Instituteur et pompier volontaire, Sébastien Perret a eu l'idée folle de monter de toutes pièces un service de secours d'urgence pour les victimes d'accident à Vientiane au Laos. Malgré des moyens dérisoires, grâce à l'aide de volontaires, ce service bénévole fait des miracles et sauve des vies. Sébastien Perret est le lauréat 2019 du Trophée Social & Humanitaire des Français de l'étranger, organisés par lepetitjournal.com et des premiers Trophées des Français d'Asie.
Sébastien Perret est un homme très sollicité. Son téléphone ne cesse de sonner, il y a toujours une urgence quelque part, on a besoin de ses conseils. Le jeune homme de 36 ans a créé de toutes pièces le premier service d'urgence du Laos, Vientiane Rescue, en 2010, avec quelques volontaires laotiens. Un pari fou. « Je n'avais pas beaucoup d'espoir, on était 4 ou 5, avec une ambulance vide et pas d'essence pour la faire rouler. Les formations étaient basiques, du fait de mon manque de vocabulaire technique en laotien. Personne ne croyait en nous. »
Enseignant et pompier volontaire en France, Sébastien Perret découvre le Laos en 2008. Il passe deux ans sur un « projet d'aventure », apprend la langue et se familiarise avec la vie locale. Lorsque la Croix-Rouge française le charge de travailler sur la Sécurité routière, Sébastien réalise « le nombre incalculable de blessés laissés sur le bord de la route faute de service de secours d'urgence ».
Dans cette ville d'un million d'habitants, Ventiane Rescue manquait de ressources : « Nous arrivions souvent trop tard, mal formés et mal équipés. Notre seule fierté réside à cette époque dans la gratuité de notre service ».
Petit à petit pourtant, Sébastien apprend le vocabulaire technique, forme ses équipes, et rassemble quelques fonds : « Nous avons commencé à obtenir de l'essence grâce à un entrepreneur français, à recruter des volontaires, à acheter du matériel spécialisé, à diffuser notre numéro d'urgence, à réduire nos délais d'intervention, bref, à sauver des vies. »
Un service 24h/24
Malgré un certain cynisme, très peu de soutien et de reconnaissance, Vientiane Rescue se bat au quotidien pour offrir une aide à tous ceux qui ne savent plus vers qui se tourner. D'autant que « ce sont les plus modestes qui ont besoin de nous, les deux-roues, ceux qui n'ont pas les moyens d'être protégés par la carrosserie d'une voiture représentent 90% des 250 victimes que nous secourons chaque mois. »
Aujourd'hui une centaine de volontaires se relaient nuit et jour pour intervenir : « Quatre équipes spécialisées sont capables de secourir les noyés, les victimes prises au piège lors d'incendie, les conducteurs incarcérés et les accidentés de la route ». Le budget mensuel est de 2.000 dollars : « On dépense 1.200$ par mois rien qu'en essence, le reste est utilisé pour renouveler le matériel. Si on perd une ambulance, on ne pourra pas en acheter une autre ». Pourtant, Sébastien Perret ne tient pas à structurer Ventiane Rescue : « Nous sommes très professionnels, mais nous ne fonctionnons pas comme les autres ONG, c'est un choix. Nous n'avons pas d'administration, de logistique, de comptable pour répondre aux appels d'offre de l'UE ou d'autres organisations. Cela nous bloque l'accès aux financements. Notre seule solution, c'est de promouvoir le service, on ne marche que sur les donations ». Sébastien défend farouchement son indépendance et a une vision exigeante de l'action humanitaire : « Je crois profondément que l'avenir de l'humanité, c'est l'entraide entre individus en dehors des systèmes et des grandes organisations », dit-il.
Attirer l'attention sur le projet
Depuis quelques années, le regard sur son action a changé. « La médiatisation peut aider contre l'indifférence, explique Sébastien Perret. Recevoir des fonds permet de s'équiper en matériel. Imaginez-vous, on n'a que 6 bouteilles de plongée, pas de palmes, de gants, de combinaisons. Nos tenues ignifugées ont été achetées en Thaïlande 100 dollars, alors que celle que j'avais dans les Yvelines vaut 1500 euros. Que va-t-il se passer dans les incendies ? Je veux que mes volontaires puissent travailler avec matériel de qualité. »
L'été dernier, Vientiane Rescue a été la première équipe étrangère à porter secours aux jeunes footballeurs bloqués dans une grotte en Thaïlande depuis plusieurs semaines. Une intervention délicate, menée par un personnel qualifié qui a prouvé sa notoriété grandissante dans les pays asiatiques frontaliers du Laos.
Pérenniser les secours
Quel avenir pour le projet ? Sébastien rêve parfois de rentrer en France («j'aime mon pays qui mérite qu'on se batte pour lui ») et de passer la main à ses volontaires laotiens, mais il réalise qu'ils ont encore besoin de lui, notamment pour le financement. Pilier de l'organisation, il peut faire la différence : « Les volontaires n'ont pas accès aux médias, au réseau, et c'est pourtant ce qui permet de récolter des fonds. Le fait que je sois passionné me dessert parfois mais permet aussi de convaincre. J'ai une grande gueule, mais cela peut être utile !». En attendant peut-être de se développer dans d'autres villes du Laos, Vientiane Rescue continue à faire des miracles : « Je n'ai jamais eu autant d'espoir qu'aujourd'hui ! »
Page Facebook de Vientiane Rescue : ici
Pour soutenir Vientiane Rescue