de l’or », racontait Howard Carter dans ses mémoires. Nous ne pouvons qu’imaginer l’émotion dans laquelle se trouvait l’archéologue devant une telle merveille.

Une chance que le tombeau soit resté dans un pareil état de conservation en dépit du temps, mais surtout des pillages dont la Vallée des Rois fut sans cesse victime. La chambre du jeune pharaon, ensevelie sous les gravats des tombes adjacentes, est par miracle cachée et préservée des pilleurs de tombe, contrairement à celles de ses pairs.

Actuellement considéré comme le visage le plus célèbre de l’Egypte Antique, l’enfant-roi Toutankhamon n’est pourtant de loin pas celui qui marqua le plus l’Histoire égyptienne. Il meurt d’ailleurs très jeune, à 18 ans seulement, d’une cause qui nous est encore inconnue. C’est donc davantage l’incroyable richesse de sa tombe qui fait aujourd’hui sa célébrité dans le monde contemporain. 

buste toutankhamon roi or statue
Célèbre buste du roi Toutankhamon

 

Aussi, en plus de son extraordinaire trésor et de la préservation hallucinante des pièces qui le compose, le tombeau de Toutankhamon marquera également les esprits grâce au mythe de sa malédiction poursuivant tous les Hommes ayant profané sa tombe.

 

« Ce tombeau sera votre tombeau ! »

Tout commence lorsque le canari de Carter est tué par un cobra, « serpent des pharaons » à quelques jours de l’ouverture du tombeau. Dès lors, les ouvriers égyptiens présents y voient un mauvais présage. Puis, quelques mois après l’exhumation de la momie royale, le commanditaire des fouilles tombe subitement malade et meurt d’une infection suspecte en quelques jours. De 1923 à 1929, neuf personnes liées de près ou de loin à l’événement décèdent de causes diverses. Parmi eux figurent le financier George Jay Goud, victime d’une pneumonie contractée après la visite de la chambre funéraire ; le professeur Evelyn-White, l’un des premiers à entrer dans l’espace mortuaire, qui se suicidera quelques temps plus tard ; le radiologiste employé pour effectuer la radio de la momie ; l’infirmière ayant soigné la première victime, Lord Carnavon ; ou encore le secrétaire d’Howard Carter, retrouvé sans vie dans son lit en 1929. Simple coïncidence ou réelle malédiction ?

Dans l’Egypte Antique, la mort est tout aussi importante que la vie. La chambre funéraire fait office de demeure éternelle qui doit accompagner le voyage du défunt vers sa deuxième existence. Ainsi, pénétrer dans un tombeau mortuaire et l’en déposséder de ses biens est perçu telle une réelle violation dans la culture antique. En 1980, le président Anouar al-Sadate avait d’ailleurs exigé la fermeture de la salle des momies royales du musée du Caire, souhaitant que ces dernières soient remises sous terre, afin de ne pas les « désacraliser ». D’où la fatale punition qui se serait abattue sur les profanateurs… 

howard carter archeologue decouverte tombeau egypte
Howard Carter, 1922

 

Mais en réalité, le coupable serait un simple champignon, qui se serait développé grâce à la grande humidité présente dans le tombeau du Roi. Howard Carter lui-même soulignait « l’air suffocant » régnant dans la pièce scellée durant 3 000 ans, un air qui aurait été infesté par des particules allergènes provenant de la moisissure, vieille de plusieurs milliers d’années.

 

Une procession pharaonique au XXIème siècle

Samedi dernier, le déménagement pharaonique anachronique se déroulait dans une atmosphère folklorique : la place Tahrir, interdite aux piétons et à la circulation accueillait le convoi exceptionnel chaperonné par des gardes à cheval et des figurants en costumes d’époque. Les véhicules transportant les momies royales rappelaient les chars funéraires antiques, motorisation en plus, le tout sur un fond musical symphonique. 

char ramses parade golden egypte antique
Char transportant Ramsès II

 

Les autorités égyptiennes n’avaient pas fait les choses à moitié : accueillis au Nouveau Musée par le président égyptien en personne, des tirs de canons et des battements de tambour venant appuyer le côté mystique de l’événement, force est de constater que les Rois et Reines d’Egypte créent toujours l’engouement, des milliers d’années après leur passage sur le trône. Ces derniers, enveloppés pour leur préservation le temps du voyage dans de l’azote, défilaient dans l’ordre chronologique de leur règne. La « golden parade » était diffusée en direct par plus de 200 chaînes de télévision.

Les momies seront visibles par le grand public à partir du 18 avril 2021. Contrairement à leurs précédents emplacements, elles apparaîtront dans le Nouveau Musée de manière plus ludique et moderne « pour un contrôle de la température et de l’humidité meilleur qu’au vieux musée », déclarait Salim Ikram à l’AFP, professeure d’Egyptologie et spécialiste de la momification. En effet, l’ancienne demeure royale à l’architecture coloniale n’était pas réputée pour l’aménagement de ses pièces, pourtant uniques. Exposés les uns sur les autres et sans réelles explications ni repères temporels, les sarcophages étaient relativement peu mis en valeur. Un désordre dont aurait pu témoigner la princesse Margaret, sœur de la souveraine britannique, qui lors de sa venue à l’ancien musée aurait « fermé les yeux » et serait « partie en courant » selon l’archéologue Zahi Hawass. De plus, la célèbre momie du Roi guerrier Ramsès II fut précipitamment rapatriée en France dans les années 1970 pour être soignée, la dépouille étant rongée par une poussée de champignons causée par une mauvaise isolation de son caveau du musée du Caire.

Le pharaon Toutankhamon, lui, ne faisait pas partie du voyage, sa sépulture et son trésor étant destinés au Grand Musée égyptien, un autre projet qui devrait ouvrir ses portes au cours de l’année non loin des trois pyramides sur le plateau de Gizeh. Son sarcophage et sa momie se trouvent d’ailleurs en cours de rénovation pour la première fois depuis leur découverte en 1922.

 

Vers le retour de la malédiction ?

Certains internautes n’ont pu s’empêcher de relier l’événement mortuaire sans précédent aux catastrophes récentes auxquelles l’Egypte a été forcée de faire face ces derniers temps. En effet, en moins d’une semaine, la capitale nord-africaine voyait l’un de ses immeubles s’effondrer causant la mort de 25 personnes ; le canal de Suez était ensuite bloqué par un porte-conteneurs durant plusieurs jours, tandis qu’à Sohag, une ville du sud du pays, un accident de train faisait une trentaine de morts. La malédiction du pharaon n’y est peut-être pas étrangère ?

Après la révolte populaire de 2011 et l’attentat récent visant des touristes étrangers, le gouvernement égyptien souhaite promouvoir son histoire unique et sa culture afin d’attirer à nouveau les touristes sur son sol. Une chose est sûre, la mythologie continue de fasciner à travers le monde, alors que les archéologues continuent de découvrir ses richesses dont l’étendue reste, j’en suis convaincue, encore insoupçonnée.

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