L’auteur britannique est décédé il y a tout juste 71 ans.
George Orwell, de son vrai nom Eric Arthur Blaire, fait partie de ces artistes moins connus que leurs œuvres. Le récit dystopique 1984 et la satire du régime stalinien La Ferme des animaux, ses œuvres principales, résonnent particulièrement aujourd’hui par leur caractère dénonciateur et annonciateur des méthodes de surveillance pratiquées par les régimes dictatoriaux contemporains.
De sa naissance en 1903 aux Indes britanniques où son père travaillait à la Régie de l’opium jusqu’à son décès à Londres en 1950 de la tuberculose, Orwell n’aura cessé de voyager et d’expérimenter, alimentant encore et toujours sa soif de réflexion. Voici, dans cet article, cinq passages de sa vie qui vous aideront à comprendre la personnalité de l’homme.
Eton et Aldous Huxley
Né aux Indes dans une famille de la moyenne bourgeoisie, Orwell retourne rapidement vivre en Angleterre avec sa mère et ses sœurs. Il étudie au collège St Cyprian d'Eastbourne. Rabaissé par ses professeurs qui lui rappellent régulièrement que son admission dans l'établissement n’est due qu’à une bourse, il redouble d'efforts pour devenir un élève brillant. Il obtient ainsi une nouvelle bourse qui lui permet cette fois d’intégrer la prestigieuse institution d’Eton, centre de formation des plus hautes élites du pays. Il s’intéresse peu aux enseignements de l’établissement et devient rapidement un élève mal classé. Hasard de l’histoire, il y rencontre l’écrivain Aldous Huxley, lui aussi auteur d’un des plus grands romans d’anticipation dystopique de l’histoire : Le Meilleur des mondes. Ce dernier y occupe un poste de professeur de français et fait découvrir à Orwell le goût des mots. Pourtant rebelle et peu enclin à suivre les ordres, il prépare, à sa sortie d’Eton, les concours lui permettant d’intégrer la police impériale.
Retour aux Indes
A 19 ans, il fait son retour sur la terre de sa naissance dans l’uniforme de sergent. Il est envoyé en Birmanie, alors en proie à des mouvements de grève et en plein développement du mouvement nationaliste birman. Selon l’ancien gouverneur adjoint de la région, la mission des britanniques est alors de « faire régner la loi et l’ordre dans les régions barbares ». Au bout de “cinq années d’ennui au son des clairons » il décide de démissionner et de rentrer en Angleterre. Il gardera un mauvais souvenir de ses années passées aux Indes, regrettant de « mettre des gens en prison pour avoir fait ce [qu'il] aurait fait à leur place ». Cette expérience nourrira son rejet de l’impérialisme britannique.
Dans la dèche à Paris et à Londres
A son retour en Angleterre, il se consacre à l’écriture dans le but d’en faire son métier. Rongé par un sentiment de culpabilité d’avoir « été l’exécutant d’un système d’exploitation et d’oppression ». Il commence à étudier la vie des populations pauvres de Londres. Il passe de longs moments dans les quartiers les plus pauvres de la capitale. Il passe également un an à Paris à vivre de petits boulots, faisant notamment la plonge dans des grands hôtels et restaurants. Il y écrit des articles pour des journaux locaux. Il rentre à Londres au bout d’un an et continue un moment à accompagner des vagabonds sur leur chemin. Il tire de ses deux années le récit autobiographique Dans la dèche à Paris et à Londres, publié en 1933. Comme un récit de voyage, il y raconte sa vie de travailleur pauvre et ses rencontres avec des chômeurs et des immigrés. De son expérience de la faim, de l’exploitation et de la misère, naissent des convictions sociales qui ne le quitteront plus.
Orwell combattant
Convaincu de la justesse de la lutte, Orwell quitte l’Angleterre pour l’Espagne en 1936. Grace à des lettres de recommandations du Parti travailliste indépendant anglais, ils rejoignent, lui et sa femme, les milices du Parti ouvrier d’unification marxiste (POUM). Son expérience dans la police impériale lui permet d’obtenir facilement un poste de combattant et de participer activement à la guerre civile espagnole. Il passera une longue période sur le front en Aragon avant de retourner à Barcelone où les marxistes et anarchistes se battent contre les communistes et les socialistes. Il retourne ensuite au front à Huesca où il sera blessé à la gorge avant de rentrer en Angleterre. Orwell se réjouit de son expérience en Espagne, heureux d’avoir participé à une cause à laquelle il croit et satisfait d’avoir découvert un système dans lequel la frontière des classes s’estompait. Il sera en revanche profondément déçu par la façon dont les intellectuels de gauche au Royaume-Uni racontent la guerre d’Espagne. Pour la plupart communistes, ils attaquent systématiquement le POUM. Il rédige Hommage à la Catalogne, publié en 1938, pour raconter son expérience et dans le but de rétablir ce qu’il considère comme la vérité.
1984 et La Ferme des animaux
Trop frêle pour intégrer l’armée, il ne peut se battre comme il aurait voulu le faire pendant la Seconde Guerre mondiale. Il se consacre au journalisme, il collabore notamment avec la BBC, et au développement de ses idées politiques. En 1943, il commence à écrire La Ferme des animaux. En parallèle, il écrit par correspondance à la revue américaine et trotskiste Partisan review. Dans ces Lettres de Londres, il évoque sa méfiance des théories staliniennes. C’est d’ailleurs le but de son livre, parodier le système stalinien pour mettre en avant ses aspects totalitaires. Il aura du mal à trouver un éditeur, ceux-ci craignent les conséquences de la publication d’un livre montrant les dirigeants communistes en cochons. Il paraîtra finalement en 1945. En 1946, Orwell s’installe en Écosse sur l’île de Jura, sa santé se détériore rapidement et il espère y trouver du repos. Il se lance dans l’écriture de 1984, son œuvre la plus célèbre. L’idée avait germé dans sa tête depuis un moment et l’ensemble du roman repose sur des éléments observés dans chaque étape de sa vie. Affaibli par la maladie, il meurt en 1950, moins d’un an après la publication du roman. Salué par la critique, l’ouvrage servira à de nombreux groupes politiques pour dénoncer le camp adverse. Peu avant sa mort, il précisera que les « perversions » évoquées dans l’ouvrage concernent autant le fascisme que le communisme.
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