Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 2
  • 0

Retard, annulation, indemnités… Quels sont vos droits en tant que passager aérien ?

Juin, l’heure des voyages estivaux, des congés annuels ou des retours d’expatriation a sonné. Oui mais… si votre vol est en retard ou annulé, que faire ? Si votre bagage s’égare ? Si vous êtes en situation de “surbooking” ? Lepetitjournal.com fait le point sur les droits du passager aérien avec Maître Daniella Girondin-Vaudrémont, avocate au Barreau de Paris et experte du domaine aérien et touristique.

Un avion aux couleurs de la reine de neiges Un avion aux couleurs de la reine de neiges
Écrit par Capucine Canonne
Publié le 2 juin 2024, mis à jour le 6 juin 2024

 

 

Que savoir absolument pour voyager sereinement en avion ? 

Vous partez en vacances, en expatriation ou en voyage d’affaires. Pour s’éviter toute crise de nerfs, crise de couple, crise de panique, voici quelques conseils pratique proposés par Daniella Girondin-Vaudrémont

  • Vérifiez les exigences de voyage en matière de documents d’identité (et autres formalités administratives).
  • Vérifiez régulièrement les mises à jour concernant votre vol, et inscrivez-vous aux notifications de votre compagnie aérienne afin d’obtenir des informations relatives à une éventuelle modification ou perturbation du vol.
  • Enregistrez-vous en ligne car cela permet un gain de temps, le choix du siège, des frais supplémentaires évités selon les compagnies, une augmentation des chances d’éviter le refus à l’embarquement pour cause de surréservation (surbooking, la question est évoquée plus bas).
  • Vigilance quant à l’heure limite de présentation à la porte d’embarquement, ce qui implique d’anticiper les formalités d’enregistrement, les contrôles de sécurité et de la police aux frontières.

 

ENCADRE  - Quelle que soit votre difficulté, il faut tout d’abord connaître le texte applicable en cas de retard, annulation ou refus à l’embarquement. Il s’agit du Règlement européen n°261/2004, applicable  aux vols au départ d’un aéroport situé dans l’Union européenne (UE) à destination d’un aéroport UE ou hors UE, quelle que soit la nationalité de la compagnie aérienne et aux vols au départ d’un aéroport situé hors UE à destination d’un aéroport UE seulement si la compagnie aérienne est européenne.

 

 

Sachez que la compagnie aérienne peut être exonérée de sa responsabilité si la perturbation de vol est due à une « circonstance extraordinaire »

 

 

Dans le cas d’une annulation, d’un retard ou d’un refus à l’embarquement, est-ce que le vol est éligible à une quelconque indemnité ? 

Oui ! En application de l’article 7 du Règlement européen précité, le passager aérien subissant une annulation de vol, un retard de vol de 3h ou plus, ou un refus à l’embarquement, a droit à une indemnité allant de 250 euros à 600 euros en fonction de la distance du vol - 250 euros pour les vols de moins de 1.500 km, 400 euros pour les vols intracommunautaires de plus de 1.500 km, et pour les vols entre 1.500 km et 3.500 km, 600 euros pour les vols de plus de 3.500 km

Oui, mais… sachez que la compagnie aérienne peut être exonérée de sa responsabilité si elle a informé le passager de la perturbation de vol plus de 14 jours avant la date de départ  ou si la perturbation de vol est due à une « circonstance extraordinaire » (voir plus bas). 

 

 

un vol aérien est parfois compliqué

 

 

Souvent, le passage a réservé d’autres réservations pour compléter le voyage : vol intérieur, location de voiture, excursions etc..que faire si le vol est retardé ? 


 

Et quand prétendre à un réacheminement* ou un remboursement du vol  ? 

En application de l’article 8 du Règlement européen précité, en cas de perturbation de vol :

  • soit la compagnie aérienne propose un vol de réacheminement ;
  • soit elle rembourse le billet d’avion dans un délai de 7 jours.

Concernant le réacheminement*, celui-ci est régi par l’article 9 du Règlement européen. Si vous l’acceptez, votre prise en charge comprend : les rafraîchissements et restauration, l’hébergement lorsque l’attente du vol de réacheminement nécessite une ou plusieurs nuitées, et les frais de transport aller/retour aéroport-lieu d’hébergement.

