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“Il faut parfois élargir l’horizon d’un enfant HPI. L’expatriation le permet”

Surdoué, précoce, prodige… beaucoup de mots peuvent caractériser un enfant à l’intelligence cognitive supérieure. Mais beaucoup de comportements différents aussi. Alors, lorsque les parents d’enfants HPI choisissent de vivre une expatriation, quels peuvent en être les défis et les bienfaits ? Laurent*, expatrié au Moyen Orient et papa de Léo* diagnostiqué HPI, nous raconte son histoire avec émotion pour la partager et aider d’autres parents dans le monde.

L'expatriation avec un enfant Haut potentiel intellectuel, un défi L'expatriation avec un enfant Haut potentiel intellectuel, un défi
Écrit par Capucine Canonne
Publié le 28 avril 2024, mis à jour le 29 avril 2024

 

 

Décider de partir en expatriation avec un enfant au Haut Potentiel Intellectuel (HPI) n’est pas une décision anodine. C’est celle qu’ont prise Laurent* et son épouse il y a quelques années lorsqu’une belle opportunité s’est présentée au Moyen Orient. Mais pour eux, le choix est vite fait : “nous vivions en Suisse avec nos trois enfants dont notre aîné, Léo, qui est HPI. Partir en expatriation est pour nous une ouverture d’esprit extraordinaire à offrir à nos trois enfants. Nous leur en avons parlé, ils étaient d’accord, Léo aussi.” Les parents voient en l’expatriation un moyen supplémentaire de nourrir leur fils, qui a soif de connaissances. “Souvent, les enfants à haut potentiel intellectuel manquent de nourriture par rapport à leurs besoins. Et donc il faut élargir leur horizon. L'expatriation est l’un des moyens de le faire” complète Florence Pâris, référente EHP, et praticienne en psychopédagogie positive depuis 2019. 

 

Vivre en expatriation avec un enfant autiste, une histoire d'amour et d’adaptation

 

" On nous disait que ses réactions étaient disproportionnées et incompréhensibles pour le reste de classe”.

 

les enfants sont tous différents

 

 

HPI : Se connaître avant d’envisager un changement de vie

Laurent* et son épouse ont senti très tôt que Léo* était un enfant atypique. “A deux ans, le quotidien était difficile, et il avait un comportement compliqué à la crèche. En grande section, il a été mis dehors de l’école publique suisse où nous étions. On nous disait que ses réactions étaient disproportionnées et incompréhensibles pour le reste de classe”. Placé dans un centre éducatif avec une structure médicale très développée, Léo passe des tests qui confirment un haut potentiel. Mais pas si simple de poser un diagnostic : “Mon fils avait des indicateurs qui étaient extraordinairement hauts d’autres extraordinairement moyens.” Quant au test de l’autisme, Léo se situe à la limite du spectre autistique. 

Interrogée, Anne-Laure Briand, ergothérapeute, et docteure en anthropologie, spécialisation Aspie/HPI insiste sur l’importance de bien comprendre le fonctionnement de son enfant sans stigmatiser, ni faire de sur-diagnostic. “Il faut être le plus approchant possible par rapport au niveau cognitif dans la compréhension du fonctionnement psycho-cognitif pour avoir les meilleures réponses et l’accompagnement.” 

En 2017,  Léo a 10 ans et intègre une école spécialisée pour les enfants HP : “l’école était très bien pour lui. Ils étaient peu par classe et les enseignants s’adaptaient aux besoins des enfants. Une structure incroyable” souligne le papa. Une adaptation personnalisée bénéfique selon Florence Pâris, “sans faire de généralités, je peux conseiller de rechercher une structure qui propose de décloisonner le niveau scolaire c'est-à-dire, pour chaque matière, de suivre un programme compatible avec les compétences de l’enfant, comme c’était le cas pour Léo. Par exemple suivre le programme de 5ème en mathématiques mais celui de 6ème en littéraire”. Autre voie intéressante, celle d’apporter plus de complexité en classe : réduire la quantité d’exercices répétitifs et en apporter d’autres plus complexes. “Mais, encore une fois, cela va dépendre des possibilités sur place”.

