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Jacky Deromedi : «Les entrepreneurs ont besoin de nous dès maintenant»

Jacky DeromediJacky Deromedi
Écrit par Déborah Collet
Publié le 21 juillet 2020, mis à jour le 27 juillet 2020

Deux des amendements relatifs au 3e projet de loi de finances rectificative déposés par la sénatrice Jacky Deromedi, ont été adoptés par le sénat samedi soir. Dans cet entretien exclusif, la sénatrice LR revient sur les enjeux de ces aides d’urgence qui permettront de soutenir les entrepreneurs français et le réseau culturel français à l’étranger après la crise sanitaire. 

 

Les entrepreneurs français à l’étranger aident notre commerce extérieur à se diversifier. 

 

Votre premier amendement veut octroyer 10 millions d’euros aux entrepreneurs français à l’étranger. Qui sont les entrepreneurs éligibles à ce dispositif ? 

Les 10 millions d’euros seront destinés aux petits entrepreneurs français à l’étranger comme les restaurateurs ou tous ceux qui tiennent des boutiques françaises. J’aimerais que ces entrepreneurs puissent obtenir un prêt équivalent à six mois de trésorerie pour reconstituer leurs stocks et attendre le retour de leurs clients. Au bout de ces six mois, si ces entrepreneurs arrivent à remonter la pente et à faire tourner leur activité, ils pourront commencer à rembourser le prêt. La somme sera remboursable sur deux à trois ans. En revanche, pour tous ceux qui ne pourront pas rembourser, ils ne doivent pas être pénalisés. Je souhaite alors que cette somme leur soit offerte sans contrepartie. Nous ne prendrons pas sur leurs biens personnels.

Les petits entrepreneurs sont "notre chance" car ils développent l’image de la France à l’étranger en vendant des produits français. Ils recréent une "ambiance à la française" au sein de leurs enseignes. Les entrepreneurs français à l’étranger aident notre commerce extérieur à se diversifier et font aimer la France dans leurs pays d’accueil. Ils ont un vrai rôle d’attractivité. 

 

L’idéal serait de répartir cette somme en lien avec les conseillers des Français de l’étranger et les chambres de commerce françaises à l’étranger. 

 

Concrètement, comment sera versée cette aide financière ?

Ces 10 millions d’euros seront pris sur les 50 millions d’euros destinés aux demandes d’aides d’urgence déjà acceptés dans le cadre du plan d’urgence pour les Français de l'étranger, annoncé par Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères. L’idéal serait de répartir cette somme en lien avec les conseillers des Français de l’étranger et les chambres de commerce françaises à l’étranger car ils connaissent sur place les entrepreneurs qui sont en difficultés. Les grosses entreprises françaises à l’étranger peuvent faire appel à des banques pour obtenir des prêts tandis que les petits entrepreneurs n’obtiendront pas de crédit. J’ai fait une demande pour que nous puissions avoir des prêts garantis par l’État comme ceux octroyés en France après la crise sanitaire afin de soutenir les entrepreneurs. Cette proposition n’a pas été retenue. Jusqu’ici, ces petites sociétés n’étaient pas éligibles au plan d’urgence pour les Français de l’étranger et nous aimerions que cela change. Cette aide financière sera attribuée selon l’étude de chaque dossier.

Les Français de l’étranger payent des frais de scolarité, un loyer, des charges fixes, des frais d’assurance, ils ont moins d’avantages que les Français résidant en France. Après la crise sanitaire, si vous ne pouvez pas payer votre loyer en France, vous pouvez obtenir des délais. Or, à l’étranger vous êtes directement mis à la porte. Dans de nombreux pays, le permis de séjour est dépendant du contrat de travail. À ce moment-là, si vous faites faillite, vous avez souvent seulement un mois ou deux pour vous retourner. 

 

Nous aimerions aider les Instituts français et les Alliances françaises à développer leurs offres culturelles en ligne. 

 

Votre deuxième amendement propose de débloquer 2 millions d'euros pour les Alliances et les Instituts français. Est-ce que cette somme sera suffisante pour éviter des fermetures ? 

Pour faire face aux conséquences économiques de la crise, ce sont principalement les petites Alliances françaises et les petits Instituts français qui ont besoin d’être aidés. Les grosses Alliances françaises comme celle de Singapour dont je suis la présidente peuvent s’en sortir. Malgré une diminution des effectifs d’élèves, nous allons passer la vague de la crise sanitaire. En revanche, pour les plus petites Alliances françaises, une somme de 5.000 à 10.000 euros leur permettrait de redémarrer leur activité afin d’éviter des fermetures.

Grâce à cette somme, nous aimerions aider les Instituts français et les Alliances françaises à développer leurs offres culturelles en ligne. Nous savons qu’acheter des programmes et former les équipes sur le plan digital peut coûter très cher. Avec cette aide financière, nous offrirons la possibilité aux petites alliances de maintenir leurs activités en ligne. Il est important de continuer à développer un esprit français à travers des événements en visioconférence pour rester proche de la communauté française et francophile. Si nous rassemblons une trentaine de personnes par visioconférence, nous entretenons l’échange et donc nous développons la culture française.

Nous devons aussi faire attention à ne pas perdre les étudiants qui suivent des cours. Il y a certaines législations dans des pays qui ne permettent pas d’avoir un grand nombre d’étudiants dans une même classe. Nous pouvons faire des cours de deux manières : en visioconférence et en présentiel. Les étudiants peuvent se rendre en cours un jour sur deux. Par exemple, s’il y a dix étudiants, cinq peuvent venir le lundi puis cinq autres le mardi.

 

Jusqu’ici, seuls 500.000 euros ont été utilisés sur les 50 millions d'euros attribués pour les demandes d'aides d’urgence. 

 

La situation étant urgente, pensez-vous que ces deux amendements seront rapidement adoptés par l’Assemblée nationale ? 

La session se terminant à la fin juillet, nous espérons que ces deux amendements seront retenus lors de la Commission Mixte Paritaire (CMP). Il faudra soutenir ces deux amendements lors de leur examen. 

Les entrepreneurs ont besoin de nous dès maintenant. Dans six mois, il sera trop tard car ils seront obligés d’arrêter leur activité et certains devront rentrer en France. Cette aide de 10 millions d’euros permettrait d’enclencher la machine et si nous arrivions à conserver cet amendement, nous pourrions arriver à aider de nombreux entrepreneurs français à l’étranger. Par la suite, nous pourrions essayer de débloquer d’autres montants afin de les soutenir. Jusqu’ici, seuls 500.000 euros ont été utilisés sur les 50 millions d'euros attribués pour les demandes d'aides d’urgence. Nous savons pourtant que les entrepreneurs et le réseau culturel français à l’étranger ont besoin de cet argent pour survivre après la crise sanitaire. La France ne peut pas abandonner ses enfants qui sont à l’autre bout du monde.

La Commission Mixte Paritaire (CMP) a tranché : les deux amendements relatifs à une aide financière à destination des entrepreneurs français et du réseau culturel français à l’étranger n'ont pas été retenus le 24 juillet 2020. 

 

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