Daniella Girondin-Vaudrémont prévient : “En revanche, les compagnies aériennes refusent quasi-systématiquement de rembourser les frais engagés avant toute perturbation de vol, et indépendamment du contrat de transport aérien. Une compagnie aérienne est responsable des dommages dits prévisibles (frais générés par une perturbation de vol), mais pas pour des frais réglés avant toute perturbation de vol. Cette notion de prévisibilité est discutable”. Car, souvent, le passage a réservé d’autres réservations pour compléter le voyage : vol intérieur, location de voiture, excursions etc…Si le vol est en retard ou annulé, il peut perdre les sommes versées aux prestations touristiques réservées. Dans le cadre de la prise en charge prévue à l’article 9 du Règlement européen précité, il est possible de saisir la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC). Celle-ci peut sanctionner d’une amende administrative une compagnie aérienne qui ne respecte pas les obligations fixées par la réglementation en matière de droits des passagers aériens. Le montant de cette amende peut s’élever à 7.500 euros, doublé en cas de récidive.


 

* ENCADRE - Qu’est ce que le réacheminement ? Il s’agit d’un changement de route, de tarif, de transporteur, de type d'avion, de classe de service, de vol ou d'éléments originellement prévus au document de transport approprié). Au sens du Règlement européen précité, la notion de réacheminement est similaire, excepté le changement de tarif : la compagnie doit proposer un réacheminement sans surcoût tarifaire 

 

 

Qu’est-ce que le “surbooking” ?

La pratique de la surréservation, “surbooking”, consiste pour une compagnie aérienne à vendre davantage de billets d’avion que le nombre de places disponibles dans l’avion. Dans la mesure où la non-présentation d’un certain nombre de passagers à l’aéroport est fréquente (le “no-show”), le surbooking permet à la compagnie de tout de même remplir l’avion.


 

Est-ce que le “surbooking” est  une pratique légale ?

“Oui, mais à certaines conditions”, précise Daniella Girondin-Vaudrémont.  “Lorsque tous les passagers prévus sur le vol se présentent, la compagnie doit au préalable faire appel à des passagers « volontaires » qui acceptent de ne pas embarquer moyennant un accord (indemnité, prise en charge, etc.). Si aucun passager n’est volontaire ou si le nombre de volontaires est insuffisant, la compagnie peut refuser l’embarquement au « surplus » de passagers, lesquels seront indemnisés conformément à l’article 7 du Règlement européen précité.” Vous êtes prévenus… 

 

un vol aérien qui est en retard

 

 

Qu’est-ce qui n’est pas considéré comme une circonstance extraordinaire ? Un problème technique sur l’appareil.


 

Parfois, les compagnies aériennes évoquent la “circonstance extraordinaire” (ou “circonstance exceptionnelle”). Qu’est-ce donc ? 

La compagnie aérienne peut être exonérée de sa responsabilité si la perturbation de vol est due à une « circonstance extraordinaire » comme, par exemple, des conditions météo difficiles, une grève des contrôleurs aériens, une ingestion aviaire, le foudroiement de l’appareil , le Covid-19, la fermeture des frontières, le déroutement du vol en raison d’un passager malade à bord nécessitant une assistance médicale. “A noter que la compagnie doit prouver la circonstance extraordinaire ayant directement impacté le vol litigieux.” souligne Maître Girondin-Vaudrémont.

 

ENCADRE - Qu’est-ce qui n’est pas considéré comme une circonstance extraordinaire ? Un problème technique sur l’appareil. “contrairement à ce que peuvent affirmer de nombreuses compagnies afin de décourager les passagers” justifie l’experte, une grève interne à la compagnie (grève du personnel navigant), des raisons opérationnelles ou encore le temps limite de travail atteint pour l’équipage.


 

 

Lorsque le passager achète un billet « non remboursable », cela exclut-il tout remboursement ? 

Daniella Girondin-Vaudrémont nous le confirme : “Non, les taxes aériennes -indiquées sur le billet -  doivent être remboursées. Même si le remboursement du billet n’est pas possible conformément aux conditions tarifaires applicables, le passager peut tout de même exiger le remboursement de la taxe d’aéroport (code QW) et la redevance passager (code QX)” . L’experte ajoute que ce remboursement est obligatoire dès lors que le titre de transport n’a pas donné lieu à transport (article L224-66 du Code de la consommation). Attention, il n’est pas automatique, le passager doit en faire expressément la demande (par écrit).

