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L'art des joutes politiques (hilarantes) à l'anglaise

Un jeune homme rit, un verre à la mainUn jeune homme rit, un verre à la main
Gregory Hayes - Unsplash
Écrit par Marie Benhalassa-Bury
Publié le 13 mai 2021, mis à jour le 14 mai 2021

Une réponse simple et efficace de Sadiq Khan, des moqueries entre le Premier ministre et l’opposition… L’actualité britannique se laisse bien volontiers parsemer d’humour.

 

Au parlement, sur les réseaux sociaux… des boutades sur mesure pour notre plus grand plaisir

Dimanche dernier, un tweet d’un simple usager raillant la candidate à la mairie de Londres Laurence Fox est devenu viral. Fox n’a pas encore eu le temps de se remettre de son écrasante défaite à la municipale londonienne que le tweet à son encontre a déjà été repartagé en masse, clamant que Billie Piper avait écoulé plus de disques pour sa première chanson que Fox n’a obtenu de votes. La chanteuse en question n’est ni plus ni moins que son ex-femme ! Un tacle bien ciblé, donc, que Sadiq Khan n’a pas hésité à commenter d’un « En même temps, cette musique est une tuerie ». Une réponse sur un ton familier, saupoudrée d’un certain sarcasme, de la part du maire tout juste réélu.

Aujourd’hui, Boris Johnson a pris la parole au parlement et s’est dispersé dans des plaisanteries concernant le nouveau poste d’Angela Rayner au sein du parti travailliste, la comparant à une lionne, bien plus dangereuse que le mâle de l’espèce pourtant roi des animaux, puisque c’est elle qui chasse. Il a ajouté qu’aucun titre ne semblait lui suffire, et qu’il est certain que le chef de l’opposition Keir Starmer saura être vigilant, puisque « plus il la nourrit en postes à responsabilités, plus elle sera dure à rassasier ». La chancelière récemment promue s’en est amusé, indiquant d’un geste taquin qu’elle avait le chef du gouvernement à l’œil, pour twitter plus tard que « le seul poste qui lui donne faim, c’est celui de vice premier-ministre », un poste aujourd’hui vacant au Royaume-Uni. Un échange décidément cocasse entre deux opposants politiques.

Ces traits d’esprit, à mi-chemin entre rivalités profondes et simples volontés de rire un grand coup, interviennent donc même dans des conjonctures tendues au possible, entre négociations post-Brexit, remaniement du parti travailliste, élections dans tout le royaume, le tout sur fond de Covid-19… Un symbole, en somme, du sarcasme dont les britanniques ont le secret.

La répartie à l’anglaise : à l’aube d’une tradition historique

Historiquement, les politiciens du royaume n’en sont pas à leur coup d’essai. Ce sens de la rhétorique s’apparente donc à une sorte de coutume dans les rapports entre différents serviteurs de l’Etat.

 

Wiston Churchill et le président Truman rient ensemble
Wikimedia Commons

 

Voici quelques boutades historiques, plus ou moins délibérément insultantes mais toujours emplies d’un sarcasme revendiqué :

  • « J’ai déjà rencontré plusieurs assassins et tueurs en série, mais personne ne m’a jamais autant effrayé que Madame Thatcher » : La Dame de fer porte ici fort bien son surnom dans la description qu’en faisait Ken Livingstone, membre du Labour.
     
  • « Je présente mes excuses aux nains » : cette réponse cinglante nous provient de l’ancien ministre Simon Burns, après avoir été épinglé puisqu’il avait qualifié John Bercow, à l’époque président de la Chambre des Communes, de « nain stupide et moralisateur ».
     
  • Apparemment, Nancy Astor avait indiqué à Winston Churchill que si elle avait été sa femme, elle aurait empoisonné son café. Ce à quoi le plus célèbre des dirigeants anglo-saxons aurait répondu que s’ils avaient été ensemble, il aurait bu le dit café sans hésitation.
     
  • « La boss pense sûrement que Sinaï, c’est le pluriel de sinus » : une autre attaque à Margaret Thatcher de la part de Jonathan Aitken, au sujet des accords de SinaÏ portant sur le conflit entre Israël et les pays arabes. Une insulte sur la culture générale de la clivante dirigeante, pour laquelle il devra même présenter ses excuses.
     
  • « Elle est une sorte d’hybride entre Richard Nixon et Cersei Lannister » : difficile de se représenter mentalement ce que serait un tel mélange entre l’intransigeant personnage télévisé et le président démissionnaire. Mais c’est en tout cas la manière dont Emily Thornberry décrivait Theresa May. Une comparaison peu flatteuse, mais qui a du chien.
     
  • « Un mouton dans un habit de mouton » ou encore « un homme humble, avec beaucoup de raisons de l’être » : des piques adressées toutes deux à Clement Attlee, que Winston Churchill (à nouveau !) ne semblait décidément pas considérer comme un homme très brillant…

 

Il faut donc bien entendre que quoiqu’il advienne, les britanniques auront leur trait d’humour à faire et ce même face à leurs pires ennemis.