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Renforcement du droit à l’avortement : la France y pense, le Royaume-Uni plus réservé

Le renforcement du droit à l'avortement provoque de vifs débatsLe renforcement du droit à l'avortement provoque de vifs débats
Manny Becerra - Unsplash
Écrit par Colin Porhel
Publié le 30 juin 2022, mis à jour le 30 juin 2022

Après la déflagration causée par la décision de la Cour suprême de remettre en cause le droit à l’avortement aux États-Unis, Londres et Paris s’interrogent sur la nécessité de consolider leur législation en la matière. Avec des positions divergentes.

 

Près de deux ans après son départ de la Maison Blanche, l’ombre de Donald Trump plane toujours sur la politique étasunienne. En nommant pendant son mandat trois juges à la Cour suprême, l’ancien président ultra-conservateur a permis à l’institution de revenir sur l’arrêt Roe vs Wade, qui accordait aux Américaines le droit d’avorter sur tout le territoire. Il n’a pas d’ailleurs pas manqué de saluer la décision du tribunal, qui répond selon lui à « la volonté de Dieu ».

 

Pour éviter pareille situation, des voix s’élèvent au Royaume-Uni et en France pour renforcer le droit à l’avortement, en l’inscrivant respectivement dans sa prochaine British Bill of rights et dans la Constitution.

 

Au Royaume-Uni, un droit toujours fragile

Dépénalisé depuis l’Abortion Act de 1967, l’avortement n’en reste pas moins un droit fragile dans les différents États du Royaume. Si en Écosse, en Angleterre et au Pays de Galles, l’interruption volontaire de grossesse (IVG) peut être réalisée dans les 24 premières semaines, l’Irlande du Nord possède de son côté un cadre législatif beaucoup plus strict.

 

Non soumis à l’Abortion Act de 1967, le pays n’a décriminalisé l’avortement qu’en 2019, sous la pression de Londres. Le gouvernement local n’a toutefois toujours pas mis en place les services nécessaires pour rendre accessible l’IVG, poussant le secrétaire d’État pour l’Irlande du Nord, Brandon Lewis, à déclarer que les autorités « ne respectaient pas la législation ». « Si le ministère de la Santé (…) ne finance pas de services d’avortement, j’interviendrai davantage », a-t-il ajouté.

 

Une prise en charge difficile, également constatée en Angleterre. « Pour les femmes qui sont à entre 10 et 20 semaines de grossesse, c’est très difficile de trouver un rendez-vous pour une opération. Au-delà de 20 semaines, c’est quasiment impossible. Or, les femmes qui demandent à avorter à une telle étape de grossesse avancée sont généralement soit des femmes très jeunes qui ont peur, ou des femmes victimes de violences conjugales, ou encore des femmes qui ont vécu récemment un événement bouleversant comme la perte d’un conjoint », nous expliquait Katherine O’Brien, membre du British Pregnancy Advisory Service (BPAS) en novembre dernier. Depuis, l’avortement à domicile a été définitivement légalisé, faisant ainsi progresser le droit réel à l’IVG dans le pays.

 

« Pas de raisons de modifier la loi »

Dans ce contexte, et face à la situation observée aux États-Unis, la députée travailliste Rosie Duffield a exhorté le gouvernement britannique à « envoyer un message clair » en renforçant le droit à l’avortement au Royaume-Uni. Plus tôt dans la semaine, Stella Creasy, également élue à la Chambre basse du parlement, avait déposé un amendement visant à intégrer l’IVG dans la prochaine British Bill of Rights, qui doit être votée prochainement.

 

Une proposition immédiatement rejetée par le vice Premier ministre, Dominic Raab, qui a estimé que le cadre législatif actuel n’avait pas vocation à être modifié. « Il n’y a pas de raisons de modifier la loi », a-t-il ajouté. En 2020, celui qui est également secrétaire d’État à la Justice s’était abstenu lors d’un vote sur l’introduction de zones tampons autour des cliniques d’avortement, qui permettent d’empêcher les manifestants pro-vie d’harceler les patientes avant leur IVG.

 

En France, le droit à l’avortement bientôt inscrit dans la Constitution ?

De l’autre côté de la Manche, le débat agite aussi la classe politique. La Première ministre, Elisabeth Borne, a promis de « continuer à porter le combat » de l’inscription de l’IVG dans la Constitution, considérant que celui-ci pouvait être considéré comme un droit fondamental. Une position qui n’a pas toujours été aussi claire de la part de la majorité présidentielle. En 2018, cette dernière avait voté contre un amendement déposé en ce sens par La France insoumise. Un an plus tard, en juillet 2019, les députés de la majorité n’avaient même pas pris la peine d’inscrire une proposition similaire, cette fois soumise par le socialiste Luc Carvounas, à l’ordre du jour.

 

Un changement de position qui s’est traduit, dès samedi, par le dépôt par les macronistes d’un projet de loi visant à inscrire le droit à l’avortement dans la Constitution. Les députés de gauche, d’accord sur le principe, proposent de leur côté « un texte commun à l’ensemble des groupes de l’Assemblée nationale », excepté le Rassemblement national. De l’autre côté de l’échiquier politique, plusieurs députés d’extrême droite sont par ailleurs opposés à l’IVG, légalisée en France de façon permanente depuis 1979. Parmi eux figurent notamment Caroline Parmentier, proche conseillère de Marine Le Pen, qui considère que le droit à l’IVG n’est pas un droit des femmes, ou Christophe Bentz, élu en Haute-Marne, qui parle de l’avortement comme un « génocide de masse ».

 

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