 

Les bagages non enregistrés (en cabine ou sac à main) sont sous la responsabilité du voyageur


 

Qui est responsable en cas de perte ou de retard de bagages ? 

Sachez que la compagnie aérienne est responsable du dommage survenu en cas de destruction, perte ou avarie de bagage (article 17.2 de la Convention de Montréal ou de Varsovie selon la signature de l’Etat) et retard de bagage (article 19) . “Dans tous les cas, vous devez vous adresser au comptoir du service bagages de l’aéroport ou au guichet de la compagnie afin de faire constater immédiatement la non-livraison du bagage. Un rapport d’irrégularité des biens (PIR - Property Irregularity Report) sera rédigé, lequel indique un numéro d’identification” précise Daniella Girondin-Vaudrémont.  En revanche, les bagages non enregistrés (en cabine ou sac à main) sont sous la responsabilité du voyageur. La compagnie serait responsable uniquement si le dommage survenu résulte de sa faute, par le personnel navigant notamment. 

 

 

un avion survole l'Europe

 

 

Que doit-on faire absolument en cas de retard, perte ou endommagement d’un bagage ? 

Votre bagage est endommagé ? 

Il est nécessaire de prendre des photos du bagage endommagé, idéalement datées. Un courrier de réclamation doit être adressé à la compagnie aérienne dans un délai maximum de 7 jours à compter du jour où vous avez récupéré votre bagage (article 31.2 de la Convention de Montréal).

Votre bagage est en retard ? 

Un bagage est retardé lorsqu’il n’est pas présent sur le tapis de livraison de bagages, mais qu’il vous est livré dans les 21 jours à compter de la date d’arrivée du vol. En application de l’article 31.2 de la Convention de Montréal, en cas de retard de bagage, vous devez adresser une réclamation écrite à la compagnie aérienne, au plus tard dans les 21 jours à compter de la date de mise à disposition du bagage.  “Lorsque vous achetez des produits de première nécessité (produits d’hygiène, sous-vêtements, etc.) pendant la période d’absence du bagage, vous pouvez en demander le remboursement à la compagnie aérienne sur présentation de factures. Attention, le montant total de ces dépenses doit être raisonnable” insiste Daniella Girondin-Vaudrémont 
 

Votre bagage est perdu ? 

Un bagage enregistré (en soute) est considéré comme perdu si la compagnie aérienne admet la perte du bagage enregistré, ou si le bagage n’est pas livré dans les 21 jours à compter de la date d’arrivée du vol (article 17.3). Vous devez donc faire une réclamation écrite auprès de la compagnie aérienne afin d’obtenir le remboursement du bagage et des biens perdus, en joignant des factures. 

Quelles indemnisations ? 

Selon la Convention de Montréal, l’indemnisation est possible dans la limite de 1.568 euros environ. “A noter que la compagnie aérienne ne rembourse pas sur base de la valeur neuve des effets personnels perdus, mais applique un coefficient de vétusté.” explique notre experte. Toutefois, si vous avez effectué une « déclaration spéciale d’intérêt » (déclaration de valeur) au moment de la remise du bagage enregistré à la compagnie (au comptoir d’enregistrement), moyennant le paiement d’une somme supplémentaire, la compagnie sera tenue de payer la somme déclarée. 

 

ENCADRE - Quelques conseils pratiques pour les bagages : Vérifiez les restrictions relatives aux bagages (nombre, poids et taille), lesquelles diffèrent selon la compagnie aérienne. Conservez le reçu d’enregistrement du bagage (souvent collé sur la carte d’embarquement). Effectuez une réclamation immédiatement sur place à l’aéroport ou le lendemain maximum. Achetez des produits dits de « première nécessité » réellement nécessaires :  les compagnies aériennes vérifient scrupuleusement les tickets de caisse et factures. 

 

 

Contrairement aux idées reçues, il ne sera pas plus difficile d’obtenir l’indemnité d’une compagnie low cost 

 

 

Y-a-t-il une différence de traitement de litiges entre une compagnie low cost et une compagnie aérienne classique dite « régulière » ? 

