Le Pérou est le premier pays en Amérique latine à avoir décrété l’état d’urgence avec la fermeture des frontières et les mesures d’isolement social, cela dès le 16 mars, il est malgré tout devenu le deuxième pays le plus touché par l’épidémie du Covid-19, après le Brésil. Le Pérou occupe même désormais le 12ème rang mondial des pays les plus affectés, en nombre de cas confirmés (Université Johns Hopkins).
De nombreux experts ont salué la réactivité et les mesures prises très tôt par le gouvernement péruvien pour endiguer la propagation du Covid-19 et pour ensuite relancer l’économie du pays. Environ 80% des péruviens continuent de soutenir la gestion de la crise par le président Martín Vizcarra (Ipsos Apoyo).
Le confinement a été prolongé cinq fois, il est désormais repoussé jusqu’au 30 juin. Un couvre-feu reste également de vigueur les dimanches et la nuit (avec différents horaires selon la région du pays).
Mais, malgré plus de deux mois de confinement national obligatoire, la propagation du virus ne semble toujours pas maîtrisée.
Le confinement a été instauré au Pérou alors que moins de 100 cas avaient été avérés officiellement. Ce sont désormais 135.905 cas répertoriés ainsi que 3.983 morts dus au Covid-19 (au 27 mai).
Pourquoi les contaminations continuent-elles d’exploser ? Suivant les chiffres fournis par le Ministère de la Santé (Minsa), on dénombre plus de 30.000 cas supplémentaires et presque 1.000 morts en une seule semaine (du 20 au 27 mai). Ces derniers jours, des chiffres jamais atteints ont été enregistrés : un premier record pour la journée de mardi (26 mai), 5.772 nouveaux cas et un total de nouveau dépassé mercredi (27 mai) avec 6.154 nouvelles contaminations.
Pourquoi la courbe des contaminations ne s’aplanie pas ?
Plusieurs raisons ont été avancées pour tenter d’expliquer cette situation :
Le travail informel et la pauvreté
Les mesures de distanciation sociale sont très vite devenues une véritable contrainte économique pour les péruviens les plus pauvres. Dans un pays où 70% de la population active vit du travail informel, le confinement a rajouté de la précarité à la précarité. Beaucoup de travailleurs ambulants sont retournés dans la rue malgré les interdictions, tout simplement pour essayer de gagner de quoi manger et nourrir leur famille. Malheureusement, ils ont joué un rôle important dans la propagation du virus.
Les marchés
Avec le confinement, les lieux de vente des denrées alimentaires sont restés ouverts, tout comme les banques et les pharmacies. Si les supermarchés n’ont pas cessé de rajouter des conditions à leur accessibilité pour respecter les consignes sanitaires, les marchés sont eux rapidement devenus de véritables foyers de contagion, à cause des fortes agglomérations de personnes et des mesures de distanciation sociales difficiles à faire respecter. L’exemple du marché aux fruits de la Victoria à Lima est révélateur du problème. 86% des vendeurs ont été diagnostiqués positifs au Covid-19. Finalement, certains marchés ont été fermés, des mesures ont été prises, mais la réaction du gouvernement a certainement été trop tardive.
Les banques
Le Pérou est l’un des pays d’Amérique latine qui a le plus investit dans la lutte contre l’épidémie, en y consacrant environ 10% de son PIB, notamment pour venir en aide aux péruviens qui se sont retrouvés sans travail. Parmi les mesures prises par le gouvernement, le paiement d’un bon de solidarité de 760 soles (environ 200 euros) a été décidé pour près de 7 millions de foyers pauvres. Beaucoup d’entre eux se sont donc déplacés vers les banques pour retirer cette aide de l’État, ce qui a eu pour conséquence dramatique de créer des files d’attentes importantes devant les banques, créant ainsi de nouveaux foyers de contagion.
À quand le pic de l’épidémie au Pérou et l’inversion de la courbe des contaminations ?