Édition internationale

Dans les coulisses de la visite présidentielle avec Vincent Caure

Député de la 3ᵉ circonscription des Français de l’étranger (Europe du Nord) et ancien collaborateur de l’Élysée, Vincent Caure connaît bien Emmanuel Macron, pour l’avoir accompagné dans les coulisses du pouvoir, depuis 2016. Lors de la visite d’État du président à Londres, il faisait partie de ceux qui l’accueillaient outre-Manche. Il nous emmène dans les coulisses de cette visite présidentielle et nous en dit un peu plus, entre émotion, symboles et enjeux stratégiques.

visite PR Vincent caure visite PR Vincent caure
Vincent Caure nous emmène dans les coulisses de la visite présidentielle !
Écrit par Ewan Petris
Publié le 1 août 2025, mis à jour le 3 août 2025

Vous avez accompagné Emmanuel Macron dans de nombreuses étapes de sa vie politique depuis 2016. Est-ce que cette visite prend une dimension personnelle ?

 

La première dimension, elle est d'abord et avant tout politique. Quand on est parlementaire élu d’un territoire, que ce soit sur le territoire national ou à l’étranger, recevoir le président de la République en visite, c’est toujours un honneur.

 

Après, effectivement, ça résonne beaucoup avec mon histoire personnelle, parce que c’était la première fois que j’avais l’occasion, après avoir organisé beaucoup de visites pour lui, donc de l’autre côté, au sein de son cabinet, d’être de l’autre côté du miroir, parmi les personnes qui pouvaient l’accueillir et l’accompagner par exemple, quand il y a eu le dépôt de gerbe à Carlton Gardens au pied de la statue du général de Gaulle, ou encore dans le cadre des présentations au président de la République et au roi Charles III à Windsor. Donc oui, il y avait une saveur particulière, pour moi, qui travaille avec lui depuis 2016 et qui maintenant a prolongé mon engagement à son service en tant que parlementaire. 


 

visite PR Vincent caure

 

Vous avez parlé de la gerbe de fleurs et aussi du château de Windsor. Lors de quels autres événements l’avez-vous suivi ?

 

Les événements auxquels j’ai participé, sont notamment ceux à Windsor Castle : le dîner, mais aussi un discours qu’il avait prononcé un peu plus tôt à Westminster, devant les membres des Communes et des Lords. Entre ces deux moments, il y a eu le dépôt de gerbe. On avait également assisté à l’arrivée du président à Windsor et aux cérémonies d’accueil par le roi Charles III.

 

Le second jour a été davantage consacré à des séquences économiques. Il y avait notamment un événement autour de l’intelligence artificielle, organisé à l’Imperial College sur le campus de South Kensington. Il a participé à une table ronde, notamment avec Arthur Mensch, le CEO de Mistral AI, entreprise française dans le domaine de l’IA. L’après-midi a été consacré à une séquence plus culturelle, au British Museum, dans le cadre de l’échange de cadeaux ou, en tout cas, de partenariats culturels. Celui-ci visait à répondre à une demande très ancienne et très attendue du côté britannique : le prêt de la tapisserie de Bayeux, qui sera bientôt transférée au British Museum.

 

Macron à Londres : “Oui, enfin, nous nous retrouvons”

 

Le soir, il y a eu le second dîner, organisé à l’initiative du Lord Mayor de la City of London, à Guildhall. 

Le troisième jour était une journée sans délégation. Ce jour-là, seuls le président de la République et les ministres étaient présents. Ils ont mené la partie plus institutionnelle : le sommet franco-britannique, au sens ministériel du terme, avec leurs homologues britanniques, emmenés par le Premier ministre Keir Starmer.

 

événement autour de l’intelligence artificielle
Action pour l'IA, l'événement autour de l’intelligence artificielle à Londres

 

Initialement, est-ce que vous connaissiez les objectifs d’Emmanuel Macron pour cette visite ? 

 

Oui, le premier objectif faisait écho à l’ancienneté de la précédente visite d’État, en réalité. Une visite d’État n’est jamais un geste anodin dans les relations internationales, encore moins entre deux nations alliées et proches. Or, il n’y avait pas eu de visite d’État française au Royaume-Uni ni sous François Hollande, ni lors du premier mandat d’Emmanuel Macron. Il fallait remonter à 2008, sous Nicolas Sarkozy. Donc, l’objectif premier, c’était de relancer cette relation entre Paris et Londres, de lui insuffler un nouveau dynamisme, c’est un peu l’éternelle comparaison : il y a les déclarations d’amour, et puis il y a les preuves d’amour. 