“Aucune” insiste Daniella Girondin-Vaudrémont. “le traitement des réclamations est sensiblement le même d’une compagnie à l’autre, et la procédure de réclamation pour les passagers peut s’avérer un véritable parcours du combattant, qu’il s’agisse d’une compagnie low cost ou régulière. Contrairement aux idées reçues, il ne sera pas plus difficile d’obtenir l’indemnité d’une compagnie low cost par rapport à une compagnie régulière."

En revanche, l’experte précise que  la distinction transporteur aérien contractuel/effectif est essentielle dans la mesure où les dispositions du Règlement européen précité sont applicables uniquement au transporteur aérien effectif.  “Dans certains cas, le passager réserve son vol auprès d’une compagnie aérienne mais ledit vol est opéré par une autre compagnie aérienne. Il s’agit de la pratique commerciale du « code-share » (partage de code), tout à fait légale. Il suffit que le passager ait connaissance de l’identité du transporteur qui opère le vol, le transporteur effectif.” 

 

 

un vol de nuit dans le ciel près de la France

 

 

Si le voyage a été réservé auprès d’une agence de voyages et s’annule, à qui s’adresser ? 

“Si vous avez réservé un forfait touristique auprès d’une agence de voyages, vous devez demander à l’agence le remboursement du billet d’avion en cas d’annulation de vol. En revanche, si votre vol est annulé et que vous aviez réservé votre billet d’avion hors forfait touristique (vol dit « sec ») auprès d’une agence de voyages, vous devez directement vous adresser à la compagnie aérienne, et non à l’agence de voyages, pour obtenir le remboursement de votre billet d’avion.” explique Daniella Girondin-Vaudrémont. 

 

 

le passager aérien dispose d’un délai de 5 ans à compter de la date du vol litigieux pour saisir le Tribunal

 

 

Et que faire si une compagnie aérienne refuse une indemnité due ? 

Afin de faire valoir ses droits, il faut au préalable envoyer un courrier de réclamation à la compagnie aérienne, généralement par courriel ou via un formulaire de réclamation proposé sur son site Internet.  A défaut de réponse ou en cas de refus d’indemnisation, le passager peut alors adresser une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception.

Le passager a ensuite la possibilité de s’adresser à un avocat intervenant dans ce domaine, lequel adressera une mise en demeure à la compagnie.  En cas d’échec, il faudra envisager la saisine du Tribunal, laquelle doit être précédée d’une tentative de règlement à l’amiable menée par un conciliateur de justice ou encore un médiateur. A défaut de réponse dans les 60 jours ou en cas de refus, il est possible de saisir le Médiateur du Tourisme et Voyage, uniquement si la compagnie est adhérente (www.mtv.travel). Afin d’engager la responsabilité de la compagnie aérienne sur le fondement du Règlement européen n°261/2004, le passager aérien dispose d’un délai de 5 ans à compter de la date du vol litigieux pour saisir le Tribunal. Sur le fondement de la Convention de Montréal (litige bagage notamment), le délai est de 2 ans.

 

ENCADRE - Dans certains cas, l’indemnité peut être réduite de 50% si finalement vous arrivez : 2h maximum après l'heure d'arrivée initialement prévue pour les vols de 1.500km ou moins, 3h maximum après l'heure d'arrivée initialement prévue pour les vols compris entre 1.500km et 3.500km et pour tous les vols intracommunautaires, 4h maximum après l'heure d'arrivée initialement prévue pour les vols de plus de 3.500km.



 

 


Daniella Girondin-Vaudrémont est diplômée d’un Master II de droit des affaires et de l’économie, et d’un Master II de droit et pratique du commerce électronique. Avocate inscrite au Barreau de Paris (cabinet situé à Paris 8ème), elle réside actuellement en Guadeloupe. Ancienne expatriée à Jakarta puis Singapour. Elle intervient dans les domaines suivants : droit du transport aérien (notamment la défense des droits des passagers aériens), droit du tourisme (accompagnement des professionnels du tourisme) et droit des contrats civils/commerciaux. 

 

Maître Daniella GIRONDIN-VAUDRÉMONT
Maître Daniella GIRONDIN-VAUDRÉMONT

Pour la contacter, par ici : +336.12.85.55.41 ou dgvaudremont-avocat@orange.fr 

Flash infos

    Pensez aussi à découvrir nos autres éditions

    © lepetitjournal.com 2024