 

vivre avec un enfant HPI en expatriation

 

 

Au Moyen Orient, certaines écoles voient les enfants surtout comme des clients. L'accompagnement spécifique se monétise


 

Se renseigner sur les promesses d’inclusion scolaire 

A leur arrivée au Moyen Orient en expatriation en août 2022, un test est demandé aux enfants qui évalue les mécanismes de pensée des enfants. Si Léo obtient de bons résultats, l’entretien oral est trop difficile pour lui : “il a fait n’importe quoi pendant une heure. Nous nous sommes dit que les écoles ne le prendraient pas.” Finalement, le jeune garçon intègre une école internationale, ravie de recevoir “les petits mozarts ou les futurs prix nobels”. Mais le papa expatrié réalise très vite que l’approche d’inclusion sur place est très mercantile : “Sur les sites internet, des activités spéciales et des cours plus élaborés sont proposés mais, dans les faits, cela ne correspond pas à grand-chose. L’accompagnement n’est pas approfondi, les enfants n’étaient pas encouragés à l’effort. Avec du recul, je conseille aux parents de bien se renseigner en amont auprès d’autres parents par exemple sur ce qu’il y a derrière le terme d’inclusion. Au Moyen Orient, certaines écoles voient les enfants surtout comme des clients et l’accompagnement spécifique se monétise. Je pense que certains pays ne sont pas encore dans le vif du sujet de l’inclusion ”. 

 

 

Si les enfants HPI décrochent, c’est souvent que leur parcours scolaire n’est pas assez personnalisé 

 

Léo redouble son année. A la rentrée 2023, il intègre une nouvelle école, au système anglophone : “Cela se passe bien. Nous n’avons pas parlé spécifiquement de potentiels problèmes comportementaux ou de haut potentiel car, dans le cas de notre fils de 15 ans - à la limite du spectre autisitique - et du pays dans lequel nous sommes, nous considérons que cela n’est plus nécessaire.” Si les enfants HPI décrochent selon Florence Pâris, c’est souvent que leur parcours scolaire n’est pas assez personnalisé. “ils sont dans le moule des autres et se noient.” 

 

Scolariser un enfant à haut potentiel 

 


Pour Léo, l'expérience à l'étranger est une forme de thérapie, tout comme l’apprentissage de nouvelles langues 

 

vivre en expatriation avec un enfant HPI, une vie de famille à trouver

 

 

Trouver un environnement culturel et médical approprié 

Sur place, Laurent est ravi de pouvoir proposer une multitude d’activités à ses trois enfants, l’offre artistique et culturelle étant très variée : “Pour Léo, c’est une forme de thérapie bienvenue, tout comme l’apprentissage de nouvelles langues lorsque l’on vit à l’étranger.” Le papa se souvient d’ailleurs qu’à l’âge de 8 ans, Léo avait très vite cartonné en allemand, une nouvelle langue pour lui “Nous revenons sur cette idée de nourriture intellectuelle et d’apport culturel dont les enfants HPI ont besoin. L’apprentissage d’une langue est un parfait exemple” souligne Florence Pâris. 

Autre satisfaction pour la famille expatriée, l’environnement médical “il est à la pointe ici. Notre fils est suivi une fois par semaine. Les praticiens sont disponibles dans toutes les langues” . Sur place, les parents ne ressentent pas forcément le besoin de se confier ou d’échanger, un besoin qui peut être recherché par d’autres : “Je conseille souvent aux parents de se diriger vers des associations pour HPI car ils peuvent échanger avec d’autres parents et suivre des ateliers thématiques. Les organismes de l’AFEHP ou de l’ANPEIP en France en réalisent à distance notamment” commente Florence Pâris. 

 

un jouet apprend à faire un dessin pour être inclus

 

 

Il ne faut pas se laisser noyer et passer à côté des beaux moments de la vie en famille. 

 

Aujourd’hui, Laurent et son épouse sont très favorables à d’autres expatriations à l’avenir “nous souhaitons que nos 3 enfants aient une belle vie et que le petit frère et la petite sœur de Léo ne subissent pas de conséquences particulières.” Anne-Laure Briand rappelle d’ailleurs qu’il est important d’accorder des temps de tête à tête avec chacun des enfants, d’un bienfait immense pour tous. “Léo a 15 ans maintenant. Il doit faire en sorte que tout aille bien pour lui et il le fait. Il ne faut pas se laisser noyer et passer à côté des beaux moments de la vie en famille. Il y a des moments difficiles mais notre adolescent atypique nous apporte tellement…” confie Laurent avec une grande émotion.

 

*les prénoms des personnes ont été modifiés