 

Un très bon exemple de cette symbolique, c’est le prêt de la tapisserie de Bayeux. Il s’agit de quelque chose de complexe à organiser, donc cela montre un véritable effort du côté français. Et surtout, c’est une demande réitérée depuis 70 ans par les Britanniques. Ce n’est pas un objet quelconque. Cela renvoie à la conquête de l’Angleterre par Guillaume le Conquérant, aux liens historiques forts entre nos deux pays. 


 

En tant que député issue de la majorité présidentielle, comment avez-vous préparé cette visite avec l'Elysée ?

 

J’ai eu la chance, dans les mois et les semaines précédant la visite, d’assister à d’autres visites, comme celles de Gabriel Attal ou de Yaël Braun-Pivet. Par exemple, j’avais présenté le dispensaire français à ce dernier. C’était un exemple parmi d’autres, mais cela permettait de réfléchir à ce qui pouvait être proposé à l’Élysée.

 

Gabriel Attal à Londres : que signifiait vraiment sa venue ?

 

L’avantage d’être à la fois parlementaire de la majorité présidentielle et ancien collaborateur de l’Élysée est que je connais les attentes du cabinet présidentiel en matière de formats et de séquences. J’ai donc pu faire passer des propositions qui me paraissaient pertinentes pour ce déplacement en transmettant des éléments de contexte, de perception, à la fois sur des sujets de vie quotidienne et sur les grandes dynamiques entre Paris et Londres. C’est une matière que j’ai pu accumuler en discutant avec les Français du Royaume-Uni, à Bristol, Manchester, Édimbourg, etc. Cela m’a permis de fournir au président un éclairage assez fin sur l’état d’esprit des Français établis ici.

 

Quelles décisions concrètes ont été prises lors de la visite ?

 

Cette visite et le 37e sommet franco-britannique, avaient d’abord pour objectif de relancer une amitié mise à mal par le Brexit, le Covid, et les tensions politiques passées.

 

Ensuite, il y a eu un accent sur le contexte international. Des annonces tangibles ont été faites pour réaffirmer que Paris et Londres sont alignés sur plusieurs sujets majeurs : la guerre en Ukraine, la défense, la souveraineté militaire, le pilier européen de l’OTAN.

Par exemple, lors de la conférence de presse conjointe entre le Premier ministre britannique et Emmanuel Macron, il a été annoncé que la capacité de la force conjointe franco-britannique dans le cadre de l’OTAN allait être multipliée par cinq.

 

Ce sommet s’inscrit aussi dans la continuité du rapprochement voulu par les travaillistes britanniques avec l’Union européenne. Il y a eu des discussions sur la participation du Royaume-Uni au programme Erasmus+, très attendue par le monde éducatif.

Sur le plan économique, il y a eu des engagements sur les investissements croisés, notamment dans le secteur du nucléaire, avec plusieurs milliards d’euros d’investissements français au Royaume-Uni. Enfin, il y a eu des discussions sur la question migratoire, à la demande des Britanniques, avec une volonté d’avancer sur ce dossier.

 

Pour résumer :
1/ Relancer d’un partenariat stratégique entre Paris et Londres,
2/ Réaffirmer une perspective commune sur la scène internationale,
3/ Améliorer la vie des citoyens, par exemple sur les mobilités étudiantes ou professionnelles.

 

Beaucoup d’accords ont été signés entre le Royaume-Uni et l’Allemagne concernant la libre circulation des étudiants. Peut-on espérer un tel réchauffement avec la France?

 

Je pense qu’il faut l’espérer, mais surtout s’en donner les moyens. Le gouvernement français doit se battre pour cela. Le président de la République l’a dit dans son discours à Westminster. Les réactions étaient plus mesurées du côté des travaillistes ou des conservateurs, mais il y avait une adhésion réelle à cette idée.

 

En tant que député français, et pour les citoyens français au Royaume-Uni ; faciliter la vie des stagiaires, des chercheurs, des étudiants, de tous ceux qui veulent travailler ou faire des séjours d’étude ici est une priorité. Il faut lever les contraintes, qu’elles soient administratives (visas, procédures), ou financières (comme les frais de sponsoring de visas professionnels). Et ça, c’est un combat que nous devons mener ensemble.


 

Quel a été selon vous le moment le plus fort de cette visite ?

 

Instinctivement, j’aurais dit le dîner d’État à Windsor Castle. C’était très impressionnant. Mais en réalité, le moment le plus fort, politiquement, c’était le discours du président de la République à Westminster. Encadré par les mots du Speaker de la Chambre des Communes et de la Chambre des Lords, il a pu, devant les parlementaires des deux chambres, réaffirmer l’amitié franco-britannique. Il dit que nous avons des différences, et qu’il ne s’agissait pas de les gommer, mais que l’histoire montre que, face aux grandes épreuves, Britanniques et Français se sont souvent tournés l’un vers l’autre.
 

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